La publication d'aujourd'hui est un peu particulière, car il ne va pas tant s'agir d'une véritable creepypasta (ou, pour être plus précis, de plusieurs véritables creepypastas) que d'une page vers laquelle de futures publications pourront pointer dans un souci de clarté. Le texte suivant est en effet une longue compilation de petites légendes urbaines soviétiques en tous genres provenant de cette page.
Je n'ai pas traduit les trois derniers chapitres, car on s'éloignait
carrément du creepy, que ça partait plutôt dans les petits racontars
sans intérêt ou, pour le passage sur les personnalités célèbres, que ça
n'aurait avancé personne puisqu'il s'agit de légendes urbaines sur des
individus soviétiques totalement inconnus chez nous. Voyez donc ceci comme une petite plongée dans l'imaginaire collectif russe et soviétique, qui devrait vous dépayser et vous sera très utile pour comprendre les prochaines traductions de pastas russes, qui doivent reprendre sous peu. Assez parlé, place aux légendes !
Il ne s’agit la plupart du temps pas tant de légendes que de phobies, enfantines ou non, qui ont fait l’objet de tant de commérages peu crédibles et ont été agrémentés de tant de détails qu’elles ont presque fini par acquérir un goût de réel. Toute personne ayant raconté quelque chose du genre indique obligatoirement que ça lui est arrivé, ou à une de ses bonnes connaissances, ou à une bonne connaissance d’une de ses bonnes connaissances…
I) Dangers et morts étranges
Les mutants de Tchernobyl
Après l’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl, les animaux ont muté en d’énormes monstres assoiffés de sang. En 1993, un film intitulé « Les monstres » tellement mauvais qu’il en est devenu appréciable a été réalisé à propos des créatures gigantesques rôdant dans la zone de Tchernobyl.
Les serpents dans les canalisations
Il s’agit d’une variante de la légende urbaine américaine à propos des crocodiles dans les égouts de New York. Quelqu’un aurait balancé des œufs de serpent venimeux dans les toilettes. Ils auraient éclos et les serpents seraient devenus monnaie courante près des cadavres. Ils pourraient sortir des toilettes et vous mordre là où il faut…
Les rats du métro
Dans le métro vivent d’énormes rats mutants. Les conducteurs les voient souvent et les écrasent. Selon une version, on aurait pris un bull-terrier errant et qui aurait vécu assez longtemps dans une des stations du métro moscovite pour un rat de la taille d’un chien. C’était à l’époque où cette race n’était pas très connue en Union soviétique. C’est précisément ces proportions, « la taille d’un chien », qu’on a repris dans les articles de journaux.
L’invasion de hamsters
Au tout début de l’ère Khrouchtchev, vers 1955, il y a eu un hiver très rude avec beaucoup de neiges et des congères qui gelaient souvent.
Et cette année, un terrible fléau s’est abattu sur les régions centrales de la Russie…
De gigantesques hamsters sont apparus d’on ne sait où en grand nombre. Ils étaient en bonne santé, de la taille d’un petit chien et pouvaient atteindre un poids de quelques kilos. De ce que j’ai compris de leur description, il s’agissait vraiment de hamsters, et leur pelage était roux-blanc-noir. Les hamsters géants étaient étonnamment agressifs. Ils se rassemblaient près des congères gelées ou sur des monticules et guettaient les gens.
Lorsque ces derniers s’approchaient trop, ils se jetaient sur eux pour les mordre. Ils sautaient d’ailleurs très haut et visaient la jugulaire. Si plusieurs d’entre eux s’attaquaient à une personne, il était très difficile de s’en libérer, ces animaux étaient très forts. Ils étaient capables de tuer les enfants et les jeunes adolescents. Apparemment, ils auraient commencé à s’attaquer aux humains à cause de la faim car l’année avait été très mauvaise pour la nourriture, l’hiver était très rude et ils n’avaient probablement pas fait de réserves de gras.
