Première partie : Le train
Si vous êtes bon en histoire de la langue française, vous devriez connaître Pierre Corneille, un des plus grands auteurs français du XVIIe siècle, une fierté pour le pays gorgé de culture qu'est censé être la France. Corneille est né à Rouen, et c'est justement dans cette ville que l'anecdote que je vais vous raconter s'est déroulée.
En tant que fan de hockey et haut-normand de surcroît, il est fréquent que j'aille à Rouen pour admirer les Dragons en match. Rouen est un très bon club au niveau national, c'est pourquoi je prends du plaisir à aller les voir. Je crois que tous ceux qui sont originaires de Chamonix seront d'accord avec moi pour dire que le hockey est un très beau sport.
Au Havre aussi, on a un club de hockey, mais il joue en D3, ce qui équivaut à la quatrième ligue. Au football, cela équivaut à la CFA. Pour faire court, c'est un niveau relativement bas. Le hockey est un des rares sports où j'avoue la domination des rouennais sur les havrais.
Mais revenons à nos montons. Ou devrais-je dire...à nos Dragons. Ce jour-là, j'étais avec un pote, Kevin, que je connais depuis le collège. C'est notre passion pour le hockey qui nous a fait rencontrer. Pour aller voir le match, nous avions pris le train. Kevin avait bien sa Renault pour nous conduire à la patinoire, mais il tenait à son essence. Kevin est un bon normand bien de chez nous, pour ce qui est de la radinerie.
Il faisait un peu sombre ce soir-là, mais c'était normal, nous étions en Janvier. Le 18 Janvier, d'après les billets que j'ai gardés. Le ciel, légèrement couvert, accentuait la noirceur du ciel.
Dans le train qui nous menait à Rouen, il y avait des voyageurs qui parlaient à voix basse, des endroits où la peinture s'écaillait, des sièges usés et le bruit de l'engin qui avançait au milieu de la circulation dense de certaines agglomérations, et ça faisait sa petite ambiance. Moi et Kevin étions assis sur le coté gauche ( si on regarde de derrière ) du train. A un moment, Kevin a eu envie de pisser. Il est parti derrière, pour trouver des toilettes adéquates, qu'il a, heureusement pour lui, trouvé. Un peu plus tard, il est revenu. Vessie vide, mais tout pâle. Il s'est assis lourdement sur le siège, et a soupiré. Sa respiration était « tremblotante ». Ses mains aussi.
- Oh Kev', t'es tout blanc !
- Dans les chiottes...putain...j'ai trop flippé ! Tu te souviens quand on avait vu Le Cid au lycée ? Bah je crois que j'l'ai vu dans les chiottes ! 'fin...j'ai vu la fantôme de Corneille ! Tu sais, j'ai pissé, puis je me suis lavé les mains, et dans le miroir y'avait sa gueule, je me suis retourné mais y'avait rien !
- T'as fumé le bédo Kevin. Pierre Corneille en plus, il est mort à Paris, pas ici. Son fantôme peut pas être ici.
- Mais j'te jure !
On n'a pas cherché à aller plus loin, de toute façon la fatigue faisait aussi son effet sur notre mental. On est allé voir le match comme prévu. Rouen affrontait Épinal, et on a gagné 17 - 4. On était fier de notre grosse victoire, les Dragons avait sorti un gros match. Bref, après un petit passage au bar, on était tous d'accord pour dire que la soirée était réussie.
Mais quand on a voulu reprendre le train, Kevin a refusé catégoriquement. Il flippait encore. Je lui ai dit que c'était une illusion, qu'il était un peu parano, mais lui il m'a dit d'aller voir dans les toilettes au fond si je ne le croyait pas. Kevin, c'est un ami avant tout, alors, avec lui, on est allé au fond du train, en face de la porte. J'ai poussé la clenche et on a pu constater qu'il n'y avait là que des toilettes, tout ce qu'il y a de plus banal.
On s'est donc assis. J'ai mis mes écouteurs, puis, au bout d'une dizaine de minutes, j'ai eu envie de pisser. J'ai glissé ma paire d'écouteurs dans ma poche. J'ai filé dans les fameux chiottes hantés, et je me suis soulagé un bon coup. J'ai regardé dans la glace, par curiosité, et là...
