Anthologie horrifique d'outre-mer : Les monticules de sable

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Malgré le nombre incalculable de légendes urbaines qui existent, celles venant de certains coins du monde sont méconnues à tel point qu'on pourrait penser qu'elles n'existent tout simplement pas. Les légendes urbaines d'outre-mer font, malheureusement, partie de cette catégorie. 

Des Antilles à l'île de la Réunion en passant bien entendu par la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane… chacun de ces endroits possède une culture riche en histoires de monstres, fantômes et autres entités surnaturelles issues des folklores locaux. Ces histoires terrifient autant qu'elles peuvent fasciner. C'est de ces légendes urbaines aussi intéressantes qu'injustement oubliées du grand public que je souhaite vous parler. 

Saviez-vous par exemple que durant des années, les habitants de l'île Bourbon avaient peur d'un taureau sauvage qui avait la réputation de répandre le malheur sur son passage et d'être immortel ? Ou qu'en Guyane les gens pensent que si l'on siffle dans la forêt, on peut potentiellement réveiller une entité démoniaque endormie ? 

Mais aujourd'hui, c'est une toute autre histoire que je vais partager avec vous… 

Il y a de cela plusieurs années, un jeune homme a décidé de profiter de ses vacances d'été pour passer un séjour en Guyane à Remire-Montjoly, juste à côté de Cayenne. Sa famille avait vécu là-bas avant de déménager en métropole alors qu'il n'était encore qu'un tout jeune enfant. Si ses parents avaient réussi à garder de bonnes relations avec certains de leurs amis guyanais, ils n'étaient plus jamais retournés là-bas après leur déménagement, et lui n'avait aucun souvenir de son enfance en outre-mer. 

Comme il s'agissait des toutes premières vacances qu'il allait passer seul et qu'il n'avait pas choisi l'endroit le plus proche du domicile de ses parents, ces derniers avaient exigé que quelqu'un de confiance veille sur lui au cours de sa petite escapade, et donc qu'il habite chez un de leur vieux amis tout au long de son séjour. 

C'est ainsi qu'il s'est retrouvé à vivre chez un ancien conducteur d'engins agricoles d'origine guyanaise qui connaissait déjà ses parents avant même qu'il vienne au monde, mais dont il n'avait pas plus de souvenirs que du paysage guyanais. 

Malgré la chaleur étouffante à cause de l'humidité, il trouvait l'endroit incroyable et savourait chaque seconde de ses vacances. Son hôte était quant à lui un homme facile à vivre et extrêmement sympathique qui le traitait comme un membre de sa propre famille. Il passait de très bons moments là-bas et appelait régulièrement ses parents pour leur dire à quel point il était heureux d'y passer ses vacances. 

Il restait néanmoins troublé par certaines choses qu'il n'arrivait pas à comprendre, que ce soit dans la manière d'être des gens ou dans les traditions qui pouvaient, pour la plupart, lui paraître étranges. Comme par exemple cette drôle d'habitude qu'avaient son hôte et plusieurs de ses voisins, qui consistait à laisser près de la porte de leurs habitations des petits monticules de sable qu'ils prenaient le temps d'inspecter minutieusement chaque soir avant la nuit tombée. 

Et chaque soir avant la nuit tombée, après être allé scrupuleusement regarder ses monticules de sable, son hôte lui demandait d'éviter d'aller se promener autour des maisons jusqu'au lendemain matin. 

Il avait beau questionner ses parents sur le ton de la rigolade pour en savoir plus sur l'utilité de ces monticules de sable, aucun d'eux n'était au courant de cette tradition. Il faut dire qu'à l'époque, ils ne vivaient pas vraiment en pleine campagne, contrairement à la majorité de leurs amis. Alors trois jours avant son vol de retour, notre indiscret petit vacancier avait pris la décision d'essayer de tirer les vers du nez de son hôte au sujet des monticules de sable qui avaient l'air si importants pour lui et ses voisins. 

Ce dernier avait prit alors une mine sérieuse et un ton grave avant de lui dire que c'était nécessaire, qu'il n'avait pas à poser des questions sur ce qu'il ne pourrait pas comprendre et qu'il devait simplement lui obéir. 

Le jeune s'était mis à réfléchir à ce sujet et il avait fini par en arriver à la conclusion que les monticules de sable étaient peut-être des cachettes pour camoufler des biens de valeur, des bijoux ou de l'argent lorsqu'un touriste étaitdans le coin. Peut-être que le vieillard agissait de manière énigmatique volontairement pour troubler son petit visiteur ? Ça aurait également expliqué l'importance du fait de minutieusement inspecter les monticules chaque soir, simplement pour vérifier que tout était toujours à sa place. 