Les escalators
La localisation de l’histoire est variable : Léningrad, Moscou, Kiev. Un accident d’escalator aurait projeté les gens dans une faille s’élargissant, et ceux-ci auraient été broyés par de gigantesques engrenages. Encore aujourd’hui, certains ont peur de les emprunter.
Cette histoire est partie de rumeurs (puisqu’il n’y a jamais eu d’annonce officielle) d’un accident à la station Aviamotornaya.
Tout le monde est mort
Un petit garçon jouait avec des ciseaux et s’est crevé les deux yeux. Alors que la mère courait partout dans l’appartement avec son petit garçon désormais aveugle, sa fille s’est noyée dans la baignoire. Voyant cela, la mère s’est jetée par la fenêtre du dixième étage. En rentrant, le père, voyant sa femme étalée sur le goudron, son fils aveugle et sa fille noyée, a pris son fusil, tué son fils et a retourné l’arme contre lui. Tout le monde est mort.
Les moustiques-vampires
Les moustiques ont sucé tout le sang : lors de la construction de la ligne ferroviaire Magistrale Baïkal-Amour (ou BAM), on a retrouvé un cadavre complètement vidé de son sang. Apparemment, les origines de cette légende remontent aux années 20 ou 30. Dans les camps de Solovski d’appellation particulière (SLON), il existait une forme de torture qui consistait à laisser un prisonnier complètement nu et attaché à un arbre toute la nuit « aux moustiques ». Les nuages de moustiques et d’autres saletés pouvaient tout simplement boire tout le sang du prisonnier.
Le motard assassiné
Un motard aurait déboulé devant un cortège de voitures dans lequel se trouvait un membre du Politburo (selon les versions, le Secrétaire Général lui-même) et aurait été abattu par la sécurité. Une autre version dit que le motard, par curiosité, avait voulu voir à quelle vitesse se déplaçait le cortège gouvernemental à Moscou. À cette fin, il s’est caché dans les buissons de la route Roubliovski avec un radar. À cette vitesse, la sécurité ne pouvait simplement pas voir qui les visait avec quoi depuis les buissons, et leur réaction a été machinale et fulgurante : ils ont ouvert le feu. Une version moins violente dit qu’un mec bourré serait allé se soulager derrière une voiture, sauf que cette voiture était celle de convoyeurs de fonds, et ceux-ci l’ont abattu, le prenant pour un voleur.
La fille d’un agent du KGB
Une fois, un groupe de racailles s’en est pris à une jeune fille. Celle-ci a tué l’un d’entre eux et sérieusement estropié l’autre. Il s’est avéré que c’était la fille d’un agent du KGB qui lui avait secrètement enseigné les points vitaux sur lesquels on peut frapper pour mettre momentanément quelqu’un hors d’état de nuire. Dans une autre version, ce n’est pas une fille mais un agent à la retraite qui se rendait à sa maison de campagne et à qui on essayait de voler sa voiture, ou bien tout simplement un agent en civil, ou alors une vieille dame ayant été agente dans sa jeunesse.
L’arme psychique
On raconte que dans l’arsenal de différents services secrets à travers le monde se trouve une arme psychique. Dirigée contre un ennemi, elle induirait un sentiment de peur intense.
Certains disent que le KGB s’en est servi contre des indésirables, que si l’on pointait l’émetteur suffisamment longtemps en direction de l’appartement de la cible, elle perdait la tête et se suicidait.
Et la meilleure défense contre ce genre d’arme était, bien sûr, un casque fait de feuilles d’aluminium.
Le chef de chantier
Dans chaque ville soviétique, il y a une histoire d’un chef de chantier qui aurait été emmuré vivant par ses employés.
