Si la plupart des collégiens et des lycéens
attendent avec impatience le jour où ils quitteront leur école pour
intégrer une université, nous autres enfants de Plainfield comptions
constamment le nombre de jours avant que le Ciné-Mobile de Mescalune ne
revienne en ville. On ne voyait aucun prospectus à ce sujet, et
certainement pas punaisé sur des tableaux d’affichage publiques à la
bibliothèque ou à la mairie. Aucune date particulière sur les prochaines
séances n’était annoncée à la fin de la dernière projection. Le cinéma
mobile n’avait pas non plus d’horaire précis sur lequel régler notre
horloge interne. Nous apprenions toujours son retour grâce aux rumeurs.
Il s’agissait toujours d’une personne qui avait entendu parler d’une
séance à deux villes de la nôtre, signifiant que notre tour viendrait le
soir même ; ou bien quelqu’un avait entendu, d’une source sûre, de
l’ami d’un ami, que Plainfield serait la prochaine ville sur le circuit,
faisant du week-end qui suivrait celui que tout le monde attendait.
Et assez souvent, une de ces rumeurs était vraie. Nous nous amassions alors dans les champs aux abords de la ville, et là se trouvait M. Mescalune en personne, habillé de son chapeau en lambeaux et son smoking disparate. Il se tenait devant sa caravane aménagée qui abritait le cinéma le plus rare du monde.
Nous entrions par l’arrière de la caravane – si nous faisions partie des rares chanceux admis. À l’intérieur, la caravane disposait de plusieurs rangées de chaises pliantes en métal soudées au sol, avec une allée étroite qui s’étirait au milieu. Les sièges faisaient face à un mur austère et blanc, sur lequel un projecteur, attaché au plafond, diffusait le film que M. Mescalune avait à nous montrer.
Ils valaient toujours la peine d’être vus. Chacun d’entre eux. Parce que nous ne pouvions pas en voir de semblables ailleurs. Peut-être que nous ne pouvions pas vraiment juger objectivement puisque la ville de Plainfield ne possédait pas de cinéma. Ni de piste de roller. Ni de salle d'arcade, ou n’importe quel autre complexe où les enfants se rendent pour se divertir. Nos parents n’étaient pas vraiment fans de ce genre de choses. Malgré tout, bien après que certains d’entre nous ont quitté Plainfield pour des contrées plus vertes, et ont vu le genre de films que tout le monde apprécie, nous devions admettre que rien n’était plus excitant que les films de M. Mescalune.
Nous ne savions jamais vraiment à quoi nous attendre. Certaines fois, ses films ne faisaient que dix minutes de long ; d’autres pouvaient durer jusque trois heures. Nous ne pouvions jamais reconnaître les acteurs et actrices qui apparaissaient à l’écran – en partie parce que nous n’avions jamais eu l’occasion d’entendre parler d’une célébrité et de voir grandir un amour pour elle par des magazines people ou des journaux à scandales, du fait que tout ce qui n’était pas un cahier de cours nous était confisqué à l’école. Cependant, la principale raison était que M. Mescalune n’employait pas d’acteurs professionnels dans ses films. Peut-être qu’il les choisissait pour leur allure, ou pour le son de leur voix ; peut-être que ses castings n’avaient tout simplement pas de logique. Ça n’avait pas d’importance. Les acteurs montraient toujours de réelles émotions dans ses films, peu importe si leur rôle était important ou non. Vous pouviez dire qu’ils donnaient tout ce qu’ils avaient. Vous n’auriez pas été blâmés pour avoir pensé qu’ils ne jouaient pas « pour de faux ».
Vous pouviez être sûrs d’une chose quand vous vous asseyiez pour regarder un des films de M. Mescalune : un personnage allait mourir.
Leur mort n’était pas toujours glorieuse. Bien sûr, il y avait les morts sanglantes : la machette dans le crâne, les mille coupures stratégiques à la lame de rasoir, le coup de feu à courte distance.
Elles pouvaient aussi se faire proprement – ligoté par un personnage masqué par exemple, ou gisant de côté sur une chaise après avoir bu un verre de quelque chose de toxique. Peu importe la méthode, peu importe la créativité dont elle pouvait faire preuve, la mort du film était plus réaliste que vous n’auriez pu l’imaginer. Tout comme l’interprétation qui la précédait – les larmes, les supplications, les cris.
C’était, pour nous, la vertu principale des films de M. Mescalune. Leur étonnant réalisme.
Après avoir subi la fadeur des romans faussement intègres et des émissions télévisées que nos parents nous forçaient à regarder, nous pensions regarder le monde comme il devait être vu pour la première fois de notre vie. C’était comme être mis au monde, ou renaître. Nous étions tous reconnaissants à M. Mescalune pour ça. On acclamait la fin de chaque film d’une standing ovation, et M. Mescalune, toujours modeste, enlevait son chapeau crasseux pour effectuer une révérence.