Absolument rien. J'étais soulagé, alors que je n'avais pas peur à l'origine. Je crois que Kevin m'avait rendu parano. Puis mon pied a dérapé sur le sol, en voulant sortir. J'ai manqué de m'éclater l'arrière du crâne sur le lavabo. J'ai regardé sous mon pied : il y avait un livre. Son titre était Nicomède. Livre réputé de Pierre Corneille. C'est étrange que je ne l'ai pas remarqué en entrant.
J'ai eu un peu peur de la coïncidence entre l'illusion de Kevin et le livre que j'ai trouvé, donc, je l'ai ouvert. A l'intérieur, il n'y avait pas le texte habituel. En fait, il n'y avait pas de texte du tout, les pages étaient blanches. Je les feuilletais à toute vitesse, quand enfin, mon regard croisa une page avec une phrase écrite. Phrase simple, mais effroyable : « Es-tu vraiment seul ? Je suis bien placé pour te dire que non. ». J'ai eu un léger frisson, puis j'ai remarqué que plus aucun bruit ne sortait des wagons, plus aucune paroles, aucun bruit de train sur des rails. Silence total, et extrêmement pesant. Le temps s'était presque arrêté. Je dis bien presque, car je sentais bien mon cœur battre à une vitesse folle. Ça y est, Kevin m'avait rendu complètement paranoïaque. J'ai paniqué, j'ai essayé de sortir, mais dans mon élan, j'ai oublié qu'il fallait tirer la porte, et non pas pousser, pour sortir. Ça a accentué ma peur.
La panique me gagna, puis un petit gémissement d'une voix de vieillard s'éleva dans le silence, venant de nulle part, et glaça aussi tôt mon sang. J'étais littéralement paralysé par la peur. Ce coup-ci, ça n'était plus mon imagination.
La suite n'est qu'une accumulation de manifestations des poltergeits, ou esprits frappeurs ( Même si c'est dur de parler de "routine" dans de telles conditions ) : lumière qui s'éteignent, bruits étranges, puis visage éclairé par une lumière verte, visible à travers le miroir. J'ai reconnu le minois de Pierre Corneille, qui me fixait d'un air sévère.
L'effroi fut vif, je jetai le livre dans les toilettes à l'aveuglette, et tira la chasse d'eau, à tâtons, avec des gestes spasmodiques. Ils font comme ça, dans les films. Alors, les lumières se sont rallumés, mais l'éclairage était très fort. Trop fort, j'étais complètement ébloui. Le miroir a violemment explosé, des éclats de verres m'ont tranché la peau des bras, puis plus rien. Tout est redevenu normal. Même le miroir est redevenu intact. Quant aux bruits environnants, ils sont revenus. Mes mains étaient traversées de veines gonflées, me front lâchait des perles de sueur glaciales, que je sentait couler le long de mon cou. Je soupirai, et passa cinq doigts crispés dans mes cheveux ébouriffés.
Je suis sorti, sous le choc. La scène était censée durer à peine 5 minutes, d'après mes estimations. Pourtant, on était déjà arrivé au Havre. J'ai regardé ma montre. Trois quarts d'heure ont passé. J'ai fait mine à Kevin qu'il ne s'était rien passé, même si j'ai quand même bien flippé. Et lui, ça ne l'a même pas inquiété de voir que j'ai passé trois quarts d'heures aux chiottes. J'ai remis mes écouteurs, et je suis rentré chez moi. Kevin, de son coté, lui aussi, est rentré chez lui.
L'histoire pourrait s'arrêter là. Pourtant les emmerdes avec le « fantôme de Pierre Corneille » ne faisaient que commencer. Et cette expérience dans le train ne fut pas la plus effrayante.
Seconde partie : La vengeance
Depuis ma rencontre avec le spectre de Pierre Corneille, mes pensées n'avait que lui comme centre d'intérêt. Pierre Corneille m'empêchait de dormir, m'empêchait de songer correctement, m'empêchait d'être libre. Il est vrai qu'une rencontre avec un mort peut marquer, mais moi, ça m'avait vraiment secoué.
La présence de Corneille dans mon esprit m'irritait. Ma petite amie l'a tout de suite remarqué, à mon retour de Rouen, alors elle m'a demandé ce que j'avais. Je ne voulais pas être pris par un fou par ma propre moitié, alors je n'ai rien dit. J'ai été jusqu'à nier que j'étais mal. Ça ne lui a pas plu, de me voir mentir, elle a insisté sur la question, en vain. Je crois qu'à force, je lui ait transmis ma colère. Après quelques temps, on a commencé les disputes. On a failli rompre.