II) Crimes et criminels
Fischer
Durant la chasse d’un certain psychopathe soviétique (pour être précis, de Sergueï Golovkine, dont le compte des seuls meurtres prouvés s’élevait à 11), un gamin a menti à la police en affirmant qu’il avait vu ce gars avec un tatouage « Fischer » sur la main. Il a fini par se faire griller après quelques temps. Mais plus d’une génération de pionniers (NdT : comprendre ici enfants de 9 à 14 ans) a entendu parler des méfaits du psychopathe Fischer non loin de leurs chambres de camps de vacances. Je mentionne ce racontar de pionniers parce qu’au contraire des dames blanches et autres voitures immatriculées S.S.D. (NdT : référence à une autre légende d’adolescents à propos d’une Volga noire avec ces lettres en guise d’immatriculation, qui signifient Smert’ Sovetskim Detjam, Mort aux Enfants Soviétiques), même les enfants les plus pragmatiques y croyaient. Quoi, même la police y a cru !
D’une manière générale, toutes les histoires de cette section sont des échos d’histoires vraies à propos de psychopathes, une thématique qui était taboue dans les médias soviétiques. Mais les légendes à propos de l’employé-tueur de la compagnie gazière (variante : de la compagnie des eaux) se sont répandues à travers tout le pays. Je peux vous le garantir.
Les mines d’uranium
Les condamnés à mort auraient en réalité été envoyés dans des mines d’uranium, et l’ami d’un ami les rencontrait forcément plus tard, édentés et malades.
Les fascistes
Dans la ville d’Omsk, il y avait une école spéciale pour l’apprentissage de la langue anglaise. Un jour, ils sont descendus dans la rue pour manifester sous des drapeaux fascistes et vêtus d’uniformes SS. Il s’avérait que l’école appartenait en fait à une organisation nazie souterraine. Tous ont été arrêtés sans attendre. Les profs ont été envoyés en prisons et les élèves dans des colonies pénitentiaires pour mineurs.
Une variante de cette histoire tourne autour d’un fonctionnaire ayant détourné beaucoup d’argent (il touchait des pots de vin), dans l’armoire duquel on aurait découvert – horreur ! – un uniforme d’officier SS.
Un petit détail marrant : dans l’air de la 7e symphonie de Chostakovitch, il y avait les mots « Nous sommes de la gestapo, Hitler est notre père ». Les écoliers se racontaient à mi-voix qu’un garçon qui se promenait dans la rue en sifflotant cette mélodie avait été arrêté sur-le-champ par la police.
Oui, et l’un des traits appartenant immanquablement aux fascistes était d’avoir les tempes rasées (NdT : comme un début de sidecut). C’était un peu l’élément principal dans un vrai fasciste. Et il y avait autant de jeunes battus à coups de ceinture dans le train que de 2 (NdT : les notes en Russie sont sur 5) donnés pour la note de comportement à cause de tempes rasées !
Les monstrueux médecins
Les monstrueux médecins étaient une thématique intarissable. Au début des années 80, le pays entier en tremblait. Tout le monde parlait d’un article dans le journal à propos d’un certain médecin de campagne qui avait enlevé la fille des voisins, lui avait coupé les pieds et les mains et la séquestrait dans sa cave. Les voisins avaient apparemment fait quelque chose à son chien et c’était comme ça qu’il s’était vengé. L’article a eu une forte résonnance. Personne ne l’avait lu soi-même, mais il y avait forcément un parent, un ami, un collègue ou une voisine qui l’avait raconté.
Le jour de l’anniversaire d’Hitler
Le jour de l’anniversaire d’Hitler (c’est en soi une légende urbaine sur les groupes de jeunes fascistes), on pend des pionniers avec leur foulard rouge caractéristique.
L’évasion
On dit que lors de la construction des hauteurs staliniennes (NdT : type d’énormes bâtiment contenant des appartements identiques construits lors de la période stalinienne) à Moscou, des prisonniers étaient utilisés comme main d’œuvre. Les maçons, qui n’étaient pas habitués à de telles hauteurs, avaient refusé de travailler. L’un des détenus (on précise parfois qu’il était pilote) aurait fabriqué un deltaplane avec du contreplaqué en trois couches et, après avoir attendu que le vent soit bon, aurait sauté du plus haut étage. L’aérodynamisme de sa création s’est révélé suffisant pour qu’il atterrisse seulement à Tchertanovo (NdT : un des quartiers de la banlieue de Moscou) sans la moindre égratignure.
