Mythes et légendes urbaines Bulgares : Vila Roza

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Je suis franco-bulgare, ma mère est arrivée en France à l'âge de 18 ans et, de ce fait, j'ai baigné dans la culture de son pays autant que dans celle du pays où je suis née depuis ma plus tendre enfance. Je suis d'ailleurs très proche de ma famille qui vit en Bulgarie et, depuis que je suis petite, je vais souvent passer mes vacances d'été et de Noël chez eux. 

Avec mes cousins, l'une des choses qu'on aimait le plus quand on était petits c'était quand nos grands-parents et notre arrière-grand-mère nous racontaient des histoires. Mais ce n'était pas des contes pour enfants pleins de bons sentiments avec une jolie morale à la fin, non. Nous, ce qu'on a toujours préféré et même réclamé, ce sont les mythes du folklore local et toutes ces vieilles légendes urbaines connues par les plus anciens. Des histoires avec des croques-mitaines pour nous rendre sages quand on est seuls à la maison et des légendes plus ou moins connues par les gens du coin et plus ou moins effrayantes, pour nourrir la curiosité de nos cerveaux d'enfants mourant d'envie d'en savoir plus (et accessoirement mourant de peur à la tombée de la nuit). 

C'est pour ça qu'aujourd'hui, je vais vous parler d'un fait divers datant de 1985 et ayant même très librement inspiré un film bulgare à moyen budget à base de maison hantée et de malédiction. Sauf que la vérité, c'est que personne n'a jamais su expliquer ce qu'il s'est passé à Вила Роза (Vila Roza, Roseville en français) dans les Balkans cette année-là. 

Tout a commencé quand, en 1985, un groupe de cinq amis a décidé de profiter d'un week-end pour se réunir et partir tous ensemble pour une randonnée à l'est des Balkans, sur le site naturel dit "старият бял човек" ("le vieil homme blanc", ce surnom lui a été donné à cause de l'énorme chêne pluricentenaire qui s'y trouve). Vous devez vous en douter, si je vous en parle, c'est parce qu'aucun d'eux n'est jamais revenu de ce week-end de randonnée. 

En vérité, l'histoire est mystérieuse mais plutôt brève : lorsque les proches des cinq amis ont réalisé après quelques jours que personne ne revenait, ils ont décidé de signaler la disparition à la police qui a entrepris des recherches, pensant que quelque chose aurait pu se passer au cours du week-end. Ils auraient très bien pu être perdus ou blessés, ou sans doute les deux, à leur avis. Après tout, la nature est hostile. Non ? 

En effet, quelque chose leur était bien arrivé, mais c'était beaucoup plus sérieux qu'une simple petite blessure ou que le fait d'être perdu au milieu de nulle part. 

Quatre des membres du groupe furent retrouvés dans une vieille bâtisse au pied de la montagne. Le fameux ancien chalet de chasse surnommé Vila Roza. Ils étaient tous morts, éparpillés à l'intérieur du chalet et horriblement mutilés. Il n'y avait pourtant aucune trace d'un quelconque animal qui serait passé par-là ou même d'un humain qui se serait enfuis. Ce qui est plus troublant encore, c'est que le cinquième membre du groupe (un jeune homme prénommé Vassil) s'est comme évaporé dans la nature. Il n'a jamais été retrouvé, ni mort ni vivant, il est d'ailleurs toujours porté disparu presque 40 ans plus tard. 

À l'époque, l'affaire a fait énormément de bruit. Certaines rumeurs disaient que ces gens avaient été tués par un loup-garou, d'autres encore disaient qu'une secte satanique était cachée dans la forêt et qu'ils avaient été sacrifiés en l'honneur d'un démon, que Vassil était complice des prêtres sataniques et que c'était la seule explication logique à sa disparition mystérieuse. Oui, "logique". 

Bien sûr, aucune de ces théories n'était fondée, mais ce n'est pas pour autant que la lumière a été faite sur cette affaire. Le policier en charge de l'enquête a même avoué des années plus tard que "le cas Roseville" resterait à jamais le point noir de sa carrière. 

Les histoires autour de cet endroit pourraient s'arrêter là, mais en vérité ce n'est pas le cas. Une autre histoire raconte que dans les années 70, un groupe de militaires en expédition dans les Balkans se serait arrêté près du vieil homme blanc le temps d'une nuit. Rien d'anormal, non ? Encore une fois, vous vous doutez bien que s'il ne s'était rien passé, je n'en parlerai pas. 

