<La diffusion de ce
message sera forcément interrompue, je le sais. Je vais tenter tout de
même, Internet étant un média difficile à arrêter. J’ai décidé de
dévoiler au grand jour ce que le monde doit savoir, peut être depuis
longtemps. Je suis sûre que la science peut avancer avec ça, que ça
changera la vision qu’ont les hommes de leur environnement. J’en suis
persuadée.
Mon identité importe peu dans ce témoignage. Ce sont les faits qui sont primordiaux. Ma vie et mon histoire ne comptent pas. Dommage qu’il faille quelqu’un pour raconter, pour en parler, et démontrer. Dommage que ce soit moi.
Mais pour les autorités, les vies, le temps, et les passés ne comptent pas. Peu importe le nombre de vies qu’il faudra gâcher. Peu importe le nombre de familles à briser. Peu importe le temps qu’il faudra. Peu importe l’argent à dépenser. Leurs recherches aboutiront et elles préserveront leurs secrets. Elles le savent, c’est une loi, une règle universelle. Pour ces gens haut placés, c’est d’une logique indéniable. Les autorités n’ont pas de limites.
Mais moi, maintenant, je vais briser ces règles. Moi, je vais ouvrir ces secrets au monde, pour que les autres sachent.
Mais je ne suis qu’un pion. Elles l’ont compris. Et elles iront jusqu’au bout pour me faire taire. Pour empêcher ce message de franchir les barrières du silence. C’est ce message qu’elles doivent à tout prix arrêter. Moi, je ne compte pas.
Il faut que je m’exprime, car j’ai peu de temps. Avant qu’elles ne remarquent.>
<La seule affaire du genre dévoilée au grand public est la toute première de ce type et s’est déroulée en 1977.
Ce fut juste un signal de quelques secondes, mais cela avait suffisamment paniqué les foules.
72 secondes précisément mais des rumeurs, des hypothèses qui naissent encore 37 ans après.
Le 15 aout 1977, l’Observatoire de radioastronomie de l’université de l’état de l’Ohio au Etats-Unis détecte le signal « Wow! ».
Signal dont le code principal était « 6EQUJ5 ».
Signal venu de l’espace.
L’homme qui observe le phénomène est Jerry R. Ehman, travaillant alors avec The Big Ear, le radiotélescope qui capta le signal, sur le projet SETI. Serch for Extra-Terrestrial Intelligence.>
Je me suis dit, quand j’ai entendu parler de ce signal « Wow! » et du SETI, que quand on cherche, on trouve. J’étais jeune alors, mais je n’étais pas née en 1977.
Et encore aujourd’hui les rumeurs courent, il a raison. Depuis longtemps, bien avant ma naissance, des bruits passent, d’apparence plus ou moins réaliste et véridique. Les gens y croient, ou non, cela dépend de la qualité des thèses. J’ai 35 ans, et depuis que je suis journaliste, je vois mes collègues traiter des théories sur la zone 51 et le signal Wow!, parfois vieilles de plusieurs années déjà.
Je suis journaliste, comme je l’ai dit précédemment. J’ai eu quelques grands travaux, et j’ai dévoilé plusieurs affaires croustillantes au monde, m’attirant maintes fois les foudres des hautes sphères de notre société.
Je m’intéressais plus à des scandales politiques, là où on trouve les choses les plus choquantes, histoire de faire du chiffre. Je reniais les autres affaires, que je ne jugeais pas assez utiles. Pas assez « tape à l’œil ».
Mais là, j’ai trouvé un truc plus gros que tous les scandales que j’avais traités auparavant. Mais c’est différent…Ce n’est pas dans le contexte de mon travail que j’ai trouvé ça.
C’était dans une situation plus personnelle, disons.
Je suis « tombée » sur les rapports d’un chercheur du SETI. Enfin, les rapports…Des notes, des enregistrements, une lettre, et un message dont la diffusion n’a pas pu être effectuée… Et je sais pourquoi.
On ne peut pas dire non plus que je sois tombée dessus. Non, on me les a confiés, ces documents. J’explique.
Je connaissais le chercheur en question. C’était un ami proche. Je n’ai plus de nouvelles depuis que je l’ai vu pour la dernière fois. Veuf, sans enfants, c’était le genre de personne qui se tuait à son travail. Il ne vivait que pour ses recherches, et pour le SETI, persuadé que ça aboutirait. Il est sorti bouleversé de ses découvertes, bloqué dans un silence profond. Quelques semaines après, il m’a donné les documents et une lettre. Ainsi que le message qu’il avait voulu diffuser.
Je me rappelle de la dernière fois que je l’ai vu. Il avait vieilli de dix ans au moins. Ses cheveux étaient gris et pâles, deux longs cernes ornaient ses yeux… vides. Il avait le teint d’un mort, des rides profondes, presque des cicatrices. Il portait sur son visage l’empreinte de la mort elle-même.
Il m’avait donné rendez-vous dans un bar, à cinq heures du matin. Le bar en question était désert. Il est arrivé, portant un chapeau et un manteau immense, trempés par la pluie. Il a retiré son chapeau, et j’ai vu que ce n’était plus le même. Il ne m’a pas saluée. Il n’a rien dit, a jeté une chemise noire sur la table et est reparti dans la nuit.
Je suis restée assise, bouche bée, dans le bar. Je me suis finalement levée, j’ai ramassé la chemise, épaisse de plusieurs documents, puis j’ai quitté le bar, la tête vide de toute pensée.
Je ne comprenais pas.
Quand je suis repartie en voiture, j’ai compris l’importance de ce qu’il m’avait donné. J’ai compris que ça avait un lien avec son travail, que c’était pour ça qu’il avait tant changé. J’avais peur, je me rappelle bien.
Arrivée chez moi, j’ai ouvert la chemise. Ce que j’y ai découvert était tellement… inconcevable. J’ai cru à un canular, à une blague. Je n’avais jamais rien vu de la sorte. Une lettre tout d’abord. Rédigée à la main. Puis un message imprimé. Et pour finir une clé USB.