Il s’est ensuite planqué pendant quelques années en prenant un faux nom et a été réhabilité après un certain temps.
La source la plus probable de cette légende est un précédent réel : des officiers britanniques faits prisonniers ont construit un planeur pour s’échapper du château de Colditz.
Il y a encore une autre histoire à propos d’une évasion d’un camp. Un détenu aurait confectionné un petit avion avec du contreplaqué et une tronçonneuse en guise de moteur et se serait envolé.
On raconte aussi qu’un citoyen est-allemand aurait construit un petit avion et aurait ainsi passé le mur de Berlin. Au niveau de la construction, l’avion aurait rappelé les modèles pour enfant, était très léger et était mis en mouvement grâce au moteur d’un scooter, ce qui lui permettait d’atteindre 100 mètres de hauteur. Cette légende est sans aucun doute une version (plus répandue) de l’histoire du deltaplane et des gratte-ciels staliniens. Pour parler sérieusement, ce n’est pas une légende, étant donné que l’Histoire a vu au moins deux tentatives réussies de construction à l’arrache d’appareil volant pour passer le mur de Berlin.
La défaite d’une personne au hasard au jeu de cartes de criminels
Dans cette histoire : des bandits jouent aux cartes pour faire perdre une place de cinéma. Le perdant s’assoit derrière cette place et, durant la séance, poignarde au cœur le spectateur infortuné avec une alêne.
Sonnerie d’alerte
Les vols d’appartement (comparé à l’époque actuelle) étaient moins courants, mais il y avait beaucoup de légendes à ce sujet. À propos d’une personne qui, afin de s’en prémunir, aurait placé en face de sa porte d’entrée une arme (un fusil ou une arbalète) en partant en vacances. Il y aurait ensuite eu un incendie chez lui, un pompier aurait défoncé sa porte et se serait pris la balle ou la flèche dans le ventre. Une autre personne aurait placé une trompe pour bateau en guise de sonnerie d’alerte ; un voleur aurait forcé sa porte, la trompe aurait fonctionné et celui-ci serait mort à cause du choc acoustique ou de peur.
Une vieille dame, très riche, aurait mis une alarme dans son appartement, parce qu’elle partait souvent. Elle la mettait en route, mais après quelques mois, elle s’était aperçue que de la monnaie disparaissait quand même. Mais il fallait qu’elle parte en Afrique du Sud, pour trois mois. Elle aurait payé en avance pour l’électricité, le gaz, le loyer et l’alarme. Mais au dernier moment, elle aurait été prise d’un doute. Elle aurait acheté de la clonidine, en aurait mélangé une dose mortelle à de la vodka et aurait laissé la bouteille sur la table.
Elle serait rentrée trois mois plus tard pour trouver trois flics (qui s’occupaient de la sécurité privée) morts, assis autour de la table, l’un d’eux ayant à la main un verre non terminé.
Les schizophrènes et les judas
Selon cette légende, certains schizophrènes sonnent aux portes toute la journée et, lorsqu’un propriétaire se décide à regarder à travers le judas, transpercent ce dernier à l’aide d’une pointe en fer. Les conséquences sont évidentes. Pour cette raison, il n’était pas recommandé de regarder à travers l’ouverture de la serrure. Que restait-il aux Soviétiques en guise d’alternative ? Ou bien faire appel à leurs compétences en ingénierie sociale à travers la porte, ou bien utiliser des gri-gris et des pendentifs douteux.