Nous n’avons jamais parlé de M. Mescalune à nos parents. Pas seulement parce que cela aurait trahi le fait que nous nous échappions de nos chambres en pleine nuit, et que nous violions le couvre-feu imposé. Mais nous nous attendions à ce qu’ils s’exclament qu’il était le Diable en personne, comme ils l’avaient fait pour nos jeux de cartes à collectionner et nos anthologies fantastiques, et qu’ils nous interdisent de retourner voir le ciné-mobile.
M. Mescalune ne nous demandait jamais d’argent pour aller voir ses projections. Tout ce qu’il demandait était que nous prenions part à sa loterie. À chaque enfant qui était admis à une séance, il donnait un billet de tombola sur lequel un numéro avait été écrit à la main. Quand le film était fini et que nos applaudissements résonnaient encore, il fouillait son chapeau et triturait dans l’amas de papier jusqu’à ce que sa main gantée émerge en tenant un des tickets. Il lisait le numéro tiré de sa voix calme et reposante, et vérifiait si un de nos billets correspondait au numéro gagnant. Si personne ne gagnait, il souriait simplement et serrait la main à tous ceux qui restaient pour le remercier du spectacle, puis nous laissait dans les champs au clair de lune où la foule des non-admis nous questionnait anxieusement au sujet de ce que nous avions vu.
Plusieurs années durant, personne n’était capable de dire ce qu'il se passait si l’un d’entre nous tenait un ticket gagnant.
Puis, est venue la nuit où Chris P- a gagné le tirage au sort.
M. Mescalune a fouillé dans son chapeau comme à son habitude. Nous n’y prêtions pas vraiment attention, accoutumés comme nous l’étions aux minces chances de posséder le ticket gagnant. Quand il a annoncé le numéro gagnant, la moitié du public n'a même pas pris la peine de jeter un coup d’œil à son ticket. Calme comme jamais, M. Mescalune a répété le numéro. C’est à ce moment que Chris, assis à la première rangée, a levé sa main. C’était comme si un éclair nous avait frappés et fait fusionner avec nos sièges. C’était encore plus incroyable que le film que nous étions venus voir ! Nous avons commencé à applaudir, et Chris s'est levé et nous a fait un signe poli de la tête pendant que M. Mescalune s’approchait de lui pour le féliciter. Chacun d’entre nous était pressé de savoir ce que serait la récompense de Chris, mais M. Mescalune nous a raccompagnés jusque dehors, gardant avec lui Chris. Certains d’entre nous ont attendu à l’extérieur de la caravane pendant un long moment, mais personne n’en émergeait.
Compte tenu de l’heure tardive, nous devions rejoindre nos maisons, de crainte que nos familles se réveillent et découvrent que nous n’étions pas là où nous aurions dû être.
L’absence de Chris à l’école le jour suivant n'a surpris personne. Qui n’aurait pas pris un jour de repos après être resté dehors si tard ? Son absence le jour suivant nous a laissés perplexes. Après une semaine complète sans nouvelle, nous étions sincèrement curieux. Nous n’osions cependant pas en parler aux adultes. Que serait-il arrivé au cinéma mobile s’ils en avaient entendu parler ? De plus, que serait-il advenu de nous ?
Nous n’avons plus jamais aperçu Chris jusqu’au retour du Ciné-mobile de Mescalune dans les faubourgs de la ville. Ceux d’entre nous qui avaient réussi à obtenir un ticket attendaient anxieusement que le projecteur se mette en marche et nous montre ce que nous voulions voir. Et quand il s’est enfin animé, son faisceau éclairant de la poussière qui tourbillonnait, celui que nous contemplions n’était autre que Chris P- à l’écran, devant nous, assis torse-nu contre un mur en béton. Nous avons éclaté dans un tonnerre d’applaudissements. Notre ami avait l’air plus vivant qu’il ne l’avait jamais été dans les rues de Plainfield.
Il s'est tourné vers la caméra et l'a fixée du regard, comme s’il regardait dans les yeux de chacun des spectateurs. Il savait qui nous étions après tout – il savait que nous serions là à le regarder et à profiter du spectacle. Il a ouvert et refermé la bouche plusieurs fois, timidement, comme s’il avait un monologue à réciter, mais qu’il ne pouvait se souvenir d’aucune de ses lignes.
Après quelques essais, il a fermé ses mâchoires et a fixé un point derrière la caméra.
À présent, c’était comme s’il regardait à travers nous. Comme si nous étions transparents. Ou comme si nous étions des fantômes. Comme quelque chose qui n’existait plus, car nous n’étions pas assez réels pour mériter une quelconque attention.