Un soir, après une énième dispute, je suis rentré chez Kevin, et je lui ai tout raconté. Pas que la dispute, mais aussi la mésaventure dans le train, mon stress permanent et mes autres travers qui font que je ne vais plus bien. Il m'a dit d'aller me calmer, et que, si je voulais, je pouvais me servir de son bain. J'ai immédiatement bondit de ma chaise, et j'ai sauté dans sa baignoire, me déshabillant à toute vitesse. Kevin a voulu me laisser tranquille, il est parti se faire un café.
Pendant que l'eau coulait, j'ai reconnu le bruit de la vieille machine à café de Kevin. Un vrombissement qui ferait mouche au milieu d'un morceau de death metal. J'ai fermé les yeux, je me suis laissé glisser au fond du bain...puis j'ai ouvert les yeux. Sans m'en rendre compte, plus aucun bruit ne sortait de nulle part, et l'eau s'était arrêtée de couler, alors que je n'avais pas touché au robinet. Un visage est apparu comme un flash, très vite, à un mètre au dessus de moi. Un visage malin, avec un air vicieux, et un petit « Ah-ah » comme signe de présence. Une petite gueule proche de celle de l'auteur du Cid, qui a presque fait exploser mon cœur de peur et de surprise.
J'ai redressé le dos, et, les yeux écarquillés, j'ai crié de panique en voyant que l'eau de mon bain était devenue rouge foncé, presque marron, et surtout, qu'elle était devenue très, très, mais vraiment très froide. Elle sentait le rhum et l'herbe coupée à la fois. L'odeur était vraiment bizarre. Je suis sorti, j'ai remis très vite mon caleçon, et je suis entré dans le cuisine. J'ai dis à Kevin de venir dans la salle de bain, alors, quand on est rentré, je n'ai pu que constater une baignoire vide. Mon pote m'a dit de retourner chez moi, et de dormir un bon coup.
J'ai décidé de mettre fin au mystère autour du fantôme de Pierre Corneille. Je devais prendre l'affaire en main. J'ai donc entrepris de rassembler tout ce qui me faisait penser à Corneille, d'aller piocher les infos qui m'aideraient à chasser le fantôme de mon esprit.
Je suis retourné chez ma mère un week-end, pour aller chercher mes vieux cours de Seconde dans le grenier. Elle a été contente de me voir, mais je n'étais pas d'humeur à ça. Je lui ai expliqué que j'ai des choses urgentes à faire. J'ai donc fouillé dans les fameuses archives du lycée, et j'y ai retrouvé mes leçons sur Pierre Corneille. J'ai relu la leçon, attentivement, cherchant quelque chose pour m'aider, mais rien d'intéressant. Si ce n'est que l'Académie Française a gardé ses documents personnels, ses essais jamais publiés et ses notes.
Changement de piste, la réponse à mes questions se trouvait à l'Académie Française. En attendant, je restais la nuit chez ma mère.
Cette même nuit, j'ai fait un rêve... dérangeant. Je me voyais, habillé en homme du XVIIIe siècle, dans une campagne verte digne des meilleurs décors celtiques, épée à la main, le fer touchant le torse de l'adversaire. Un homme derrière moi criait « Tue-le ! ». Mais je ne voulais pas le tuer moi, cet homme en face de moi. Je ne voyais même pas son visage, mon regard était bloqué sur le métal brillant. La voix insistait pour que je tue. Alors, j'ai tué, j'ai donné le coup d'épée fatal. Alors, j'ai constaté que j'avais assassiné un homme qui m'était proche : Kevin. Je me suis retourné, cœur palpitant, et j'ai vu le visage de Pierre Corneille, me disant « Venger mon âme...c'est tout ce que je te demande. Regarde-le. ». J'ai crié, en voyant Kevin mourir. Et je me suis réveillé en sueur. Alors, un odeur de rhum et d'herbe coupé se fit sentir, dés mon réveil précipité. Je plaque la main par terre, sent le tissu du lit. Je souffle, puis une main se pose sur la mienne, une main glaciale, qui me faire bondir, droit sur l'interrupteur. La lumière s'allume, et je vois, écrit sur le mur de la chambre : « Mon passé fait ton avenir ». Plus de doute, IL me regarde. Pierre Corneille s'amuse à me faire peur, mais ne veut pas me faire du mal. J'en ai la certitude.