III) Nourriture
La citerne de kvas
Première version : à une époque soviétique reculée, alors qu’on pouvait encore voir les citernes jaunes avec leurs grandes lettres rouges en gras indiquant « Kvas » sur le côté dans les rues de nos villes pendant l’été, il y avait une jeune fille. Et un jour, elle a été violée et tuée. Et le cadavre a été caché dans une citerne qui se trouvait non loin. Le lendemain, la procédure de nettoyage réglementaire n’ayant pas été respectée, le cadavre a été noyé dans le kvas et la citerne a été emmenée pour les ventes du jour.
Il faisait chaud. Les gens buvaient avec joie des boissons fraîches pour étancher la soif qui les torturait.
Alors que le soir approchait, il ne restait plus beaucoup de boisson. Avec la diminution du volume de liquide, le corps de la pauvre jeune fille a bougé. Les restes du kvas sont sortis du robinet avec des cheveux…
Et si seulement c’était le plus horrible ! Si seulement le plus horrible était que les substances provenant de la décomposition s’étaient mélangées dans le kvas ! Mais en plus de tout cela, on a diagnostiqué la syphilis à la jeune fille…
Deuxième version : Une citerne de kvas s’est renversée (en général durant un accident), et on a découvert de gigantesques asticots (dans une autre version, des vers solitaires) dans le fond. Mais le kvas a malgré tout été bu dans des verres à peine nettoyés à la fontaine du coin.
Troisième version : Une longue file d’attente est devant la citerne. Trois kopeks le petit verre, six kopeks le grand. Brusquement, le kvas arrête de couler. Le vendeur s’énerve, disant qu’il doit en rester plus de la moitié, mais qu’il ne peut pas ouvrir la citerne car elle est plombée.
Un spécialiste est appelé (il est peu clair si la file d’attente reste ou non à attendre pendant ce temps).
Celui-ci ouvre la citerne, et à l’intérieur, le cadavre d’un homme flotte dans le kvas, et sa main s’est coincée dans le robinet.
L’histoire est racontée comme si elle s’était produite récemment avec des indications sur la localisation de la citerne.
Dans l’histoire, le kvas n’est JAMAIS remplacé par du lait ou de la bière.
Dans certaines versions, davantage de détails sont donnés sur l’homme : il aurait été un clochard qui aurait forcé la citerne durant la nuit afin d’étancher sa soif, serait malencontreusement tombé dedans et s’y serait noyé (mais dans ces versions, le passage avec le plombage est incohérent).
Le rat et le jardin d’enfants
Un rat (variante : un rat à moitié mort, ayant mangé de la mort-aux-rats répandue justement pour se débarrasser des nuisibles) est tombé dans la marmite dans laquelle on préparait de la bouillie de semoule (NdT : plat très commun pour les enfants soviétiques) pour les enfants. Bien évidemment, après avoir mangé le plat, ils sont tous morts. Et donc, l’ensemble du jardin d’enfant est allé manger les pissenlits par la racine !
C’est probablement l’inconscient collectif soviétique, dans lequel les jardins d’enfants sont détestés justement à cause de la bouillie de semoule, qui a permis la popularité de cette légende urbaine. Il y a même eu un article à ce sujet, intitulé « Comment un rat mort a vaincu l’URSS – l’irrationalité contre le monde soviétique ».
Une préparation contraire aux standards des produits alimentaires
On aurait rajouté du papier toilette dans le cervelas, et la vodka (variante : l’huile de tournesol) aurait été produite à partir de pétrole (variante : de sciure de bois). Du brome aurait été versé dans le thé des soldats pour éviter les abandons de poste momentanés, et du dimédrol dans leur vodka (variante : leur bière) pour qu’ils boivent moins et s’endorment plus vite. Dans la bière encore, on aurait ajouté de la lessive pour qu’elle mousse davantage.
Il y a aussi les choses étranges qu’on retrouvait dans le cervelas (variante : dans les crêpes) : des doigts et des dents humaines, des pattes de rats ou des queues de souris. Encore aujourd’hui, ces racontars sont très répandus (hélas, parfois, ce ne sont d’ailleurs pas de simples racontars).