Une ombre est apparue sur le plan, grimpant sur le visage de Chris. Au début, il demeurait sans expression – résigné ou stoïque, ou refusant simplement de jouer la comédie. Puis, un grondement distant s'est fait entendre dans les haut-parleurs. Il s'est mû rapidement en un puissant vrombissement – celui d’une tronçonneuse. Des larmes ont commencé à couler des yeux de Chris, comme si elles avaient une vie dont il ne faisait pas partie. Une minute plus tard, tout son corps s'est mis à trembler et il a convulsé en sanglots.
Un personnage, tout habillé de noir et dont le visage était caché par un masque de ski, est entré en scène. Une tronçonneuse se tenait dans ses mains gantées. Chris a regardé le nouveau venu et a murmuré quelque chose d’imperceptible, couvert par le gémissement de la tronçonneuse. Les mots n’étaient de toute façon pas importants. Il aurait pu réciter une liste de courses que cela aurait semblé tout a fait sensé. Il nous tenait captivés.
Le mystérieux personnage a élevé la tronçonneuse au-dessus de la tête de Chris. Notre ami a fermé les yeux, tremblant. La lame est descendue vers sa nuque. Le personnage a feinté une fois, deux fois. Puis, en un puissant mouvement vers le bas, la lame a entamé l’échine de Chris. Il jappait, mais le son a été interrompu par la lame qui avait fait son travail. Sa tête s’est affalée en avant, puis est tombée au sol. Le personnage l'a poussée hors du champ de la caméra puis a quitté l’écran.
Pendant une minute et demie, la caméra s’est attardée sur le corps décapité. La flaque de sang grandissante était le seul signe de mouvement. Puis, il y a eu un écran noir.
Nous pouvions sentir l’incompréhension qui planait entre nous. Ce que nous avions vu n’était pas un film ordinaire. Une scène si réaliste ne pouvait avoir été jouée. Et lentement, il nous est venu à l’esprit que les débuts de Chris à l’écran n’étaient pas l’exception, mais la règle. Chaque film que nous avions vu au Ciné-Mobile de Mescalune relatait les derniers instants de la vie de quelqu’un. Et nous avons compris le prix que nous avions payé pour être venus les voir.
Nous avons mis quelques secondes à chercher la manière de réagir la plus appropriée. Quelqu’un a commencé à applaudir de manière hésitante, et peu après, tout le public s'est joint à lui. Certains ont sifflé, d’autres ont acclamé gaiement. Nous étions tous sur nos pieds dans la minute qui a suivi.
M. Mescalune se tenait devant l’écran, saluant le public et prenant son chapeau pour procéder au tirage au sort rituel.
Aucun d’entre nous n'a été désigné cette nuit-là. Nous nous sommes éparpillés dans les champs, dans la foule, et avons relayé ce que nous avions appris. Nous avons laissé les nouvelles se disperser entre nous comme le brouillard. Nous n’en avons pas discuté, parce qu’il n’y avait rien à dire. Chacun y réfléchissait personnellement et silencieusement.
Nous nous sommes dispersés, toutes les étoiles dans le ciel brillaient intensément tandis que nous marchions vers nos maisons.
Depuis Chris P- , et même au bout de toutes ces années, personne n’a plus jamais tiré le numéro gagnant.
Mais cette nuit pourrait toujours arriver.
Car, même si nous connaissons le grand secret du Ciné-Mobile de Mescalune, nous n’avons jamais manqué une seule séance. Et la foule qui s’amasse dans les champs de la ville pour tenter de voir un de ses films est toujours plus grande à chaque fois qu’il nous rend visite.
Et assez souvent, une de ces rumeurs était vraie. Nous nous amassions alors dans les champs aux abords de la ville, et là se trouvait M. Mescalune en personne, habillé de son chapeau en lambeaux et son smoking disparate. Il se tenait devant sa caravane aménagée qui abritait le cinéma le plus rare du monde.
Nous entrions par l’arrière de la caravane – si nous faisions partie des rares chanceux admis. À l’intérieur, la caravane disposait de plusieurs rangées de chaises pliantes en métal soudées au sol, avec une allée étroite qui s’étirait au milieu. Les sièges faisaient face à un mur austère et blanc, sur lequel un projecteur, attaché au plafond, diffusait le film que M. Mescalune avait à nous montrer.
Ils valaient toujours la peine d’être vus. Chacun d’entre eux. Parce que nous ne pouvions pas en voir de semblables ailleurs. Peut-être que nous ne pouvions pas vraiment juger objectivement puisque la ville de Plainfield ne possédait pas de cinéma. Ni de piste de roller. Ni de salle d'arcade, ou n’importe quel autre complexe où les enfants se rendent pour se divertir. Nos parents n’étaient pas vraiment fans de ce genre de choses. Malgré tout, bien après que certains d’entre nous ont quitté Plainfield pour des contrées plus vertes, et ont vu le genre de films que tout le monde apprécie, nous devions admettre que rien n’était plus excitant que les films de M. Mescalune.