Je me recouche. Demain, j'irai à l'Académie. Et je résoudrais mon problème. Je vengerais celui qui voulais qu'on le venge.
Mais de quoi ?
Les Archives me le diront.
Troisième partie : Les archives
Je frappai à la porte. Le temps était gris, maussade. Ce qui explique pourquoi les touristes, habituellement nombreux à admirer l'Institut de France, se sont réfugiés dans des cafés parisiens, ou sont tout simplement restés dans leurs appartements. Tout ça pour dire que j'étais un des seuls à côtoyer l'Institut ce jour-là.
Je vous décrit l'institut : c'est un grand bâtiment à coupole, avec deux ailes sur les bords. Une longue avenue fleurie y mène. Mais en février, l'avenue est plutôt sobre. Et le temps n'est pas rayonnant.
Un homme ouvra la porte. Un costume noir et blanc, des plus classes. Il me demande la raison de ma visite, j'ai dis que je devais consulter des documents importants. Il en va de l'honneur post-mortem de Pierre Corneille. L'homme, malgré sa voix sympathique et ses paroles « bien dites », a voulu me chasser comme une grosse merde.
Alors, une autre voix d'homme, un peu plus vieille et utilisant un langage moins soutenu, s'adresse à moi, sans me voir. Du moins, moi, je ne l'avais pas vu. La voix dit d'abord au costume bicolore de s'écarter pour me laisser passer.
J'ai été étonné de voir qu'on m'acceptait. Moi-même je n'y croyais pas trop, à ce coup-là, je m'attendais à me faire jeter, mais ce retournement de situation à la dernière minute me redonna espoir. J'entrais, et je vit un homme que je ne connaissais pas du tout, mais qui, lui, me parlait comme si il me connaissait.
Je me suis présenté, il a fait de même. J'avais affaire à un certain Louis Carette. Louis m'a dit « Tu es hanté par un spectre qui veut sa vengeance j'imagine ? ».
Sidéré. J'étais sidéré. Comment savait-il ça ? Je n'ai pas hésité à lui demander, ce à quoi il a répondu « Je l'ai aussi vécu, et puis, quand je t'ai entendu parler d'honneur post-mortem, tout cela...j'ai pensé à ça tout de suite. ».
On a marché pendant une demi-heure dans les couloirs magnifiques de l'Institut. Louis m'a raconté toute son histoire : vers l'âge de 30 ans, il avait été hanté par l'esprit vengeur d'Alphonse Daudet. Alphonse l'avait presque rendu fou, mais Louis ne voulait pas en parler à son entourage. Il voulait régler ses problèmes lui-même. Alphonse lui a donc demandé de le venger, ce à quoi Louis a consenti, en détruisant les restes de la demeure de la compagne d'Alphonse, qui lui a été infidèle. En contrepartie, Alphonse a donné tout les conseils qu'il fallait, à Louis, pour s'assurer une place à l'Académie française. Voilà où ça l'a mené.
Après son histoire, Louis m'a dit « C'est bien Pierre Corneille qui te hante ? Je vais t'aider. Si ça peut te rassurer, les fantômes d'académiciens ne tuent pas, ils rendent seulement fous. ».
Seulement fou ! Mais bien sûr, ce n'est rien d'être fou à cause d'un fantôme qui te harcèle ! Mais bon, même les régisseurs de la langue françaises ont des manies surprenantes.
-Dites-moi, Louis...si on ne sait pas ce que veux le fantôme ?
-Eh bien, on va rechercher !
Il m'a conduit face à un escalier, qu'on a descendu. Aussitôt, nous tombions sur une porte, et un autre escalier, que nous avons également descendu. Après un bon quart d'heure sur des escaliers interminables, nous arrivons dans des galeries immenses, et poussiéreuses. Mais pas si sombre, malgré la profondeur.
On a continué notre petite course, entre les rayons remplis de papiers jaunis. Puis Louis se tourna vers un livre en particulier, qu'il tira du tas de feuilles. Il l'ouvrit. Le livre commençait sur ces phrases, en écriture manuscrite :
« Introduction :
Je veux une vie de secret.
Vous, qui lirez ce texte, sachez que je suis aujourd'hui mort.
Ce livre me sert de confessionnal.
C'en est certain.
Mon fils illégitime Aaron (*) a été chargé de remettre ce manuscrit en mains propres.