<Depuis ce phénomène, rien de semblable ne s’est produit. Enfin, c’est ce qu’ils nous ont dit de dire. Ils ont dissimulé la vérité aux yeux des gens. Par plusieurs moyens, certes, mais je parlerai d’une de ces mises en scène tout particulièrement. Ce canular est tellement énorme qu’on ne peut se permettre de l’oublier.
Le logiciel. SETI@home est un logiciel, qui permet à n’importe qui disposant d’une connexion Internet et d’un ordinateur de télécharger et d'analyser les données d’un radiotélescope. Officiellement, ce programme avait deux buts ; je passerai le premier, car c’est le deuxième qui est intéressant : Détecter un signal d’une intelligence extraterrestre, prouver que nous ne sommes pas seuls dans l’univers. Ce but a, évidemment, échoué. Aucun signal détecté, sur des millions d’ordinateurs connectés, pour des millions d’amateurs et de professionnels surveillant plusieurs radiotélescopes. On a eu un signal, et depuis, plus rien. Et ça ne parait étrange aux yeux de personne.
En vérité, des signaux, il y en a eu.
Beaucoup.
SETI@home n’est qu’une couverture, un mensonge. Les données sont fausses, toutes. Inventées de toutes pièces pour faire croire qu’on cherche encore, mais que personne ne trouve rien.
Tout est déjà programmé.
Mais ils ont trouvé. Des signaux, des tas de signaux. Depuis « Wow! », tous les radiotélescopes de la planète recevaient des signaux.
Avec les avancées technologiques depuis 1977, tout s’est bousculé. Les signaux devenaient de plus en plus précis, de plus en plus longs. Ce n’était plus un simple « 6EQUJ5 » mais des pages entières de code.
On ne comprenait pas… Toute la NASA, et les autres agences spatiales étaient en ébullition alors.
Il y a eu juste un élément qui a fait soudainement avancer les choses. Un élément qui n’aurait certainement pas, pardonnez-moi, inquiété, affolé les gens ainsi, dans des conditions normales. Mais dans ce cas-ci…
Une technicienne de surface s’est suicidée. On l’a retrouvée pendue dans les locaux. Dans sa poche, une lettre. Pour mes « recherches » j’en ai fait une copie.>
J’avais cette fameuse copie. L’écriture est pataude, l’encre a bavé, comme si le papier avait été mouillé. Les larmes de la technicienne, sans aucun doute. C’était très dur à lire. En fait, après une lecture attentive, je ne pouvais pas qualifier cela de lettre. Plutôt des phrases, sans queue ni tête… Comme des passages, des extraits.
« Ils disent de mourir. Ils veulent que l’on remarque. Ils hurlent qu’ils peuvent maintenant. Ils pouvaient voir, mais c’était tout. Ils étaient là, ils nous voyaient, mais nous non. Mais c’est fini, fini, fini, fini. Là, ils communiquent. Pas avec nous, mais bientôt les autres comprendront, ils disent ça sans cesse. Leurs voix résonnent, sans cesse, sans cesse. Je sais qu’ils sont là, là, partout, là où nous ne voyons pas. Moi je les reconnais, je les connais, eux. […] Ils se disent perdus, faits prisonniers dans l’immensité noire. Ils regrettent, ils regrettent, ils veulent quitter l’enfer. Ils ont peur. Leurs voix grondent, tremblent, gémissent, dans l’enfer. Là où ce n’est pas vivant. L’enfer, l’enfer, l’enfer. Ils appellent à l’aide. À l’aide. Dans ma tête, dans ma tête, dans ma tête. À l’aide.»
Les mots « à l’aide » sont la fin de la lettre. Les autres passages sont pour la plupart illisibles, ou pour le moins incompréhensibles. La lettre est longue, pourtant. Mais ces phrases se répètent en boucle, la femme dit toujours la même chose. Elle semble avoir voulu transmettre un message mais sans savoir comment le faire passer.
Je n’ai pas mis longtemps à réaliser que la personne ayant écrit ces lignes avait un problème psychologique. Une sorte de schizophrénie, quelque chose du genre. Je ne m’y connais pas en maladie mentale, mais je pensais à ça sur le coup.
La suite du message m’a démontré le contraire.
<J’étais sûr qu’une chose du genre allait se produire. Avec tous ces phénomènes étranges, les chercheurs étaient sous pression, ne comprenant pas forcément bien ce qui se passait, et devaient fournir des explications aux autorités, et autres hautes sphères de la société. Mais comme je viens de le dire, ç’aurait dû être un chercheur, un scientifique, qui aurait pu… passer à l’acte, craquer sous la pression…
Quand j’ai lu la lettre, je n’ai pas compris ce qui s’est passé dans la tête de cette femme. Je pensais qu’elle était folle, je pensais que c’était une dépressive…
Sauf que ça a continué. Une vague de folie a saisi les centres de recherche, les agences, les observatoires… Partout dans le pays. Les chercheurs semblaient déprimés, ils perdaient leurs cheveux, beaucoup disaient ne plus arriver à dormir.
Ils disaient que c’était dû au stress. Que ça les perturbait, mais dès qu’on aurait trouvé la solution, tout se calmerait.
Les chercheurs avaient tort. Tout a empiré. Les suicides ont suivi, c’était affreux. Les centres de recherche sont devenus des usines de la mort, les pertes s’enchaînaient, sans cesse.
Tous ces scientifiques, avant de se donner la mort, écrivaient, s’enregistraient. On les voyait se dégrader, mais on ne réagissait pas, tellement concentrés dans nos recherches. Ils avaient des cernes, les yeux rouges, le teint pâle et plus de cheveux, mais nous, on ne voyait pas. Ils se donnaient la mort, de manières toutes plus affreuses les unes que les autres, mais on ne pleurait pas. Chaque jour, on retrouvait un corps, voire deux. La corde au cou, une balle dans la tête, les membres brisés sur un parking…
Les blouses blanches devenues rouges.
Avec à chaque fois, des lettres. Des témoignages, tous semblables, tous sans aucun sens.
