Une question de foi

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Vous savez ce qui serait agréable ? Pouvoir regarder la télévision, simplement rester assis à la maison, faire un tour en voiture ou n'importe quoi d'autre sans que mon père n'évoque la religion.

Mon père est un maître dans l'art de transformer n'importe quelle conversation en un discours sur la foi. Tout ce qu'il lit, voit ou entend dans les médias l'incite à parler de spiritualité. J'ai même déjà vu cet homme être inspiré par les conditions météorologiques.

Sachez que nous ne sommes pas seuls et qu’il existe une puissance plus grande que tout ce que nous pouvons concevoir sur cette Terre, dit-il.

Sachez que le courage de la foi est une bravoure qui surpasse celle de l'ensemble des armées rassemblées sur la Terre, dit-il.

La foi sera mise à l’épreuve, dit-il.

Les fidèles seront récompensés, dit-il.

Et dit, et dit, et dit…

Ne vous méprenez pas, je suis croyant. J’ai été élevé dans la religion et je m’efforce d’y croire. Cependant, il m’est de plus en plus difficile d’être un adepte aveugle. Si nous craignons de poser des questions sur notre Dieu, n’est-ce pas là un aveu de doute ? Une reconnaissance du fait que notre foi – censée être notre rocher, notre bouclier – ne peut résister au moindre examen de conscience de notre part ?

Mon père ne veut pas entendre parler de mes questionnements, nos échanges dégénèrent systématiquement en cris et en larmes de colère. Il me répète à chaque fois de me rappeler que nous avons été bénis au-delà de toute mesure possible, en pointant l'un de ses doigts à quelques centimètres de mon visage.

Malgré tout, mes questions persistent. Dernièrement, elles se font de plus en plus nombreuses. Pardonnez-moi. Je ne veux pas critiquer mon père. Il est inébranlable dans ses convictions et cela peut être inspirant. Je pense au récent décès de ma mère. Un homme moins pieux aurait abandonné ses convictions.

Pas mon père.

Je dois aussi admettre que, pour ceux qui ne sont pas constamment soumis à ses discours, mon père est tout à fait charmant. Il ne donne pas l'impression d'être un fanatique aux yeux écarquillés. Il est patient, persuasif et possède un certain charisme. Plusieurs personnes de notre ville ont adhéré à sa façon de penser et parmi elles, certains de nos résidents les plus éminents – des élus, des chefs d'industrie ou des membres des forces de l'ordre. De bons amis à avoir.

Je vois beaucoup d'entre eux alors que mon père et moi entrons dans la clairière au milieu des bois qui se trouvent derrière notre maison. Certains détournent le regard, ce sont sûrement des nouveaux. D'autres nous font un signe amical de la main et un sourire chaleureux.

Mon père m'a parlé à nouveau des exigences demandées par notre foi et du réconfort qui nous attend après la fin de nos épreuves terrestres. Un réconfort qui n'est rien de moins que la vie éternelle au Paradis !

Tous ces discours sur la religion expliquent en grande partie pourquoi ma sœur est attachée sur l’autel au bout du chemin.

Ça ne rend pas plus facile ce qu’on m’a demandé de lui faire.

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