L'histoire a seulement retenu que les militaires ont détalé comme des lapins en plein milieu de la nuit après avoir entendu et aussi, soi-disant, vu rôder une "bête plus grosse qu'un animal ordinaire et qui faisait un atroce bruit de grognement". Certains racontent qu'ils auraient profané l'endroit en manquant de respect à la nature et que la forêt aurait envoyé la bête pour les punir. D'autres personnes, à l'esprit moins moraliste mais plus imaginatif, préfèrent se dire qu'un affreux monstre hante les alentours et que lui seul est responsable de tous les faits-divers survenus aux alentours de Vila Roza et du vieil homme blanc. 

Mais ce n'est pas si étonnant que ça, de voir autant de gens spéculer à propos de la supposée bête du vieil homme blanc à chaque fois que quelque chose d'hors du commun se passe là-bas. Rien que la légende autour de l'origine du célèbre chêne blanc qui s'y trouve (et qui a donné son surnom à l'endroit) fait référence à un horrible monstre. 

On raconte qu'il y a très longtemps, trois frères vendeurs de fourrure qui voyageaient dans les Balkans ont été pris dans une tempête de neige au niveau de ce qui est aujourd'hui le vieil homme blanc. Alors ils ont installé un campement pour y passer la nuit et se sont endormis au bout de quelques heures. Le plus jeune des trois frères, qui à la base ne voulait pas entreprendre ce voyage avec ses deux aînés, a vu dans ses rêves cette nuit-là une affreuse et très grande créature avec une tête de chien, des griffes et un énorme pendentif très brillant autour du cou. La créature voulait racheter toutes les peaux de loups des trois frères en échange de son pendentif et bien sûr, dans son rêve, le cadet a accepté ce marché, plus heureux que jamais d'avoir fait la meilleure affaire de sa vie. Sauf qu'à son réveil, son rêve si génial serait devenu un véritable cauchemar. Pendant qu'il dormait, ses deux frères aînés avaient été dépecés et les peaux de loups qu'ils vendaient avaient été remplacées par les leurs. Ses mains et ses vêtements étaient couverts de sang et le pendentif récupéré dans son rêve autour de son cou, ce qui laissait entendre qu'il avait lui-même commis ce massacre. 

La légende dit qu'au lieu de s'échapper de la forêt, il y serait resté jusqu'à sa mort, survenue quand il était très âgé, à ne rien faire d'autre que marcher en espérant tomber sur la bête et lui rendre son pendentif en échange de la résurrection de ses deux frères. Il est dit que le jour où il est mort, un chêne blanc a poussé au milieu de la forêt de pins, par-dessus son cadavre. Mais il paraît que toutes les nuits ont peut l'entendre hurler de désespoir en appelant la bête pour la faire sortir de sa tanière. 

Est-ce que vous faites le rapprochement entre cette légende et la mort des compagnons de Vassil, notre porté disparu ? Ce n'est pas étonnant qu'une véritable légende urbaine soit née. 

Et c'est à cause de cette vieille histoire que le vieil homme blanc est surnommé ainsi et qu'à chaque fait-divers étrange ayant lieu à proximité, les gens parlent de monstres qui rôdent dans la forêt. La morale, s'il y en a une, c'est qu'il faut toujours respecter la nature et surtout ne jamais marchander avec les inconnus. L'explication des meurtres de Vila Roza et de la disparition mystérieuse de Vassil, il n'y en a pas et je crois bien qu'il n'y en aura jamais, tout comme il n'y aura jamais d'explication concernant la chose que les militaires de cette expédition aurait vu rôder dans la forêt une dizaine d'années avant les meurtres. 

Peut-être qu'en fin de compte, il y a vraiment une bête qui vit cachée quelque part au vieil homme blanc, peut-être que Vila Roza est réellement une maison hantée et que ses fantômes ne sont pas commodes ou bien peut-être qu'un tueur en série qui y vit à l'état sauvage a décrété que cet endroit est sa maison… on ne saura jamais la vérité. Tout ce qu'il y a à savoir, c'est que si vous décidez un jour de vous promener aux alentours du site naturel du vieil homme blanc dans les Balkans, prenez garde à vous, car vous pourrez bien ne jamais en revenir. 

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