Nous ne savions jamais vraiment à quoi nous attendre. Certaines fois, ses films ne faisaient que dix minutes de long ; d’autres pouvaient durer jusque trois heures. Nous ne pouvions jamais reconnaître les acteurs et actrices qui apparaissaient à l’écran – en partie parce que nous n’avions jamais eu l’occasion d’entendre parler d’une célébrité et de voir grandir un amour pour elle par des magazines people ou des journaux à scandales, du fait que tout ce qui n’était pas un cahier de cours nous était confisqué à l’école. Cependant, la principale raison était que M. Mescalune n’employait pas d’acteurs professionnels dans ses films. Peut-être qu’il les choisissait pour leur allure, ou pour le son de leur voix ; peut-être que ses castings n’avaient tout simplement pas de logique. Ça n’avait pas d’importance. Les acteurs montraient toujours de réelles émotions dans ses films, peu importe si leur rôle était important ou non. Vous pouviez dire qu’ils donnaient tout ce qu’ils avaient. Vous n’auriez pas été blâmés pour avoir pensé qu’ils ne jouaient pas « pour de faux ».
Vous pouviez être sûrs d’une chose quand vous vous asseyiez pour regarder un des films de M. Mescalune : un personnage allait mourir.
Leur mort n’était pas toujours glorieuse. Bien sûr, il y avait les morts sanglantes : la machette dans le crâne, les mille coupures stratégiques à la lame de rasoir, le coup de feu à courte distance.
Elles pouvaient aussi se faire proprement – ligoté par un personnage masqué par exemple, ou gisant de côté sur une chaise après avoir bu un verre de quelque chose de toxique. Peu importe la méthode, peu importe la créativité dont elle pouvait faire preuve, la mort du film était plus réaliste que vous n’auriez pu l’imaginer. Tout comme l’interprétation qui la précédait – les larmes, les supplications, les cris.
C’était, pour nous, la vertu principale des films de M. Mescalune. Leur étonnant réalisme.
Après avoir subi la fadeur des romans faussement intègres et des émissions télévisées que nos parents nous forçaient à regarder, nous pensions regarder le monde comme il devait être vu pour la première fois de notre vie. C’était comme être mis au monde, ou renaître. Nous étions tous reconnaissants à M. Mescalune pour ça. On acclamait la fin de chaque film d’une standing ovation, et M. Mescalune, toujours modeste, enlevait son chapeau crasseux pour effectuer une révérence.
Nous n’avons jamais parlé de M. Mescalune à nos parents. Pas seulement parce que cela aurait trahi le fait que nous nous échappions de nos chambres en pleine nuit, et que nous violions le couvre-feu imposé. Mais nous nous attendions à ce qu’ils s’exclament qu’il était le Diable en personne, comme ils l’avaient fait pour nos jeux de cartes à collectionner et nos anthologies fantastiques, et qu’ils nous interdisent de retourner voir le ciné-mobile.
M. Mescalune ne nous demandait jamais d’argent pour aller voir ses projections. Tout ce qu’il demandait était que nous prenions part à sa loterie. À chaque enfant qui était admis à une séance, il donnait un billet de tombola sur lequel un numéro avait été écrit à la main. Quand le film était fini et que nos applaudissements résonnaient encore, il fouillait son chapeau et triturait dans l’amas de papier jusqu’à ce que sa main gantée émerge en tenant un des tickets. Il lisait le numéro tiré de sa voix calme et reposante, et vérifiait si un de nos billets correspondait au numéro gagnant. Si personne ne gagnait, il souriait simplement et serrait la main à tous ceux qui restaient pour le remercier du spectacle, puis nous laissait dans les champs au clair de lune où la foule des non-admis nous questionnait anxieusement au sujet de ce que nous avions vu.
Plusieurs années durant, personne n’était capable de dire ce qu'il se passait si l’un d’entre nous tenait un ticket gagnant.
Puis, est venue la nuit où Chris P- a gagné le tirage au sort.
M. Mescalune a fouillé dans son chapeau comme à son habitude. Nous n’y prêtions pas vraiment attention, accoutumés comme nous l’étions aux minces chances de posséder le ticket gagnant. Quand il a annoncé le numéro gagnant, la moitié du public n'a même pas pris la peine de jeter un coup d’œil à son ticket. Calme comme jamais, M. Mescalune a répété le numéro. C’est à ce moment que Chris, assis à la première rangée, a levé sa main. C’était comme si un éclair nous avait frappés et fait fusionner avec nos sièges. C’était encore plus incroyable que le film que nous étions venus voir ! Nous avons commencé à applaudir, et Chris s'est levé et nous a fait un signe poli de la tête pendant que M. Mescalune s’approchait de lui pour le féliciter. Chacun d’entre nous était pressé de savoir ce que serait la récompense de Chris, mais M. Mescalune nous a raccompagnés jusque dehors, gardant avec lui Chris. Certains d’entre nous ont attendu à l’extérieur de la caravane pendant un long moment, mais personne n’en émergeait.
