Il
y a quelques temps, je me suis souvenu d’une anecdote un peu bizarre
qui m’était arrivée pendant ma licence. Comme n’importe quelle étudiante
fauchée, je vivais en colocation, généralement je changeais de
colocataire tous les ans. Cette année-là, j’étais avec un garçon qui
faisait un apprentissage et qui avait été viré de chez ses parents. En
même temps, ça pouvait se comprendre, il était parfois très lourd. Mais
au moins, il payait une partie du loyer, et il n’était pas complètement
inutile dans l’appartement.
Un soir, il a ramené un de ses amis à la maison, qui s’était visiblement soûlé à la fête d’où ils rentraient, en me promettant qu’il ferait la vaisselle tout le weekend si je voulais bien être un peu compréhensive. J’ai failli refuser, vu l’état dans lequel les deux garçons étaient, mais j’ai eu un peu pitié et je me suis rangée de mon côté, en me disant qu’une nuit n’était pas grand-chose. Heureusement, il n’y a pas eu de flaque de vomi à nettoyer le lendemain. En fait, quand je me suis réveillée, il ne restait plus que mon colocataire.
Je l’ai trouvé dans la cuisine en train de lire une feuille couverte de gribouillages, les sourcils froncés. Quand je lui ai demandé où était son ami, il a grogné sans un regard qu’il s’était fait la malle pendant la nuit. Je me suis dit que ce n’était pas le moment de le déranger, alors je me suis fait mon petit déjeuner sans parler davantage. La pièce est restée silencieuse un moment, et puis un bruit m’a fait sursauter : il avait déchiré la feuille en deux parties inégales, l’avait chiffonnée et jetée à la poubelle d’un air agacé. À la question silencieuse qui avait dû paraître dans mon regard, il répondit qu’il s’agissait « d’idioties de mec bourré » et qu’il n’y avait aucune raison de s’y intéresser davantage. Il s’est ensuite fait un café, l’a rapidement bu et est parti en hâte, en retard comme à son habitude.
Pour moi, le samedi était beaucoup plus reposant, je n’avais que quelques révisions à faire, mais ce n’était pas bien difficile. J’ai donc préféré faire un peu de ménage, n’oubliant toutefois pas la promesse qui avait été faite à propos de la vaisselle, jusqu’à ce que je repense à la scène qui s’était déroulée plus tôt. Tout de même, il devait bien y avoir une raison pour que mon colocataire ait l’air agacé comme ça. J’ai pensé au début qu’il ne fallait peut être pas fouiller dans les affaires des autres, mais, d’un autre côté, si ce n’étaient que des paroles imbibées d’alcool, ça ne devait pas être bien grave non plus si je risquais un petit coup d’œil. J’ai fini par céder à ma curiosité et suis allée chercher les deux morceaux de la feuille dans la corbeille.
Après ma première lecture de ce qui s’avérait être une lettre laissée par l’ami de mon colocataire avant de s’éclipser, la première chose que je me suis dite, c’est qu’il avait vraiment dû abuser de la bouteille pour écrire des trucs pareils. Ou alors il avait une imagination vraiment débordante ! Je vais vous en résumer le contenu, mais pour ceux qui souhaiteraient la lire de leurs propres yeux, j’ai aussi scanné l’originale, en premier lieu parce que ça m’avait bien fait rire. Je dois juste vous prévenir que l’écriture est bâclée et par endroits difficilement lisible (comme celle de beaucoup de garçons !)
La lettre commence par dire qu’il a fait quelque chose de mal, qu’il était venu pour en parler à mon colocataire mais qu’il n’a pas trouvé le courage de lui dire. Il évoque ensuite un voyage en Afrique datant de 2003 (bien que cette partie soit rayée, je suis quasiment sûre que c’est ce qui est écrit) au cours duquel il aurait amassé quelques souvenirs, dont des graines d’une plante qu’on lui avait vendues sous le nom de « Douniak » en assurant qu’elle aurait des « effets géniaux » et qu’il avait vraisemblablement prises pour une substance illicite. S’il a pu passer la frontière avec, ça me paraît évident qu’il se trompait lourdement.
Ensuite, ayant fait pousser ses graines (qui devaient être sacrément résistantes pour survivre au changement de climat), il s’est rendu compte que la plante en question était un arbre qui dégageait une odeur agréable, ce qui attirait cependant des insectes indésirables. Il assure aussi que les branches pouvaient bouger toutes seules, mais ce détail m’a de prime abord paru un peu étrange. Quoi qu’il en soit, plus on avance dans la lecture, plus il a l’air de délirer : son arbre aurait attrapé des oiseaux puis un chat et c’est cette dernière prise qui l’aurait amené à se débarrasser de son « souvenir d’Afrique ». Mais l’histoire ne s’arrête pas là, car le garçon aurait en effet entendu parler de disparitions dans la région où il se serait séparé de sa plante et craindrait d’être appréhendé par les forces de police, probablement pour homicide involontaire ou quelque chose du même acabit.