Du caviar dans des conserves de hareng
Variante 1 : Lors de « l’affaire des poissons » (NdT : une célèbre affaire de corruption), un homme serait allé une conserve d’un kilo de hareng et, rentré chez lui, l’aurait ouvert pour y découvrir du caviar rouge. Il serait alors retourné au magasin pour prendre 10 autres conserves, et aurait trouvé du caviar dans chacune d’elles. Cette histoire était célèbre à l’époque d’Andropov (NdT : grosso modo vers 1983). Les « Voix » (NdT : l’auteur sous-entend ici La Voix de l’Amérique, média interdit sous l’Union soviétique que beaucoup écoutaient en cachette pour contourner la censure) l’ont rendue populaire, disant que c’est comme ça que la célèbre « affaire des poissons » a commencé.
Variante 2 : Une femme se serait rendue à l’épicerie fine Elizeïev pour y acheter une grosse conserve de hareng. En rentrant chez elle, elle y aurait découvert du caviar noir ! Excitée, elle serait repartie au magasin prendre quelques boîtes de plus, mais aurait entendu à la radio (dans le métro ?) qu’un ministre (aucune idée duquel) aurait été arrêté pour une tentative de contrebande de caviar noir dans des boîtes de hareng. La femme aurait pris peur et serait rentrée chez elle sans le caviar.
Pour plus de crédibilité, on ajoutait le nom d’un ministre récemment démis de ses fonctions. C’était en général l’Elizeïev qui constituait le magasin dans lequel se déroulait l’action, et ce pour de bonnes raisons (NdT : une autre affaire de corruption, moins connue, a eu lieu dans ses murs).
Le lait
Il y avait un fameux directeur d’une usine de production de lait, un homme qui avait beaucoup de succès, membre du parti et héros de toutes sortes de compétitions socialistes. Et il avait une femme magnifique, beaucoup plus jeune que lui, que peu de gens avaient vue, mais ceux qui en avaient eu la chance racontaient que sa beauté était indescriptible. Le directeur l’aimait, la choyait et la dorlotait, la gâtait de toutes les manières possibles et satisfaisait toutes ses innocentes fantaisies.
Soudainement, les habitants de la ville ont commencé à remarquer que le lait dans les bouteilles de verre commençait à laisser apparaître un contenu étrange : des ombres bleues et un petit pourcentage de gras. Des retraités vigilants (comme chacun sait, c’est précisément eux qui prenaient toujours les devants des mouvements anonymes) ont assailli les administrations qu’il fallait avec quelques dizaines de lettres anonymes.
Les représentants de ces services ne pouvaient pas ne pas réagir aux demandes des anciens travailleurs, et puis peut-être que l’ordre avait été donné de retirer le directeur qui commençait à agacer les hauts placés du coin. Passer un coup de balais pour le faire déguerpir de sa place bien au chaud ! Ces braves gaillards se sont donc rendus à l’usine, y ont trouvé des irrégularités au niveau des machines, sont remontés un peu plus loin – une petite visite chez le directeur s’est imposée.
Ils sont allés chez l’homme déjà dépossédé, marchant avec leur grand air, et qu’est-ce qu’ils y ont vu ? La magnifique femme du directeur était dans une énorme baignoire remplie de lait frais et prenait soin de son corps, lavait chacune de ses charmantes courbes. Les pièces du puzzle ont commencé à s’assembler, et ils ont compris que l’on ramenait ce lait chez le directeur et, une fois le bain terminé, qu’on le ramenait à l’usine pour le mettre en bouteille. La belle lavait même ses innocentes mains avec du lait frais, elle ne pouvait s’en passer.
C’est ainsi que les vifs habitants de la ville ont découvert le secret de sa beauté, et le directeur, selon ce qu’affirment les anciens et les anonymes, a été fusillé. Le destin de la jeune femme n’est pas connu de manière certaine, mais certains, qui sont proches des hautes sphères, assurent qu’on l’aurait vue à Kiev. Elle serait devenue la femme d’un autre directeur et aurait conservé sa resplendissante beauté et sa poitrine opulente.