Compte tenu de l’heure tardive, nous devions rejoindre nos maisons, de crainte que nos familles se réveillent et découvrent que nous n’étions pas là où nous aurions dû être.
L’absence de Chris à l’école le jour suivant n'a surpris personne. Qui n’aurait pas pris un jour de repos après être resté dehors si tard ? Son absence le jour suivant nous a laissés perplexes. Après une semaine complète sans nouvelle, nous étions sincèrement curieux. Nous n’osions cependant pas en parler aux adultes. Que serait-il arrivé au cinéma mobile s’ils en avaient entendu parler ? De plus, que serait-il advenu de nous ?
Nous n’avons plus jamais aperçu Chris jusqu’au retour du Ciné-mobile de Mescalune dans les faubourgs de la ville. Ceux d’entre nous qui avaient réussi à obtenir un ticket attendaient anxieusement que le projecteur se mette en marche et nous montre ce que nous voulions voir. Et quand il s’est enfin animé, son faisceau éclairant de la poussière qui tourbillonnait, celui que nous contemplions n’était autre que Chris P- à l’écran, devant nous, assis torse-nu contre un mur en béton. Nous avons éclaté dans un tonnerre d’applaudissements. Notre ami avait l’air plus vivant qu’il ne l’avait jamais été dans les rues de Plainfield.
Il s'est tourné vers la caméra et l'a fixée du regard, comme s’il regardait dans les yeux de chacun des spectateurs. Il savait qui nous étions après tout – il savait que nous serions là à le regarder et à profiter du spectacle. Il a ouvert et refermé la bouche plusieurs fois, timidement, comme s’il avait un monologue à réciter, mais qu’il ne pouvait se souvenir d’aucune de ses lignes.
Après quelques essais, il a fermé ses mâchoires et a fixé un point derrière la caméra.
À présent, c’était comme s’il regardait à travers nous. Comme si nous étions transparents. Ou comme si nous étions des fantômes. Comme quelque chose qui n’existait plus, car nous n’étions pas assez réels pour mériter une quelconque attention.
Une ombre est apparue sur le plan, grimpant sur le visage de Chris. Au début, il demeurait sans expression – résigné ou stoïque, ou refusant simplement de jouer la comédie. Puis, un grondement distant s'est fait entendre dans les haut-parleurs. Il s'est mû rapidement en un puissant vrombissement – celui d’une tronçonneuse. Des larmes ont commencé à couler des yeux de Chris, comme si elles avaient une vie dont il ne faisait pas partie. Une minute plus tard, tout son corps s'est mis à trembler et il a convulsé en sanglots.
Un personnage, tout habillé de noir et dont le visage était caché par un masque de ski, est entré en scène. Une tronçonneuse se tenait dans ses mains gantées. Chris a regardé le nouveau venu et a murmuré quelque chose d’imperceptible, couvert par le gémissement de la tronçonneuse. Les mots n’étaient de toute façon pas importants. Il aurait pu réciter une liste de courses que cela aurait semblé tout a fait sensé. Il nous tenait captivés.
Le mystérieux personnage a élevé la tronçonneuse au-dessus de la tête de Chris. Notre ami a fermé les yeux, tremblant. La lame est descendue vers sa nuque. Le personnage a feinté une fois, deux fois. Puis, en un puissant mouvement vers le bas, la lame a entamé l’échine de Chris. Il jappait, mais le son a été interrompu par la lame qui avait fait son travail. Sa tête s’est affalée en avant, puis est tombée au sol. Le personnage l'a poussée hors du champ de la caméra puis a quitté l’écran.
Pendant une minute et demie, la caméra s’est attardée sur le corps décapité. La flaque de sang grandissante était le seul signe de mouvement. Puis, il y a eu un écran noir.
Nous pouvions sentir l’incompréhension qui planait entre nous. Ce que nous avions vu n’était pas un film ordinaire. Une scène si réaliste ne pouvait avoir été jouée. Et lentement, il nous est venu à l’esprit que les débuts de Chris à l’écran n’étaient pas l’exception, mais la règle. Chaque film que nous avions vu au Ciné-Mobile de Mescalune relatait les derniers instants de la vie de quelqu’un. Et nous avons compris le prix que nous avions payé pour être venus les voir.
Nous avons mis quelques secondes à chercher la manière de réagir la plus appropriée. Quelqu’un a commencé à applaudir de manière hésitante, et peu après, tout le public s'est joint à lui. Certains ont sifflé, d’autres ont acclamé gaiement. Nous étions tous sur nos pieds dans la minute qui a suivi.