Après une bonne crise de fou rire, j’ai scanné ce qui restait de la feuille, comptant bien la montrer à quelques amies qui la trouveraient probablement tout aussi drôle que moi, et je l’ai remise à sa place, dans la poubelle. J’ai oublié cette histoire assez vite à vrai dire, après tout la personne qui avait écrit cette lettre ne faisait pas partie de mes amis. De plus, ma colocation s’est rapidement terminée, et je n’ai plus entendu parler des deux garçons par la suite. Pourtant, cette histoire m’a été rappelée plus vite que je ne l’aurais cru.
Je suis naturellement curieuse et je m’informe beaucoup sur internet, il arrive certes souvent que le départ de mes recherches soit un article Facebook sans intérêt, mais cela devient rapidement plus constructif. Toujours est-il qu’un jour, je me suis retrouvée à lire un article sur Menton et sa région, et le nom d’une des communes a attiré mon attention, bien que je ne me rappelais plus pourquoi. Google a très vite réactivé ma mémoire : Sospel, village victime de disparitions inexpliquées, comme par exemple le cas de Philippe Rocheteau, 31 ans, qui est allé au col de Brouis, juste au-dessus de la commune, et n’en est jamais revenu. Disparitions inexpliquées dont je n’avais entendu parler qu’une seule fois : dans la lettre que j’avais lue plusieurs mois auparavant. Je dois avouer que cette fois-ci, ça m’a laissée perplexe. Au point que j’ai relu le scan de la lettre.
J’ai eu beaucoup de mal à trouver des informations sur ce que je voulais. Celles sur les disparitions de Sospel sont très minces, à vrai dire ils ne nomment que trois disparus (certains ont peut être été retrouvés, au final ?) et je n’ai absolument rien trouvé en recherchant « Douniak ». Mais pour ce dernier point, je ne me suis pas démontée. Il m’a suffit de taper « arbre carnivore » pour trouver mon bonheur. Au début, j’ai simplement découvert un mythe à propos d’un arbre de trois mètres à Madagascar auquel une tribu vouait un culte et offrait des victimes en sacrifice. La plupart des pages internet traitaient de ce mythe. Mais sur l’une d’elles, un autre article était suggéré : «Duñak». Quand j’ai vu ça, je me suis dit que c’était la bonne.
Le Duñak est un arbre mangeur d’hommes qui vivrait aux Philippines (note : et donc bien loin de l’Afrique, ce qui nous laisse avec des questions, serait-ce pour cette raison que le nom du continent était barré sur la lettre, ou bien est-ce que le garçon avait confondu avec quelque chose d’autre ? Ou bien est-ce que des pousses de cette plante auraient pu être introduites en Afrique…) et capturerait les êtres vivants (souvent de taille inférieure à celle des êtres humains, mais il pouvait aussi en attraper un ou deux à l’occasion) passant sous ses branches au moyen de vrilles épineuses emmenant les proies au sommet de l’arbre et les broyant. Il est précisé sur la page internet que ce genre de mouvement est physiquement impossible, et qu’il ne s’agissait probablement que d’un mythe de plus basé sur les droséras, plantes carnivores bien plus petites qui, elles, existent bel et bien.
En me remémorant ce qu’il y avait écrit sur mon scan, j’ai trouvé ça plutôt glauque. Imaginer qu’on est simplement en train de se balader en forêt, et que tout d’un coup on se sent soulevé dans les airs, droit vers l’enfer, m’a donné un frisson. Et puis les histoires d’animaux qu’il avait racontées, perdant leur caractère absurde, me répugnaient totalement. Moi qui aime beaucoup les chats (et qui en avait un lorsque je vivais chez mes parents), la perspective de voir une de ces pauvres boules de poils tout d’un coup agrippée et tirée lentement vers des branches meurtrières qui n’attendent que de se refermer sur la chair et de broyer ses membres m’a presque hantée jusqu’au soir.