Les centres de recherche étaient énormes. Je connaissais les victimes, sans vraiment les connaitre. Bien sûr, il ne fallait pas avertir les familles des scientifiques, on en avait interdiction. On continuait à leur dire, aux familles, que leur proche était en plein travail, qu’il allait bien mais qu’il n’avait pas le temps. Elles ne s’inquiétaient pas, elles avaient l’habitude d’être sans nouvelles.
Jusqu’au jour où un de mes amis a commencé lui aussi à… déprimer. Là, par contre, je l’ai vu se dégrader, je l’ai vu changer. Je connaissais la suite, mais je ne voulais pas y penser. C’était un bon ami. Il était distant, il ne me parlait presque plus. Comme les autres, il était pâle, il avait commencé à boire. Je ne sais pas comment il se procurait de quoi boire, mais il passait la nuit dans son bureau, et je le retrouvais complètement minable au matin.
Un soir, il a voulu me parler. Il était ivre, je m’en souviens. Mais ses propos étaient étrangement clairs, et il parlait d’une manière fluide, sans hésitation. Il m’expliquait qu’il n’en pouvait plus, qu’il n’avait pas le temps. Il m’expliquait que sa fille lui parlait, lui parlait souvent. Sa fille est morte il y a plus de 6 ans, à l’âge de 2 ans. Je lui ai dit qu’il délirait, qu’il était fatigué, et ivre. Il m’a hurlé que j’avais tort, que je ne comprenais pas, qu’il devait la rejoindre, qu’elle était là-bas. Il fallait qu’il la rejoigne. Là-bas. Car c’est l’enfer, qu’elle est seule. Elle l’appelait, il l’entendait mal, mais elle était là.
C’est la dernière chose qu’il m’a dite. Puis il est parti.
Je suis resté dans son bureau, seul. Je l’ai entendu pleurer, un instant, puis il s’est éloigné. Ses pas ont raisonné une dernière fois.
J’ai repris mes esprits, je suis sorti du bureau, et j’ai couru dans le couloir. Je l’ai appelé, il faisait noir, je ne voyais rien. Non loin de moi, j’ai entendu une porte claquer puis se verrouiller. J’ai foncé dans la porte, je l’ai appelé. Derrière la porte, il a murmuré quelque chose, le nom de sa fille, je crois.
Puis, j’ai entendu un clic. Le clic d’une arme qu’on charge.
La détonation a résonné dans le couloir.>
Je suis restée là, bouche bée devant le message papier. Devant ce que mon ami avait dû endurer. J’ai mis plusieurs minutes à me replonger dans la lecture du message.
<Il s’était tué. Comme les autres. Mais là, ça m’avait atteint. Je comprenais la gravité de la situation. Avant ce n’était que de vagues connaissances. Comme si c’était irréel, une histoire, une rumeur qu’on raconte. Mais pas là. Je venais d’assister à un suicide.
Je réfléchissais longuement, après ça, délaissant mon travail et mes recherches.
Plus tard, quelques jours après cet acte, j’ai repris. Mais différemment. J’étais ailleurs, disons.
Les signaux continuaient à arriver, par centaines, chaque jour. Les suicides continuaient sans cesse. C’était la routine.
Des pages entières de codes, tous différents. Je me rendais alors compte que tous les chercheurs autour de moi paniquaient, mais j’étais là, complètement calme, blasé, presque mort. Je les voyais s’agiter, crier, partout. Moi j’étais là, je marchais, je regardais.
Un jour j’ai regardé les codes en détail. Une page imprimée que j’avais trouvée sur un bureau. Je n’avais rien à faire, je n’étais pas concentré.
C’était comme d’habitude. Des séries de codes incompréhensibles, sans aucun sens.
Mais quelque chose avait changé… Les codes n’étaient plus des chiffres, des lettres avec pour seules significations les fréquences… Non, c’était des mots, des phrases, qui m’apparaissaient soudain.
Je lisais.
Je ne comprenais pas. Je me suis dit que j’étais très fatigué, tout simplement. J’ai voulu aller me reposer, me détendre.
J’ai lâché la lettre, enfin, les codes, puis je suis parti. Dans un bureau. Il y avait une radio.
Une simple radio.
Je l’ai allumée, je voulais penser à autre chose. Je n'ai trouvé aucune fréquence. Un bruit blanc continu s’échappait de la radio.
Pourtant, je persistais. Jusqu’à trouver une fréquence. Une voix féminine parlait en boucle, d’une façon fluide, régulière, presque musicale.
Ça m’a paralysé. Je suis resté bloqué sur la voix. J’ai d’abord pensé à une émission radio, toute bête.
Mais les propos étaient autres.
La femme m’a dit qu’il y avait un MP3 à ma droite, sur le bureau. Elle m’a dit de le prendre, et d’enregistrer. Car les scientifiques ont besoin de preuves, aussi futiles soient-elles.>
J’ai cet enregistrement. Sur la clé USB. Il y a un fichier dessus. Je l’ouvre. Un enregistrement. Une voix de femme résonne dans mon appartement, ainsi que la respiration saccadée de mon ami.
«- Bonsoir. Tu me reconnais ? Non, probablement, tu as tout oublié, tu vis pour ton travail. C’est vrai, c’était une question inutile. Enfin passons. Je ne suis pas là pour t’en vouloir, après tout. J’ai plutôt besoin de toi.
-Qui…Qui êtes-vous ?
-Cela n’a pas d’importance. J’aimerais bien voir si tu me reconnais. (Rires légers) Je dois te parler d’une chose. Les fréquences. À présent, nous pouvons communiquer.
-Écoutez. On va arrêter là. Je sais que personne ne m’entend, que c’est un canular sur une radio quelconque. Je ne sais pas comment vous avez eu accès à ces informations, confidentielles, mais vous ne savez pas de quoi vous riez.
-Que personne ne t’entend ? Que personne ne te répond ? C’est toi qui ne sais pas. Tu ne sais rien, RIEN ! (grésillements)
-Arrêtez ça. Si c’est pour faire peur, ça ne sert à rien.
-Peur ? C’est moi qui ais peur. Tu ne comprends rien, absolument rien. C’est l’enfer là bas, L’ENFER !
-Effectivement je ne comprends pas. Qui êtes-vous ? De quoi parlez-vous ?