Oui, fils illégitime. J'aime côtoyer ces filles à sale réputation.
Si vous lisez cela, c'est que vous avez été élu pour le lire.
Il y a une raison. »
Ça commençait fort. On a tourné les pages, et découvert des tranches de vie de Pierre Corneille qu'on n'aurait jamais cru. Au fil des pages, croquis, ratures et texte nous faisait découvrir des choses que je n'aurait, normalement, pas dû vous raconter. Pierre vivait dans une débauche incroyablement pitoyable. Je ne vous décris pas certaines scène vraiment choquantes. A coté de ça, Snoop Dogg est un moine. Puis, la dernière page nous apparut. Elle portait une mention assez unique en son genre « Ajouts posthumes ». Une seule phrase y figurait : « Ma vie n'est plus un secret si mon antre est à la portée de tous. ».
Tout s'éclaircit alors : j'avais compris que Pierre Corneille voulait laisser le secret autour de sa vie. Mais sa maison, près de Rouen, est devenue un musée, et sa vie privée est exposée à tous. Pierre voulait sans doute que de lui il ne reste que des poèmes. Pourtant, cette conclusion hâtive n'était pas la réalité.
Et, sous les yeux de Louis et moi-même, une nouvelle phrase s'écrivit sur le papier, sans qu'on ait à y toucher. D'où venait l'encre, d'où venait le texte ? Aucune idée. Mais l'encre sentait une forte odeur de rhum et d'herbe coupée. Il était marqué « Vous êtes 3 à connaître le secret. Vous représentez 2 d'entre eux. Le troisième a trahit le secret autour de moi, et doit disparaître avec lui. C'est un descendant d'Aaron. C'est un ami proche. C'est Kevin. »
J'en suis venu à une conclusion tout simplement abominable : je devais tuer Kevin. J'ai eu beau crier « Non ! », je savais que ça ne marcherait pas comme ça. Des gribouillages apparurent sur le papier. Le spectre s'énervait. Louis recula, de peur. Il saisit une torche fixée au mur et la secoua dans tous les sens, comme pour faire peur. Les flammes ne faisaient pas se calmer Pierre. Le Livre sauta littéralement de mes mains, et nous frappa. Oui, l'esprit occupait le papier, et nous maltraitait. Des rires, puis des menaces. Corneille était fou, d'autres papiers volèrent.
Et puis, par accident, Louis mis le feu au Livre. On a entendu un cri de souffrance sortant de l'ouvrage, le papier se consuma a une vitesse folle. Les cendres tombèrent juste devant moi, et étrangement, le feu n’atteint pas mes mains. Un peu après, un visage apparut dans le petit tas de cendres. Le joli petit minois de Pierre Corneille, avec une expression de souffrance. Nous somme remontés vite, car le feu gagnait les autres archives. A notre sortie, on a entendu un bruit d’effondrement horrible. Un vrombissement dû à une chute effrénée de livre se consumant. Des siècles d'écrit disparurent.
Plusieurs jours ont passé. Je suis rentré chez moi, j'ai laissé le temps faire son œuvre, mais il me semble que l'Âme de Pierre soit partie avec le Livre. Plus aucune manifestation de fantômes, plus aucun tourment. Même mon couple allait mieux.
J'en ai fait part à Kevin, puis à quelques potes du club de foot amateur local où je joue. Certains ont ris, d'autres ont pris ça au sérieux, d'autres s'en foutent comme de l'an 40.
Toujours est-il que, d'une manière ou d'une autre, j'ai réussi à régler le mystère du Fantôme de Pierre Corneille. Je l'ai détruit. Nous l'avons détruit.
Mais doit-on en être fier ?
Car depuis ce jour, je n'ai jamais été aussi parano.
Je ne prend même plus le train, et par précaution, je ne vais plus voir de match de hockey.
(*) Contrairement à ce qu'on croit souvent, Aaron est un prénom français, et assez vieux d'existence.
Auteur : Loozar
Un secret peut être mortel pour les curieux, surtout si la personne concernée n'a pas rejoint l'au-delà, afin de veiller qu'on ne dévoile par son secret le plus cher...
C'est la première pasta, je pense, où la "victime" ne joue pas le jeu du "méchant"... et s'en tire sans séquelles graves (et sans gros retournement de dernière phrase bien forcé). J'applaudis.
RépondreSupprimerVB
Je pense pas que la victime devait jouer un rôle de méchant
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