Mes recherches m’ont toutefois laissé un goût d’insatisfaction : la lettre n’était pas cohérente avec ce qui se trouvait sur internet, et le prétendu arbre avait l’air d’être un hybride entre le fameux Duñak et l’arbre de Madagascar. Est-ce qu’il n’avait pas écrit ça juste pour se rendre intéressant ? Il y avait certes le facteur de l’alcool que je ne devais pas oublier, mais pour pouvoir écrire comme ça, il devait encore avoir une certaine clarté d’esprit. J’ai continué à fouiller le web pendant un moment, puis j’ai fini par m’en lasser et j’ai laissé tomber l’affaire. De toute manière, j’avais des choses plus importantes à régler à ce moment. L’histoire est à nouveau tombée dans l’oubli, et cela ne m’est revenu à l’esprit qu’en de rares occasions par la suite.
Malgré la faible probabilité que ce genre d’histoire soit vraie, une fois qu’on a entendu parler de quelque chose d’un peu angoissant, notre esprit a tendance à ébaucher un nombre incalculable de scénarios commençant tous par «et si… ?» Avec les plantes, ça peut aller très loin. Après tout, elles peuvent se répandre assez facilement. Et si un arbre de cette espèce existait vraiment, et qu’une de ses graines était transportée jusque dans la forêt en face de chez moi ? Il ne manquerait plus que les racines s’animent elles aussi, et on aurait quelque chose capable de rivaliser avec certains des monstres les plus affreux. Ce genre de pensée illogique me rappelle un peu le genre d’idée que l’on a, lorsqu’on est enfant, à propos des monstres cachés sous notre lit. Comme quoi on ne quitte jamais complètement l’enfance.
Étant très terre à terre, ce n’est pas non plus le type d’histoire qui m’inquiète beaucoup non plus. Si les scientifiques disent que c’est impossible, c’est que ça doit l’être. Il m’est arrivé de regarder les arbres avec méfiance suite à cela, mais j’ai rapidement perdu cette habitude. Je me demande tout de même quelque chose à ce propos : et si j’étais restée méfiante ? Et si j’avais résisté à la tentation d’aller voir les choses par moi-même pour satisfaire mon insatiable curiosité ? Est-ce que j’aurais échappé à ce parfum doux et mortel qui enivre à présent mes sens ?
Un soir, il a ramené un de ses amis à la maison, qui s’était visiblement soûlé à la fête d’où ils rentraient, en me promettant qu’il ferait la vaisselle tout le weekend si je voulais bien être un peu compréhensive. J’ai failli refuser, vu l’état dans lequel les deux garçons étaient, mais j’ai eu un peu pitié et je me suis rangée de mon côté, en me disant qu’une nuit n’était pas grand-chose. Heureusement, il n’y a pas eu de flaque de vomi à nettoyer le lendemain. En fait, quand je me suis réveillée, il ne restait plus que mon colocataire.
Je l’ai trouvé dans la cuisine en train de lire une feuille couverte de gribouillages, les sourcils froncés. Quand je lui ai demandé où était son ami, il a grogné sans un regard qu’il s’était fait la malle pendant la nuit. Je me suis dit que ce n’était pas le moment de le déranger, alors je me suis fait mon petit déjeuner sans parler davantage. La pièce est restée silencieuse un moment, et puis un bruit m’a fait sursauter : il avait déchiré la feuille en deux parties inégales, l’avait chiffonnée et jetée à la poubelle d’un air agacé. À la question silencieuse qui avait dû paraître dans mon regard, il répondit qu’il s’agissait « d’idioties de mec bourré » et qu’il n’y avait aucune raison de s’y intéresser davantage. Il s’est ensuite fait un café, l’a rapidement bu et est parti en hâte, en retard comme à son habitude.
Pour moi, le samedi était beaucoup plus reposant, je n’avais que quelques révisions à faire, mais ce n’était pas bien difficile. J’ai donc préféré faire un peu de ménage, n’oubliant toutefois pas la promesse qui avait été faite à propos de la vaisselle, jusqu’à ce que je repense à la scène qui s’était déroulée plus tôt. Tout de même, il devait bien y avoir une raison pour que mon colocataire ait l’air agacé comme ça. J’ai pensé au début qu’il ne fallait peut être pas fouiller dans les affaires des autres, mais, d’un autre côté, si ce n’étaient que des paroles imbibées d’alcool, ça ne devait pas être bien grave non plus si je risquais un petit coup d’œil. J’ai fini par céder à ma curiosité et suis allée chercher les deux morceaux de la feuille dans la corbeille.