M. Mescalune se tenait devant l’écran, saluant le public et prenant son chapeau pour procéder au tirage au sort rituel.
Aucun d’entre nous n'a été désigné cette nuit-là. Nous nous sommes éparpillés dans les champs, dans la foule, et avons relayé ce que nous avions appris. Nous avons laissé les nouvelles se disperser entre nous comme le brouillard. Nous n’en avons pas discuté, parce qu’il n’y avait rien à dire. Chacun y réfléchissait personnellement et silencieusement.
Nous nous sommes dispersés, toutes les étoiles dans le ciel brillaient intensément tandis que nous marchions vers nos maisons.
Depuis Chris P- , et même au bout de toutes ces années, personne n’a plus jamais tiré le numéro gagnant.
Mais cette nuit pourrait toujours arriver.
Car, même si nous connaissons le grand secret du Ciné-Mobile de Mescalune, nous n’avons jamais manqué une seule séance. Et la foule qui s’amasse dans les champs de la ville pour tenter de voir un de ses films est toujours plus grande à chaque fois qu’il nous rend visite.
Traduction : Ruthveun
Texte original ici.
Je comprends pas. Ils savent que il y a une chance que quelqu'un se fasse tirer au sort à chaque séance, ils savent que ce qu'ils regardent sont des vraies scènes de meurtres, mais ils continuent de venir. Logique.
RépondreSupprimerIls continuent de venir parce qu’ils sont fascinés par le spectacle. L'auteur insiste beaucoup la dessus...
SupprimerLa chute grosse comme une maison dès qu'il parle de mort réaliste.
RépondreSupprimerIl n'y a pas de chute.
SupprimerÀ part celle de la tête de Chris...
Supprimeron devrait ajouter un bouton like dans les commentaires, t'en aurais une centaines pour celle la lol
SupprimerTu m'as tuée Jimmy Perus XDDD
SupprimerScandinav
Merci merci 8D
SupprimerC'est vrai qu'on connaît déjà la fin à partir du moment où il dit que les acteurs jouent de façon réaliste et qu'une loterie est le seul prix à payer... dommage car dans l'ensemble le récit est bien construit!
SupprimerC'est vrai qu'on connaît déjà la fin à partir du moment où il dit que les acteurs jouent de façon réaliste et qu'une loterie est le seul prix à payer... dommage car dans l'ensemble le récit est bien construit!
SupprimerAlors,oui,c'est bien ce que je me disais : En tirant le ticket gagnant,la personne ayant remporté ce ticket est destinée à mourir.
RépondreSupprimerCar en fait,les spectateurs trouvent ça réaliste car ça l'est: Ils en finissent avec la vie de la personne illico devant la caméra.
De plus,les spectateurs sont tellement fascinés (c'est des oufs moi je vous dis)par ce "spectacle" qu'ils ne s'en rendent pas vraiment compte.
Arrivé au tour de ce pauvre Chris de tirer le ticket gagnant,ses amis se rendent compte de ce qu'il se passe vraiment mais ne préviennent personne(normal...ou pas).
M'enfin sinon,cette une bonne pasta, très gore sinon XD
Scandinav
Fin,gore mais dans le sens du meurtre mais sinon...
SupprimerBref j'espère que vous m'avez comprise XD
Scandinav
J'adore cette creepypasta,mais je pense que c'est M.Mescalune qui a tué Chris et toute les autres personnes qui sont apparu dans son cinéma.
RépondreSupprimerAh oui, c'est bien aussi comme théorie
SupprimerPS : ça se voit que j'ai rien à dire dans mon message à part "bonne théorie" mdrrrr
Scandinav
Waouh ! Quelle perspicacité!!
SupprimerT'as vu x)
SupprimerScandinav(encore)
Ah euh pardon on va dire que j'ai rien dit,j'ai fait l'égoïste,j'ai cru que c'était sur mes coms XD
SupprimerScandinav(qui commence à saouler là à se la ramener mdrrr)
En tous cas ils ont un mental d'acier pour venir à chaque séance en sachant cela. En vrai tu craques
SupprimerMais trop! Soit tu flippes, soit c'est les pulsations meurtrières qui se réveillent. Cool XDD
SupprimerScandinav
Perso, j'ai adoré cette creepypasta. Sur elle est prévisible, mais le faites que des gens continue de regarder les films tout en sachant que omd c pa du fo san bah sa fait réfléchir. Puis le coup des ticket pour moi sa veux dire "Tu t'éclate a regarder ton pôte crever mais tu peux être le prochain" y'a pt'être une morale cachée, ou j'me fait des idées, sans doute. Puis c'est moi ou les habitants du village sont tous dans un trip témoins-de-Jéhovah-les-cartes-pokémon-c'est-satan?