-De l’enfer. Là où on ne respire pas, là où on ne voit rien. Il y fait noir, il y fait froid. Nous ne sommes plus. Plus rien. Il n’y a rien, nous sommes nombreux, mais nous ne voyons rien. Nous ne nous croisons pas, jamais. Nous nous entendons, chacun. J’entends ces cris de détresse, ces gémissements, ces pleurs d’enfants, et ces appels d’adultes. J’entends tout, je hurle moi aussi, ils entendent, mais personne ne peut rien. Nous sommes nombreux, mais nous sommes seuls. (Sanglots) Tu n’imagines pas à quel point te parler me fait du bien.
-MAIS QUI ÊTES-VOUS BON DIEU ?!
-Dieu, j’y croyais, au début. Le paradis au ciel, l’enfer sous terre. Mais rien. Il n’y a pas de paradis. Rien. Vous croyiez connaître le ciel. Mais vous aviez tort. Tu te rappelles d’eux ?
-Qui, eux ?
-Eux. Ton ami qui t’a quitté l’autre soir. Tous tes collègues. Elle.
-Mes collègues sont morts. Mon ami aussi. Terminé. Il n’y a rien après. Ils sont morts.
-Non, non. Tu ne comprends rien.
-Si. J’ai compris. Va-t-en. Pars. (Pleurs)
-Non, il faut que j’explique. Les fréquences. C’est les fréquences. Les codes, les radios, les signaux. Depuis l’enfer, nous communiquons. Peu, mais sûrement. D’abord sur les radiotélescopes, et maintenant sur des radios bien moins puissantes. 15 aout 1977, c’est la date de notre réussite. La date de notre premier signal. Bien avant que j’arrive, certes mais j’ai vite trouvé comment faire. La puissance de l’esprit est impressionnante.
(Silence)
(Inspiration du chercheur)
-Tu ne peux pas parler ! C’est impossible !
-Si, ça l’est.
-Non. Tu es morte.
-Oui. As-tu compris ? As-tu compris qui je suis ?
-Je…Oui. Je comprends maintenant. Je comprends tout. L’Enfer…C’est l’Espace.
-Oui. Il aura fallu du temps aux hommes pour le comprendre. Mais c’est en train de se produire. Maintenant, rejoins-moi. Je t’en prie. S’il te plaît. C’est simple.»
Fin de l’enregistrement.
Il me reste un paragraphe à lire sur le message texte. C’est la toute fin.
<Je ne pense pas à ce qu’elle m’a dit. Cela ne me choque pas plus que ça en fin de compte. Je regrette juste une chose. Que je ne puisse pas en parler. Ils m’ont vu. Ils entendent tout. Ils ne veulent pas que les gens sachent.
Mais j’ai trouvé la solution. Quelqu’un le transmettra à ma place, ce message. Une source sûre, une amie journaliste. Quelqu’un que le monde croira, écoutera.
Dans le pire des cas ce message deviendra une simple légende urbaine, mais les gens sauront. Ou du moins, auront lu. Et en garderont un vague souvenir.
Mais écoutez-moi. Cette conversation a changé ma façon de voir les choses, ces phénomènes.
Vos proches sont là-bas, des personnes que vous aimez. Ils souffrent, vous n’imaginez pas à quel point. Mais vous pouvez les rejoindre.
Comme mon ami a rejoint sa fille.
Comme j’ai rejoint ma femme.
Rejoignez-moi.>
J’ai compris alors que, ce soir là, c’était la dernière fois que je le verrais. Qu’il ne reviendrait pas, jamais.
Ce message est un véritable appel au suicide. Je le réalise maintenant, je ne distingue plus le vrai du faux. Peut être que mon ami délirait simplement. Je ne sais pas. Mais je diffuserai ce message tout de même. Par respect. C’était sa dernière volonté. Je suis contre la diffusion, mais mon amitié me dit de le faire. Diffuser. Juste une chose. Réfléchissez sur ce que vous venez de lire. Réfléchissez avant de passer à l’acte.
Ne faites pas comme moi.
____________________________________________________________
Les suicides de Sacha R***** et Lloyd W****** resteront confidentiels.
Ce message est classé top secret. Toute tentative de diffusion pourrait aboutir à des poursuites en justice.
____________________________________________________________
Traduit de l’anglais par Mary T********
__________________________________________________________________________________
Posté par : Anonyme, le 04.05.2009 à 05.07.
Sujet : .
Mon identité importe peu dans ce témoignage. Ce sont les faits qui sont primordiaux. Ma vie et mon histoire ne comptent pas. Dommage qu’il faille quelqu’un pour raconter, pour en parler, et démontrer. Dommage que ce soit moi.
Mais pour les autorités, les vies, le temps, et les passés ne comptent pas. Peu importe le nombre de vies qu’il faudra gâcher. Peu importe le nombre de familles à briser. Peu importe le temps qu’il faudra. Peu importe l’argent à dépenser. Leurs recherches aboutiront et elles préserveront leurs secrets. Elles le savent, c’est une loi, une règle universelle. Pour ces gens haut placés, c’est d’une logique indéniable. Les autorités n’ont pas de limites.
Mais moi, maintenant, je vais briser ces règles. Moi, je vais ouvrir ces secrets au monde, pour que les autres sachent.
Mais je ne suis qu’un pion. Elles l’ont compris. Et elles iront jusqu’au bout pour me faire taire. Pour empêcher ce message de franchir les barrières du silence. C’est ce message qu’elles doivent à tout prix arrêter. Moi, je ne compte pas.
Il faut que je m’exprime, car j’ai peu de temps. Avant qu’elles ne remarquent.>
<La seule affaire du genre dévoilée au grand public est la toute première de ce type et s’est déroulée en 1977.
Ce fut juste un signal de quelques secondes, mais cela avait suffisamment paniqué les foules.
72 secondes précisément mais des rumeurs, des hypothèses qui naissent encore 37 ans après.
Le 15 aout 1977, l’Observatoire de radioastronomie de l’université de l’état de l’Ohio au Etats-Unis détecte le signal « Wow! ».
Signal dont le code principal était « 6EQUJ5 ».