Après ma première lecture de ce qui s’avérait être une lettre laissée par l’ami de mon colocataire avant de s’éclipser, la première chose que je me suis dite, c’est qu’il avait vraiment dû abuser de la bouteille pour écrire des trucs pareils. Ou alors il avait une imagination vraiment débordante ! Je vais vous en résumer le contenu, mais pour ceux qui souhaiteraient la lire de leurs propres yeux, j’ai aussi scanné l’originale, en premier lieu parce que ça m’avait bien fait rire. Je dois juste vous prévenir que l’écriture est bâclée et par endroits difficilement lisible (comme celle de beaucoup de garçons !)
La lettre commence par dire qu’il a fait quelque chose de mal, qu’il était venu pour en parler à mon colocataire mais qu’il n’a pas trouvé le courage de lui dire. Il évoque ensuite un voyage en Afrique datant de 2003 (bien que cette partie soit rayée, je suis quasiment sûre que c’est ce qui est écrit) au cours duquel il aurait amassé quelques souvenirs, dont des graines d’une plante qu’on lui avait vendues sous le nom de « Douniak » en assurant qu’elle aurait des « effets géniaux » et qu’il avait vraisemblablement prises pour une substance illicite. S’il a pu passer la frontière avec, ça me paraît évident qu’il se trompait lourdement.
Ensuite, ayant fait pousser ses graines (qui devaient être sacrément résistantes pour survivre au changement de climat), il s’est rendu compte que la plante en question était un arbre qui dégageait une odeur agréable, ce qui attirait cependant des insectes indésirables. Il assure aussi que les branches pouvaient bouger toutes seules, mais ce détail m’a de prime abord paru un peu étrange. Quoi qu’il en soit, plus on avance dans la lecture, plus il a l’air de délirer : son arbre aurait attrapé des oiseaux puis un chat et c’est cette dernière prise qui l’aurait amené à se débarrasser de son « souvenir d’Afrique ». Mais l’histoire ne s’arrête pas là, car le garçon aurait en effet entendu parler de disparitions dans la région où il se serait séparé de sa plante et craindrait d’être appréhendé par les forces de police, probablement pour homicide involontaire ou quelque chose du même acabit.
Après une bonne crise de fou rire, j’ai scanné ce qui restait de la feuille, comptant bien la montrer à quelques amies qui la trouveraient probablement tout aussi drôle que moi, et je l’ai remise à sa place, dans la poubelle. J’ai oublié cette histoire assez vite à vrai dire, après tout la personne qui avait écrit cette lettre ne faisait pas partie de mes amis. De plus, ma colocation s’est rapidement terminée, et je n’ai plus entendu parler des deux garçons par la suite. Pourtant, cette histoire m’a été rappelée plus vite que je ne l’aurais cru.
Je suis naturellement curieuse et je m’informe beaucoup sur internet, il arrive certes souvent que le départ de mes recherches soit un article Facebook sans intérêt, mais cela devient rapidement plus constructif. Toujours est-il qu’un jour, je me suis retrouvée à lire un article sur Menton et sa région, et le nom d’une des communes a attiré mon attention, bien que je ne me rappelais plus pourquoi. Google a très vite réactivé ma mémoire : Sospel, village victime de disparitions inexpliquées, comme par exemple le cas de Philippe Rocheteau, 31 ans, qui est allé au col de Brouis, juste au-dessus de la commune, et n’en est jamais revenu. Disparitions inexpliquées dont je n’avais entendu parler qu’une seule fois : dans la lettre que j’avais lue plusieurs mois auparavant. Je dois avouer que cette fois-ci, ça m’a laissée perplexe. Au point que j’ai relu le scan de la lettre.
J’ai eu beaucoup de mal à trouver des informations sur ce que je voulais. Celles sur les disparitions de Sospel sont très minces, à vrai dire ils ne nomment que trois disparus (certains ont peut être été retrouvés, au final ?) et je n’ai absolument rien trouvé en recherchant « Douniak ». Mais pour ce dernier point, je ne me suis pas démontée. Il m’a suffit de taper « arbre carnivore » pour trouver mon bonheur. Au début, j’ai simplement découvert un mythe à propos d’un arbre de trois mètres à Madagascar auquel une tribu vouait un culte et offrait des victimes en sacrifice. La plupart des pages internet traitaient de ce mythe. Mais sur l’une d’elles, un autre article était suggéré : «Duñak». Quand j’ai vu ça, je me suis dit que c’était la bonne.