La veille de son départ, notre vacancier trop curieux avait donc cédé à la tentation une bonne fois pour toutes et décidé d'attendre que son hôte dorme à poing fermé pour sortir et inspecter lui-même les monticules de sable. 

Qu'y avait-t-il de mal à ça ? Il n'avait pas l'intention de voler quoi que ce soit à qui que ce soit, il voulait simplement éprouver une hypothèse avant de rentrer au bercail. 

Alors cette nuit-là, pendant que son hôte ronflait à en faire s'envoler le toit, l'invité curieux s'était glissé en dehors de sa chambre et s'était rendu jusqu'à l'extérieur de la maison pour observer le monticule de sable qui se trouvait à tout juste deux petits mètres de la porte d'entrée. Ça aurait dû être rapide, il avait uniquement l'intention de fouiller un petit peu et de remettre tout en place comme si de rien n'était une fois qu'il aurait trouvé quelque chose. 

Mais il n'y avait rien, rien d'autre que ce simple et inutile petit monticule de sable qui avait pourtant l'air si précieux. 

C'est là que notre jeune homme indiscret auvait entendu un bruit étrange, comme la voix lointaine de quelqu'un en train de compter. Alors, toujours aussi curieux, il s'était avancé en direction de cette voix. Lui-même ne savait pas ce qu'il espérait trouver en s'y dirigeant. Au mieux un vieillard en train de compter quelque chose dans son jardin, au pire un tueur en série sanguinaire digne d'un mauvais slasher. 

Une fois arrivé devant une habitation voisine, la seule chose qu'il avait pu distinguer dans la nuit noire était une grande silhouette penchée en train de bouger de droite à gauche. Son premier réflexe fût de dégainer son téléphone pour l'éclairer, en espérant voir un peu mieux ce que cette hypothétique personne était en train de faire. Son deuxième réflexe,de fuir le plus vite possible pour s'enfermer à double tour dans la maison de son hôte, en espérant qu'il n'aurait pas été réveillé par le bruit et prêt à lui passer une soufflante pour être sorti. 

Mais vous devez bien vous demander ce qu'il a vu ? 

Après avoir allumé la lampe torche de son téléphone, il s'était retrouvé nez à nez avec un immense corps nu, sans tête ni bras. Il était assis par terre et était en train de compter méticuleusement les grains de sable d'un monticule situé juste devant une porte d'entrée en utilisant de longues griffes qui dépassaient de ses orteils. Chaque mouvement était accompagné d'une voix semblant sortie de nulle part qui comptait les grains de sable. 

Autant vous dire qu'une fois rentré chez lui, il n'a plus jamais mis les pieds en Guyane. 

Il a bien essayé de raconter ce qu'il avait vu à des amis, mais ceux qui ne se sont pas moqués de lui ont simplement pensé qu'il voulait les faire marcher. D'autres ont décidé de raconter son histoire pour s'amuser, alors les gens qui l'ont entendue l'ont raconté à leur tour et ainsi de suite jusqu'à ce qu'elle revienne aux oreilles de votre humble serviteur. Alors à mon tour, j'ai décidé de vous la raconter. N'est-ce pas comme ça que les légendes urbaines sont censées se propager ? 

Pour ceux qui se posent la question, la créature que notre champion de la curiosité a vu ce soir-là était un Zumbi. Un immense monstre un peu imposant et effrayant mais totalement inoffensif d'après les légendes. On raconte qu'il s'agirait d'un mort ramené à la vie par un Quimboiseur (une sorte de sorcier) et condamné à errer pour toujours dans le monde des vivants sous cette forme repoussante. 

Si on ne le bloque pas, il s'incruste dans les maisons la nuit et erre de pièce en pièce. Si vous avez bien suivi vous l'aurez déjà deviné, mais le seul moyen de le bloquer est d'ajouter un monticule de sable plus ou moins gros devant la porte d'entrée de votre habitation, car si le Zumbi voit du sable sur son chemin il n'avance plus jusqu'à ce qu'il ait terminé de compter chaque grain. Et si au levé du jour il n'a pas terminé de compter les grains de sable, il s'en va tout simplement. 

Bien sûr, rien ne dit qu'ils existent réellement et que l'histoire du vacancier indiscret est véridique, mais j'ai bien envie de croire qu'il existe en ce monde une quantité inimaginable de choses qu'on ne peut pas expliquer. 

J'espère que cette histoire vous a plu et que vous allez rester à l'écoute, car il m'en reste un nombre incalculable à vous raconter. Je n'ai plus qu'à vous dire à une prochaine fois, très chers lecteurs… 

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