Des bananes dans la morgue
Des étudiants en fac de médecine avaient un cours dans une morgue à Moscou. On leur montrait des cadavres, des têtes et d’autres parties de corps. Ils passaient d’un tiroir réfrigéré à un autre, jusqu’à ce qu’ils tombent sur l’un d’eux qui contenait des bananes. Et lorsqu’ils ont demandé ce que des bananes faisaient là-dedans, on leur a répondu que les places qui n’étaient pas occupées par les cadavres étaient louées aux marchands. Et que c’était absolument sans danger pour les personnes qui achèteraient les bananes ensuite. Dans la banlieue, des entrepreneurs auraient même racheté une morgue entière pour la transformer en entrepôt. Certains disent aujourd’hui que c’est précisément pour cette raison que des tâches apparaissent sur les bananes, parce qu’elles murissent avec les morts. Soi-disant que les bananes ne mûriraient pas de cette manière dans la nature.
C’est sûrement des foutaises, mais il vaut mieux tout de même faire attention avec les bananes qui deviennent mouchetées.
IV) Technologie
Les voitures-radars
Les voitures-radars parcouraient les rues et vérifiaient les magnétoscopes à la recherche de cassettes interdites. C’était, pour être précis, à l’époque du boom des cassettes vidéo, et cela a duré jusqu’à l’époque de Gorbatchev.
Et voilà comment se déroulait prétendument la lutte contre le visionnage de films néfastes idéologiquement parlant, tels que Rambo ou 9 semaines ½, à la maison : le courant était coupé dans les logements, et sans électricité, il était impossible de retirer une cassette du magnétoscope. Les agents allaient dans l’appartement visé et dressaient un procès-verbal. Détail à part, à Moscou, on appelait ça des « vidak », et en province des « vidik ».
Les modèles « Tchaïka »
Des missiles ou des mitrailleuses à gros calibres étaient soi-disant cachés dans les « canines » du pare-chocs (NdT : terme utilisé dans le texte original faute de mieux, l’auteur veut dire ici les deux formes sphériques sous la grille, probablement de simples éléments esthétiques) des voitures de modèle Tchaïka du KGB. Il est vrai que toutes les Tchaïka qu’on rencontrait en ville appartenaient à l’administration, mais c’est un détail.
La pellicule rouge
Chez les adolescents de l’Union soviétique, il existait un mythe selon lequel si l’on mettait cette mystérieuse « pellicule rouge » dans un appareil photo, les gens sur les photos apparaitraient sans leurs vêtements. On l’importait depuis l’étranger et elle coûtait très cher. Personne n’en a jamais vu, mais tout le monde rêvait de mettre la main dessus. Et c’était une « histoire pour faire peur » populaire : souvent, après avoir photographié des filles, les garçons leur disaient qu’ils les avaient prises sur pellicule rouge, après quoi il leur fallait s’enfuir pour échapper à leurs camarades un peu trop crédules en furie.
Dans une autre version, il ne s’agissait pas d’une pellicule rouge mais d’un appareil photo infrarouge créé pour les besoins de l’armée. Et il y en avait même qui croyaient que si l’on enduisait le verre de sang de chauve-souris, l’effet serait le même qu’avec la pellicule rouge.
L’antenne à mercure
Comme les « Voix de l’ennemi » étaient brouillées et que l’on voulait les écouter, les gens ont inventé toutes sortes d’antennes. Les antennes contre les brouillages n’aidaient pas vraiment, ce qui, selon moi, a été à l’origine de l’apparition de l’histoire de « l’antenne à mercure ». Selon la légende, on versait du mercure dans un tube de cuivre d’une certaine longueur (personne ne savait laquelle). On plaçait le tube sur le rebord de la fenêtre à l’extérieur et il permettait de capter n’importe quel signal radio avec une clarté de son époustouflante. Même les plus éloignés. L’utilisation de cette antenne était extrêmement limitée par le fait que l’image de tous les téléviseurs du bâtiment disparaissait lorsqu’elle était en marche.