Le Duñak est un arbre mangeur d’hommes qui vivrait aux Philippines (note : et donc bien loin de l’Afrique, ce qui nous laisse avec des questions, serait-ce pour cette raison que le nom du continent était barré sur la lettre, ou bien est-ce que le garçon avait confondu avec quelque chose d’autre ? Ou bien est-ce que des pousses de cette plante auraient pu être introduites en Afrique…) et capturerait les êtres vivants (souvent de taille inférieure à celle des êtres humains, mais il pouvait aussi en attraper un ou deux à l’occasion) passant sous ses branches au moyen de vrilles épineuses emmenant les proies au sommet de l’arbre et les broyant. Il est précisé sur la page internet que ce genre de mouvement est physiquement impossible, et qu’il ne s’agissait probablement que d’un mythe de plus basé sur les droséras, plantes carnivores bien plus petites qui, elles, existent bel et bien.
En me remémorant ce qu’il y avait écrit sur mon scan, j’ai trouvé ça plutôt glauque. Imaginer qu’on est simplement en train de se balader en forêt, et que tout d’un coup on se sent soulevé dans les airs, droit vers l’enfer, m’a donné un frisson. Et puis les histoires d’animaux qu’il avait racontées, perdant leur caractère absurde, me répugnaient totalement. Moi qui aime beaucoup les chats (et qui en avait un lorsque je vivais chez mes parents), la perspective de voir une de ces pauvres boules de poils tout d’un coup agrippée et tirée lentement vers des branches meurtrières qui n’attendent que de se refermer sur la chair et de broyer ses membres m’a presque hantée jusqu’au soir.
Mes recherches m’ont toutefois laissé un goût d’insatisfaction : la lettre n’était pas cohérente avec ce qui se trouvait sur internet, et le prétendu arbre avait l’air d’être un hybride entre le fameux Duñak et l’arbre de Madagascar. Est-ce qu’il n’avait pas écrit ça juste pour se rendre intéressant ? Il y avait certes le facteur de l’alcool que je ne devais pas oublier, mais pour pouvoir écrire comme ça, il devait encore avoir une certaine clarté d’esprit. J’ai continué à fouiller le web pendant un moment, puis j’ai fini par m’en lasser et j’ai laissé tomber l’affaire. De toute manière, j’avais des choses plus importantes à régler à ce moment. L’histoire est à nouveau tombée dans l’oubli, et cela ne m’est revenu à l’esprit qu’en de rares occasions par la suite.
Malgré la faible probabilité que ce genre d’histoire soit vraie, une fois qu’on a entendu parler de quelque chose d’un peu angoissant, notre esprit a tendance à ébaucher un nombre incalculable de scénarios commençant tous par «et si… ?» Avec les plantes, ça peut aller très loin. Après tout, elles peuvent se répandre assez facilement. Et si un arbre de cette espèce existait vraiment, et qu’une de ses graines était transportée jusque dans la forêt en face de chez moi ? Il ne manquerait plus que les racines s’animent elles aussi, et on aurait quelque chose capable de rivaliser avec certains des monstres les plus affreux. Ce genre de pensée illogique me rappelle un peu le genre d’idée que l’on a, lorsqu’on est enfant, à propos des monstres cachés sous notre lit. Comme quoi on ne quitte jamais complètement l’enfance.
Étant très terre à terre, ce n’est pas non plus le type d’histoire qui m’inquiète beaucoup non plus. Si les scientifiques disent que c’est impossible, c’est que ça doit l’être. Il m’est arrivé de regarder les arbres avec méfiance suite à cela, mais j’ai rapidement perdu cette habitude. Je me demande tout de même quelque chose à ce propos : et si j’étais restée méfiante ? Et si j’avais résisté à la tentation d’aller voir les choses par moi-même pour satisfaire mon insatiable curiosité ? Est-ce que j’aurais échappé à ce parfum doux et mortel qui enivre à présent mes sens ?
Auteur: Magnosa
Douzième concours creepypastique organisé sur le forum, avec pour thème Cryptides et Disparitions.
Vraiment cool. Bien réaliste, originale, posé.
RépondreSupprimerGG l'auteur :)
#R
une fin sans fin? bref, mais l'idée de la lettre est cool je trouve et apporte un effet de réaliste, avec la feuille froissé, l'écriture bâclé...superbe!
RépondreSupprimerIl y a une fin. Elle dit que ses sens sont enivrés par un parfum agréable mais mortel. Comme celui évoqué dans la lettre... Fait le lien tu vas voir qu'il y a une fin
SupprimerTrop cool!!!!!^^ original ;)
RépondreSupprimerLa lettre n'est pas déchirée...
RépondreSupprimersi si regarde le bas de la feuille
SupprimerSa va c'est bien j'aime
RépondreSupprimerEuh y a que moi qui a remarqué que certains mots étaient en gris ??
RépondreSupprimerCool
RépondreSupprimer