RépondreSupprimerC'est dommage, ça devient prévisible mais avouez au début on y voit que du feu... Bref sinon très bonne pasta !
RépondreSupprimerSa fait des année que pleins d'enfant sorte le soir des fois 3 heure et les Parent y s'en rendent pas compte x)
RépondreSupprimerMdrrr oui mais si t'es en immeuble ce sera plus compliqué xp
Supprimer(fin bon perso j'espère pas le faire plus tard mdrrr)
Ps : J'ai 13 ans osef mais je tiens a le préciser XD
Scandinav
Mince alors, on ne s'en était pas du tout rendu compte !
SupprimerMdrrrr oui
SupprimerScandinav
Cette pasta est vraiment géniale! Certes, dès le début on comprend que ce cinéma n'est pas comme les autres mais je ne m'attendais pas à cette fin si malsaine où les gens continuent à venir voir le spectacle. Apres tout c'est un bon reflet de notre société on ou paye et regarde le désastre sans rien faire..
RépondreSupprimerCela va même un peut plus loins, le spectateur va jusqu'à prendre le risque de devenir l'un de ces macabres acteurs dont ils connaissent très bien le destin, dans le but de pouvoir se délecter de cette vision. Comme tu l'a si bien dit, un excellent reflet du contexte dans lequel on se trouve !
SupprimerTÉLÉRÉALITÉ
SupprimerCe commentaire a été supprimé par l'auteur.
SupprimerCe commentaire a été supprimé par l'auteur.
SupprimerMon Dieu comment j'ai trop aimé la Pasta ! ** Elle est vraiment super, j'étais à fond dedans :D
RépondreSupprimerBravo à l'auteur ! ^-^
C'est très bien écrit et original! dommage que ça soit extrêmement prévisible ^^
RépondreSupprimerExcellente pasta.
RépondreSupprimerOn ne peut pas lui reprocher d'être prévisible, car il n'y a rien à prévoir ! Il faut juste apprécier la psychologie des personnages
Ha enfin une façon hyper cool de parler de snuff, bravo a l'auteur franchement c'est très inventif et intéressant je veux dire même le village des personnages donne un côté creepy a l'histoire Bref tout est bien rien a dire!
RépondreSupprimerC'est assez joliment écris ! Digne de figurer dans un recueil de nouvelles horrifiques, car même si le style n'a rien d'exceptionnel, il tient la route, et il y a même des pointes de lyrisme, légères, mais qui font mouche pour apporter un peu de consistance à l'ambiance déjà bien établie. C'est une des forces principales de la pasta d'ailleurs : elle dégage une ambiance, et elle est très visuelle. C'est un peu onirique, ça baigne dans la grisaille et dans le sépia... Et il y a toujours une sorte d'étrange détachement, comme si on flottait un peu ; sûrement dû aux réactions du narrateur et des gens qui l'entourent.
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup aussi, l'idée de parler de tous ces gens qui vont assister à un spectacle atroce pour se sentir vivants, et la manière dont elle exploitée. Il n'y a pas de surenchère pour parler de la perversité de ces gens, du plaisir qu'ils retirent à voir des personnes mourir et de ce genre de choses : on comprend tout ça, le sous-texte sur le plaisir délictueux qu’éprouvent les spectateurs à voir de véritables meurtres, à être privilégiés du fait de pouvoir y assister dans cette petite caravane feutrée... Bref, on saisit bien que la pasta met mal à l'aise et a de l'impact parce-que le narrateur et les autres spectateurs sont aussi dérangeants que Mr.Mescalune, qu'ils sont eux même un élément creepy en fait. Et ça passe sans être trop appuyé, sans être explicité à grands renforts de complaintes sur la noirceur de la nature humaine.
Je trouve ça super cool :D.
Hey bien, pour un commentaire constructif, c'est un commentaire constructif =)
SupprimerÇa change !
grave!!
Supprimerle frérot l'a grave kiffée cette pasta!
:D
Cool. Il y a plein de question à se poser, c'est bien.
RépondreSupprimerSympa au début, mais devient vite prévisible...
RépondreSupprimerEncore une fois, le but ici n'est pas de surprendre...
SupprimerCerte mais ça manque un peut ces derniers temps.
SupprimerLe début est bien mais si il avait continué avec du suspens et non en déballant tout depuis le milieu, ça aurait pu être pas mal et en plus il y aurait pu avoir une .PS= excuser moi pour la conjugaison, je ne suis pas français
Supprimer"une chute" 5eme ligne
SupprimerArrêtez d'attendre toujours la même chose de ce que vous lisez (BOUHOUHOU Y A PAS DE CHUTE C PRÉVISILBE), appréciez les choses pour ce qu'elles sont et pas pour ce que vous voudriez qu'elles soient.