Signal venu de l’espace.
L’homme qui observe le phénomène est Jerry R. Ehman, travaillant alors avec The Big Ear, le radiotélescope qui capta le signal, sur le projet SETI. Serch for Extra-Terrestrial Intelligence.>
Je me suis dit, quand j’ai entendu parler de ce signal « Wow! » et du SETI, que quand on cherche, on trouve. J’étais jeune alors, mais je n’étais pas née en 1977.
Et encore aujourd’hui les rumeurs courent, il a raison. Depuis longtemps, bien avant ma naissance, des bruits passent, d’apparence plus ou moins réaliste et véridique. Les gens y croient, ou non, cela dépend de la qualité des thèses. J’ai 35 ans, et depuis que je suis journaliste, je vois mes collègues traiter des théories sur la zone 51 et le signal Wow!, parfois vieilles de plusieurs années déjà.
Je suis journaliste, comme je l’ai dit précédemment. J’ai eu quelques grands travaux, et j’ai dévoilé plusieurs affaires croustillantes au monde, m’attirant maintes fois les foudres des hautes sphères de notre société.
Je m’intéressais plus à des scandales politiques, là où on trouve les choses les plus choquantes, histoire de faire du chiffre. Je reniais les autres affaires, que je ne jugeais pas assez utiles. Pas assez « tape à l’œil ».
Mais là, j’ai trouvé un truc plus gros que tous les scandales que j’avais traités auparavant. Mais c’est différent…Ce n’est pas dans le contexte de mon travail que j’ai trouvé ça.
C’était dans une situation plus personnelle, disons.
Je suis « tombée » sur les rapports d’un chercheur du SETI. Enfin, les rapports…Des notes, des enregistrements, une lettre, et un message dont la diffusion n’a pas pu être effectuée… Et je sais pourquoi.
On ne peut pas dire non plus que je sois tombée dessus. Non, on me les a confiés, ces documents. J’explique.
Je connaissais le chercheur en question. C’était un ami proche. Je n’ai plus de nouvelles depuis que je l’ai vu pour la dernière fois. Veuf, sans enfants, c’était le genre de personne qui se tuait à son travail. Il ne vivait que pour ses recherches, et pour le SETI, persuadé que ça aboutirait. Il est sorti bouleversé de ses découvertes, bloqué dans un silence profond. Quelques semaines après, il m’a donné les documents et une lettre. Ainsi que le message qu’il avait voulu diffuser.
Je me rappelle de la dernière fois que je l’ai vu. Il avait vieilli de dix ans au moins. Ses cheveux étaient gris et pâles, deux longs cernes ornaient ses yeux… vides. Il avait le teint d’un mort, des rides profondes, presque des cicatrices. Il portait sur son visage l’empreinte de la mort elle-même.
Il m’avait donné rendez-vous dans un bar, à cinq heures du matin. Le bar en question était désert. Il est arrivé, portant un chapeau et un manteau immense, trempés par la pluie. Il a retiré son chapeau, et j’ai vu que ce n’était plus le même. Il ne m’a pas saluée. Il n’a rien dit, a jeté une chemise noire sur la table et est reparti dans la nuit.
Je suis restée assise, bouche bée, dans le bar. Je me suis finalement levée, j’ai ramassé la chemise, épaisse de plusieurs documents, puis j’ai quitté le bar, la tête vide de toute pensée.
Je ne comprenais pas.
Quand je suis repartie en voiture, j’ai compris l’importance de ce qu’il m’avait donné. J’ai compris que ça avait un lien avec son travail, que c’était pour ça qu’il avait tant changé. J’avais peur, je me rappelle bien.
Arrivée chez moi, j’ai ouvert la chemise. Ce que j’y ai découvert était tellement… inconcevable. J’ai cru à un canular, à une blague. Je n’avais jamais rien vu de la sorte. Une lettre tout d’abord. Rédigée à la main. Puis un message imprimé. Et pour finir une clé USB.
<Depuis ce phénomène, rien de semblable ne s’est produit. Enfin, c’est ce qu’ils nous ont dit de dire. Ils ont dissimulé la vérité aux yeux des gens. Par plusieurs moyens, certes, mais je parlerai d’une de ces mises en scène tout particulièrement. Ce canular est tellement énorme qu’on ne peut se permettre de l’oublier.
Le logiciel. SETI@home est un logiciel, qui permet à n’importe qui disposant d’une connexion Internet et d’un ordinateur de télécharger et d'analyser les données d’un radiotélescope. Officiellement, ce programme avait deux buts ; je passerai le premier, car c’est le deuxième qui est intéressant : Détecter un signal d’une intelligence extraterrestre, prouver que nous ne sommes pas seuls dans l’univers. Ce but a, évidemment, échoué. Aucun signal détecté, sur des millions d’ordinateurs connectés, pour des millions d’amateurs et de professionnels surveillant plusieurs radiotélescopes. On a eu un signal, et depuis, plus rien. Et ça ne parait étrange aux yeux de personne.
En vérité, des signaux, il y en a eu.
Beaucoup.
SETI@home n’est qu’une couverture, un mensonge. Les données sont fausses, toutes. Inventées de toutes pièces pour faire croire qu’on cherche encore, mais que personne ne trouve rien.
Tout est déjà programmé.
Mais ils ont trouvé. Des signaux, des tas de signaux. Depuis « Wow! », tous les radiotélescopes de la planète recevaient des signaux.
Avec les avancées technologiques depuis 1977, tout s’est bousculé. Les signaux devenaient de plus en plus précis, de plus en plus longs. Ce n’était plus un simple « 6EQUJ5 » mais des pages entières de code.
On ne comprenait pas… Toute la NASA, et les autres agences spatiales étaient en ébullition alors.
Il y a eu juste un élément qui a fait soudainement avancer les choses. Un élément qui n’aurait certainement pas, pardonnez-moi, inquiété, affolé les gens ainsi, dans des conditions normales. Mais dans ce cas-ci…
Une technicienne de surface s’est suicidée. On l’a retrouvée pendue dans les locaux. Dans sa poche, une lettre. Pour mes « recherches » j’en ai fait une copie.>
J’avais cette fameuse copie. L’écriture est pataude, l’encre a bavé, comme si le papier avait été mouillé. Les larmes de la technicienne, sans aucun doute. C’était très dur à lire. En fait, après une lecture attentive, je ne pouvais pas qualifier cela de lettre. Plutôt des phrases, sans queue ni tête… Comme des passages, des extraits.
« Ils disent de mourir. Ils veulent que l’on remarque. Ils hurlent qu’ils peuvent maintenant. Ils pouvaient voir, mais c’était tout. Ils étaient là, ils nous voyaient, mais nous non. Mais c’est fini, fini, fini, fini. Là, ils communiquent. Pas avec nous, mais bientôt les autres comprendront, ils disent ça sans cesse. Leurs voix résonnent, sans cesse, sans cesse. Je sais qu’ils sont là, là, partout, là où nous ne voyons pas. Moi je les reconnais, je les connais, eux. […] Ils se disent perdus, faits prisonniers dans l’immensité noire. Ils regrettent, ils regrettent, ils veulent quitter l’enfer. Ils ont peur. Leurs voix grondent, tremblent, gémissent, dans l’enfer. Là où ce n’est pas vivant. L’enfer, l’enfer, l’enfer. Ils appellent à l’aide. À l’aide. Dans ma tête, dans ma tête, dans ma tête. À l’aide.»
Les mots « à l’aide » sont la fin de la lettre. Les autres passages sont pour la plupart illisibles, ou pour le moins incompréhensibles. La lettre est longue, pourtant. Mais ces phrases se répètent en boucle, la femme dit toujours la même chose. Elle semble avoir voulu transmettre un message mais sans savoir comment le faire passer.
Je n’ai pas mis longtemps à réaliser que la personne ayant écrit ces lignes avait un problème psychologique. Une sorte de schizophrénie, quelque chose du genre. Je ne m’y connais pas en maladie mentale, mais je pensais à ça sur le coup.
La suite du message m’a démontré le contraire.
<J’étais sûr qu’une chose du genre allait se produire. Avec tous ces phénomènes étranges, les chercheurs étaient sous pression, ne comprenant pas forcément bien ce qui se passait, et devaient fournir des explications aux autorités, et autres hautes sphères de la société. Mais comme je viens de le dire, ç’aurait dû être un chercheur, un scientifique, qui aurait pu… passer à l’acte, craquer sous la pression…
Quand j’ai lu la lettre, je n’ai pas compris ce qui s’est passé dans la tête de cette femme. Je pensais qu’elle était folle, je pensais que c’était une dépressive…
Sauf que ça a continué. Une vague de folie a saisi les centres de recherche, les agences, les observatoires… Partout dans le pays. Les chercheurs semblaient déprimés, ils perdaient leurs cheveux, beaucoup disaient ne plus arriver à dormir.
Ils disaient que c’était dû au stress. Que ça les perturbait, mais dès qu’on aurait trouvé la solution, tout se calmerait.
Les chercheurs avaient tort. Tout a empiré. Les suicides ont suivi, c’était affreux. Les centres de recherche sont devenus des usines de la mort, les pertes s’enchaînaient, sans cesse.
Tous ces scientifiques, avant de se donner la mort, écrivaient, s’enregistraient. On les voyait se dégrader, mais on ne réagissait pas, tellement concentrés dans nos recherches. Ils avaient des cernes, les yeux rouges, le teint pâle et plus de cheveux, mais nous, on ne voyait pas. Ils se donnaient la mort, de manières toutes plus affreuses les unes que les autres, mais on ne pleurait pas. Chaque jour, on retrouvait un corps, voire deux. La corde au cou, une balle dans la tête, les membres brisés sur un parking…
Les blouses blanches devenues rouges.
Avec à chaque fois, des lettres. Des témoignages, tous semblables, tous sans aucun sens.
Les centres de recherche étaient énormes. Je connaissais les victimes, sans vraiment les connaitre. Bien sûr, il ne fallait pas avertir les familles des scientifiques, on en avait interdiction. On continuait à leur dire, aux familles, que leur proche était en plein travail, qu’il allait bien mais qu’il n’avait pas le temps. Elles ne s’inquiétaient pas, elles avaient l’habitude d’être sans nouvelles.
Jusqu’au jour où un de mes amis a commencé lui aussi à… déprimer. Là, par contre, je l’ai vu se dégrader, je l’ai vu changer. Je connaissais la suite, mais je ne voulais pas y penser. C’était un bon ami. Il était distant, il ne me parlait presque plus. Comme les autres, il était pâle, il avait commencé à boire. Je ne sais pas comment il se procurait de quoi boire, mais il passait la nuit dans son bureau, et je le retrouvais complètement minable au matin.
Un soir, il a voulu me parler. Il était ivre, je m’en souviens. Mais ses propos étaient étrangement clairs, et il parlait d’une manière fluide, sans hésitation. Il m’expliquait qu’il n’en pouvait plus, qu’il n’avait pas le temps. Il m’expliquait que sa fille lui parlait, lui parlait souvent. Sa fille est morte il y a plus de 6 ans, à l’âge de 2 ans. Je lui ai dit qu’il délirait, qu’il était fatigué, et ivre. Il m’a hurlé que j’avais tort, que je ne comprenais pas, qu’il devait la rejoindre, qu’elle était là-bas. Il fallait qu’il la rejoigne. Là-bas. Car c’est l’enfer, qu’elle est seule. Elle l’appelait, il l’entendait mal, mais elle était là.
C’est la dernière chose qu’il m’a dite. Puis il est parti.
Je suis resté dans son bureau, seul. Je l’ai entendu pleurer, un instant, puis il s’est éloigné. Ses pas ont raisonné une dernière fois.
J’ai repris mes esprits, je suis sorti du bureau, et j’ai couru dans le couloir. Je l’ai appelé, il faisait noir, je ne voyais rien. Non loin de moi, j’ai entendu une porte claquer puis se verrouiller. J’ai foncé dans la porte, je l’ai appelé. Derrière la porte, il a murmuré quelque chose, le nom de sa fille, je crois.