SupprimerJ'ai eu tellement de pitié pour Chris quand j'ai lu : "tout son corps s'est mis à trembler et il a convulsé en sanglots. "
RépondreSupprimerExcellent pasta bien que trèèèèèèèèèès prévisible.
Bon, j'aime bien mais dès le quatrième paragraphe c'était méga prévisible, et la fin m'a laissé sur ma faim. Y avait mieux. Mais c'est bien écrit et l'idée est bonne.
RépondreSupprimerMr. Mescalune = psychopathe pédéraste producteur et réalisateur de sniff movie. Spectateurs = enfants teubé
RépondreSupprimerpédéraste?
SupprimerPédéraste est l'équivalent de pédophile, son raccourci est plus connu : l'insulte "pédé" vient de pédéraste, et oui, à chaque fois que vous traitez quelqu'un de pd, vous le traitez de violeur d'enfant.
SupprimerTrès bonne pasta! J'étais à fond dedans du début à la fin. Et, pour moi, la chute n'est pas le fait que les films soit de réels meurtres mais plutôt le fait que malgré ce qui est arrivé à Chris, les enfants continuent d'affluer pour voir ces films dérangeants. Personnellement je ne m'attendais pas à ce qu'ils continuent de venir les regarder sachant qu'ils prennent un risque d'avoir le ticket gagnant...
RépondreSupprimerSympathique, j'ai bien aimé cette pasta.
RépondreSupprimerJe me suis douté qu'il s'agissait de snuffs mais je pense que la véritable chute est le fait que les personnages reviennent voir les films, bien qu'ils soient conscients du risque qu'ils courent avec le tirage au sort.
Au final une pasta plutôt réaliste qui démontre bien jusqu'où peut aller le voyeurisme et la curiosité malsaine face à l'horreur.
Mescalune donne peut-être aux enfants de la mescaline...
RépondreSupprimerGG!
Supprimerj'ai ris je l'avoue! ^^
Personnellement,je trouves qu'il n'y a absolument rien d'étrange à avoir une fascination pour ce genre de film...C'est la réalité....une chance délicieuse d'admirer quelqu'un souffrir....J'ai adorée,vraiment bravo !
RépondreSupprimersuper pasta! :D et, au fait! n'oubliez pas que les éviers volants parlent le Flamant!
RépondreSupprimerMescalune... Mescaline? Comme la drogue hallucinogène? Peut être un pseudonyme de ce projectionniste, porteur de signification cachée. En effet, le public se retrouve dans les champs comme des ravers après une grosse défonce. Il peut aussi s'agir d'une fausse piste laissée par l'auteur pour dissimuler l'évidence que ce Chris est bel et bien mort.
RépondreSupprimerL'idée de départ est novatrice; la gradation dans l'angoisse est bien emmenée tout au long du récit. Ceci nous pousse au même genre de curiosité morbide qui incite le narrateur et ses camarades à devenir spectateurs de ces séances. La mise en abîme est une addition appréciable. Je trouve l'histoire trop courte: j'en aurais bien lu une nouvelle qui puisse mieux nous communiquer la monotonie ressentie à Plainfield par ses jeunes habitants. Ainsi qu'un jeu de fausse pistes plus complexe qui brouillerait la comprehension. En tout cas, le texte tel quel à un immense potentiel. Bravo à l'auteur!
Cette creepy fait limite peur.
RépondreSupprimerEn dehors de ce ciné-mobile, le village a l'air détaché du reste du monde. Pas de lieu pour se divertir... A croire que c'est une secte.
Bon apres elle est previsible mais c'est gore , ils savent que les ens sont des vraies personnes qui meurent et ils s'en fouttent ils sont du genre "ah mais les films sont trop bons pour que on arrete de les ecouter " je trouve sa un peu chelou , j'ai fait sa une fois sortir en douce de chez moi pour aller voir des potes et je me suis fait prendre XD alors j'imagine que ils sont doués XD bref ne faites pas sa . Et ça reste une bonne creepypasta!
RépondreSupprimerPour résumer, c'est simple, M.Mescalune est un tueur en série utilisant la naïveté des enfants pour les faire participer à ses pulsions meurtrières à travers des films amateurs mais réels... Vraiment dommage que la fin est deviné dès l'introduction des morts "plus vrais que nature"
RépondreSupprimerElle est bonne, j'aime le fait qu'il y ait un ciné-mobile! :) Mais si j'y aurait été voir des films où les gens meurent réellement, je n'y serais pas retournée! Mais bon, ces des enfants dans l'histoire...
RépondreSupprimerJ'ai trouvé bien mais le problème c'est que "la chute" vu que c'est pas vraiment une chute mais vous voyez ce que je veux dire, est trop facile à deviner (de mon point de vue)
RépondreSupprimerGore cette pasta bien écrite
RépondreSupprimerPrévisible dès le début que les films sont des snuff movies
RépondreSupprimer