Puis, j’ai entendu un clic. Le clic d’une arme qu’on charge.
La détonation a résonné dans le couloir.>
Je suis restée là, bouche bée devant le message papier. Devant ce que mon ami avait dû endurer. J’ai mis plusieurs minutes à me replonger dans la lecture du message.
<Il s’était tué. Comme les autres. Mais là, ça m’avait atteint. Je comprenais la gravité de la situation. Avant ce n’était que de vagues connaissances. Comme si c’était irréel, une histoire, une rumeur qu’on raconte. Mais pas là. Je venais d’assister à un suicide.
Je réfléchissais longuement, après ça, délaissant mon travail et mes recherches.
Plus tard, quelques jours après cet acte, j’ai repris. Mais différemment. J’étais ailleurs, disons.
Les signaux continuaient à arriver, par centaines, chaque jour. Les suicides continuaient sans cesse. C’était la routine.
Des pages entières de codes, tous différents. Je me rendais alors compte que tous les chercheurs autour de moi paniquaient, mais j’étais là, complètement calme, blasé, presque mort. Je les voyais s’agiter, crier, partout. Moi j’étais là, je marchais, je regardais.
Un jour j’ai regardé les codes en détail. Une page imprimée que j’avais trouvée sur un bureau. Je n’avais rien à faire, je n’étais pas concentré.
C’était comme d’habitude. Des séries de codes incompréhensibles, sans aucun sens.
Mais quelque chose avait changé… Les codes n’étaient plus des chiffres, des lettres avec pour seules significations les fréquences… Non, c’était des mots, des phrases, qui m’apparaissaient soudain.
Je lisais.
Je ne comprenais pas. Je me suis dit que j’étais très fatigué, tout simplement. J’ai voulu aller me reposer, me détendre.
J’ai lâché la lettre, enfin, les codes, puis je suis parti. Dans un bureau. Il y avait une radio.
Une simple radio.
Je l’ai allumée, je voulais penser à autre chose. Je n'ai trouvé aucune fréquence. Un bruit blanc continu s’échappait de la radio.
Pourtant, je persistais. Jusqu’à trouver une fréquence. Une voix féminine parlait en boucle, d’une façon fluide, régulière, presque musicale.
Ça m’a paralysé. Je suis resté bloqué sur la voix. J’ai d’abord pensé à une émission radio, toute bête.
Mais les propos étaient autres.
La femme m’a dit qu’il y avait un MP3 à ma droite, sur le bureau. Elle m’a dit de le prendre, et d’enregistrer. Car les scientifiques ont besoin de preuves, aussi futiles soient-elles.>
J’ai cet enregistrement. Sur la clé USB. Il y a un fichier dessus. Je l’ouvre. Un enregistrement. Une voix de femme résonne dans mon appartement, ainsi que la respiration saccadée de mon ami.
«- Bonsoir. Tu me reconnais ? Non, probablement, tu as tout oublié, tu vis pour ton travail. C’est vrai, c’était une question inutile. Enfin passons. Je ne suis pas là pour t’en vouloir, après tout. J’ai plutôt besoin de toi.
-Qui…Qui êtes-vous ?
-Cela n’a pas d’importance. J’aimerais bien voir si tu me reconnais. (Rires légers) Je dois te parler d’une chose. Les fréquences. À présent, nous pouvons communiquer.
-Écoutez. On va arrêter là. Je sais que personne ne m’entend, que c’est un canular sur une radio quelconque. Je ne sais pas comment vous avez eu accès à ces informations, confidentielles, mais vous ne savez pas de quoi vous riez.
-Que personne ne t’entend ? Que personne ne te répond ? C’est toi qui ne sais pas. Tu ne sais rien, RIEN ! (grésillements)
-Arrêtez ça. Si c’est pour faire peur, ça ne sert à rien.
-Peur ? C’est moi qui ais peur. Tu ne comprends rien, absolument rien. C’est l’enfer là bas, L’ENFER !
-Effectivement je ne comprends pas. Qui êtes-vous ? De quoi parlez-vous ?
-De l’enfer. Là où on ne respire pas, là où on ne voit rien. Il y fait noir, il y fait froid. Nous ne sommes plus. Plus rien. Il n’y a rien, nous sommes nombreux, mais nous ne voyons rien. Nous ne nous croisons pas, jamais. Nous nous entendons, chacun. J’entends ces cris de détresse, ces gémissements, ces pleurs d’enfants, et ces appels d’adultes. J’entends tout, je hurle moi aussi, ils entendent, mais personne ne peut rien. Nous sommes nombreux, mais nous sommes seuls. (Sanglots) Tu n’imagines pas à quel point te parler me fait du bien.
-MAIS QUI ÊTES-VOUS BON DIEU ?!
-Dieu, j’y croyais, au début. Le paradis au ciel, l’enfer sous terre. Mais rien. Il n’y a pas de paradis. Rien. Vous croyiez connaître le ciel. Mais vous aviez tort. Tu te rappelles d’eux ?
-Qui, eux ?
-Eux. Ton ami qui t’a quitté l’autre soir. Tous tes collègues. Elle.
-Mes collègues sont morts. Mon ami aussi. Terminé. Il n’y a rien après. Ils sont morts.
-Non, non. Tu ne comprends rien.
-Si. J’ai compris. Va-t-en. Pars. (Pleurs)
-Non, il faut que j’explique. Les fréquences. C’est les fréquences. Les codes, les radios, les signaux. Depuis l’enfer, nous communiquons. Peu, mais sûrement. D’abord sur les radiotélescopes, et maintenant sur des radios bien moins puissantes. 15 aout 1977, c’est la date de notre réussite. La date de notre premier signal. Bien avant que j’arrive, certes mais j’ai vite trouvé comment faire. La puissance de l’esprit est impressionnante.
(Silence)
(Inspiration du chercheur)
-Tu ne peux pas parler ! C’est impossible !
-Si, ça l’est.
-Non. Tu es morte.
-Oui. As-tu compris ? As-tu compris qui je suis ?
-Je…Oui. Je comprends maintenant. Je comprends tout. L’Enfer…C’est l’Espace.
-Oui. Il aura fallu du temps aux hommes pour le comprendre. Mais c’est en train de se produire. Maintenant, rejoins-moi. Je t’en prie. S’il te plaît. C’est simple.»
Fin de l’enregistrement.
Il me reste un paragraphe à lire sur le message texte. C’est la toute fin.
<Je ne pense pas à ce qu’elle m’a dit. Cela ne me choque pas plus que ça en fin de compte. Je regrette juste une chose. Que je ne puisse pas en parler. Ils m’ont vu. Ils entendent tout. Ils ne veulent pas que les gens sachent.
Mais j’ai trouvé la solution. Quelqu’un le transmettra à ma place, ce message. Une source sûre, une amie journaliste. Quelqu’un que le monde croira, écoutera.
Dans le pire des cas ce message deviendra une simple légende urbaine, mais les gens sauront. Ou du moins, auront lu. Et en garderont un vague souvenir.
Mais écoutez-moi. Cette conversation a changé ma façon de voir les choses, ces phénomènes.
Vos proches sont là-bas, des personnes que vous aimez. Ils souffrent, vous n’imaginez pas à quel point. Mais vous pouvez les rejoindre.
Comme mon ami a rejoint sa fille.
Comme j’ai rejoint ma femme.
Rejoignez-moi.>
J’ai compris alors que, ce soir là, c’était la dernière fois que je le verrais. Qu’il ne reviendrait pas, jamais.
Ce message est un véritable appel au suicide. Je le réalise maintenant, je ne distingue plus le vrai du faux. Peut être que mon ami délirait simplement. Je ne sais pas. Mais je diffuserai ce message tout de même. Par respect. C’était sa dernière volonté. Je suis contre la diffusion, mais mon amitié me dit de le faire. Diffuser. Juste une chose. Réfléchissez sur ce que vous venez de lire. Réfléchissez avant de passer à l’acte.
Ne faites pas comme moi.
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Les suicides de Sacha R***** et Lloyd W****** resteront confidentiels.
Ce message est classé top secret. Toute tentative de diffusion pourrait aboutir à des poursuites en justice.
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Traduit de l’anglais par Mary T********
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Posté par : Anonyme, le 04.05.2009 à 05.07.
Sujet : .
Gagnante du concours Laïka organisé par Nigiel sur le forum officiel du site. Comme vous vous en doutez le thème était l'espace... Un thème très rarement exploité et qui ne souffre pas trop des clichés, pitié ne vous pressez pas pour les créer!
Edit: le texte est de la très discrète Leaf, n'oublions pas les crédits quand il s'agit de concours.
J'aime beaucoup :3
RépondreSupprimerExcellente pasta sur un thème qu'on ne rencontre pas souvent en effet. La rédac' est très bonne, fluide ce qui fait qu'on n'a pas envie d'en rater une miette! Bref si tout ça est bien réel , ça serait vraiment énorme... malgré le nombre de vies gaspillées :'(
RépondreSupprimerJ'ai adoré! cette creepypasta est juste géniale! Surtout que l'hypothèse de l'enfer dans l'espace n'est pas mal du tout! Bravo a l'auteur! :D mais je n'ai pas de tendance suicidaire pour l'instant ^^ en même temps qui irait mourir pour des poissons rouges? XD
RépondreSupprimerCela ma bien aidée dans mais recherche , la théorie de l'enfer dans l'espace .
RépondreSupprimerroooh non, j'ai pas envie de croiser ma belle-mère aprés ma mort moi...
RépondreSupprimerPuis notons que l'enfer c'est un terme plutot religieux qui implique l'existence de ou des dieu(x)...Mais bon je trouve pas quel mot pourrais le remplacer sans sens religieux donc je vais juste dire que c'est une trés bonne fic qui justifie son contexte et la mort des personnages comme le font trop peu de creepypastas...
Ben, dans cette c'est plutôt l'enfer comme dans la mythologie grecque. C'est un endroit où vont les morts et puis c'est tout.
SupprimerLe thème, au delà de l'espace, c'est plutôt l'enfer.
RépondreSupprimerAthée jusqu'au dents, ça me gâche pas mal de pastas.
mais sinon c'est très bien rédigé, et on en très envie de connaître la chute, bien que celle-ci ne soit pas à la hauteur de mes attentes.
J'ai envie de dire que c'est une des meilleures pastas que j'ai lu.
RépondreSupprimerParfaites..
RépondreSupprimerC'est génial, mais trop long. Heureusement que c'est bien traduit et que c'est cohérent car sinon, on aurait arrêté de lire la pasta vers le milieu.
RépondreSupprimerÇa me fait penser à la série Extant... ne me demandez pas pourquoi, y'a juste une question de proches et d'espace :')
RépondreSupprimerBref, très bonne pasta qui sort de l'ordinaire et nous fait réfléchir !
Exellente pasta!!!!
RépondreSupprimerEn effet un thème très original et peu exploité dans les pastas!!!
Tres bon univers si j'ose dire,très dense et bien raconté même si pour ma part je met un petit bémol à la clarté du texte: par moments j'ai eu du mal à d"terminer qui avait repris la parole!
Mais à part ça je remercie Leaf pour ce très bon moment!!
Trop long et assez ennuyant; je n'au pas tout lu.
RépondreSupprimerC'est dommage ; je me suis laissée prendre dans le récit donc je ne l'ai pas trouvé long
SupprimerPas mal du tout. Ca me fait un peu penser au film Event Horizon inspiré d'Hellraiser je crois. Mais cette creepypasta reste assez originale je dirais.
RépondreSupprimerSuper !
RépondreSupprimerSinistre et flippant... Moi qui adore l'espace et l'astronomie...
RépondreSupprimerVachement bien... la théorie semble un peu impossible mais si tout n'est qu'un mensonge, ça passe très bien. Et le thème, super.
RépondreSupprimerSinon je veux pas chipoter mais "deux longs cernes" ce serait pas plutôt "deux longues cernes"? J'en sais rien hein, je veux juste savoir ^^
Bref GG à l'auteur de cette pasta!
moissi j'peux parler
RépondreSupprimerWoaw sa serait plosible
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