Dans l’une des versions, un certain amateur de radios aurait récolté 10 années durant du mercure goutte par goutte (il fallait en récupérer beaucoup, quasiment un litre), assemblé l’incroyable antenne et commencé à essayer de capter tous les canaux de télévision et de radio existant. Mais une telle antenne brouillait les communications entre les avions et les tours de contrôle, c’est pourquoi l’amateur de radio aurait été arrêté, et le mercure aurait été jeté… Dans une autre version, ce sont des agents du KGB qui se sont rendus chez lui pour faire une perquisition, mais ils n’ont pas pu trouver l’antenne et sont repartis bredouilles, car notre héros l’avait installée dans sa cheminée (eh oui, des agents si naïfs et idiots qu’ils n’avaient pas pensé à la vérifier). Le destin de l’antenne et de son fabriquant après cela est inconnu.
Dans une autre des nombreuses versions, ces antennes étaient fabriquées par le KGB afin d’espionner les communications à l’étranger, et les antennes paraboliques pour la réception satellite seraient en réalité aussi des antennes à mercure, et il ne fallait pas les utiliser, car lorsqu’on les branchait, tous les objets métalliques à proximité commençaient instantanément à fondre.
D’autres moyens de fabriquer une antenne à mercure :
• Le mercure était versé dans une bouteille et un fil électrique était passé par le bouchon. Une variante existe dans laquelle le mercure est versé dans une boîte de baume vietnamien « Golden Star » ;
• Le mercure était versé dans le manche d’un stylo ;
• Dans un thermomètre médical chauffé au maximum, on faisait une ouverture pour passer un fil électrique ;
• Il fallait faire un trou dans une ampoule et la remplir de mercure, puis la brancher, mais cela avait pour risque de rendre tout l’appareil HS et même ce qui y était branché.
Il y a également des versions à propos d’antennes à mercure pour la télévision avec des caractéristiques semblables. Lors de leur utilisation, tous les téléviseurs du quartier s’éteignaient à part le tien, et le KGB repérait rapidement ce genre d’antennes, ce pourquoi personne n’essayait d’en construire.
De manière générale, l’écoute des « Voix » a fait naître beaucoup de légendes. Par exemple, parmi ceux qui n’ont aucune culture technique, il y avait une histoire qui circulait comme quoi des appareils spéciaux étaient installés dans les radios pour que le KGB puisse suivre qui écoutait quoi. Ce qui est intéressant, c’est qu’il est réellement possible de définir sur quelle fréquence une radio est réglée grâce aux émissions parasites de l’hétérodyne. Il y avait aussi une croyance selon laquelle il était pénalement répréhensible d’avoir des diapasons émettant sur les bandes des 19, 16 et 13 mètres (beaucoup de stations étrangères émettent sur ces fréquences, mais elles n’étaient pas brouillées car les radios soviétiques sur le marché étaient dépourvues de tels diapasons). Il y avait aussi une histoire prétendant que sur les bandes magnétiques étrangères livrées en Union soviétique étaient enregistrés des sons particuliers qui avaient un effet nocif sur l’esprit. Il n’est jamais venu à l’esprit de ceux qui croyaient cela que, premièrement, les bandes sont complètement démagnétisées lorsqu’on enregistre dessus, et, deuxièmement, que même si ces sons existaient, les appareils courants n’étaient pas en mesure de les reproduire.
Le couteau à mercure
Il existe, quelque part, un COUTEAU. Dans sa lame, il y a une cavité sur toute sa longueur remplie exactement à moitié de mercure. L’intérêt, c’est que peu importe comment il est lancé, il tournera toujours de sorte à ce que la lame soit en avant (grâce au mercure) et se plantera avec une force effrayante (dans un ennemi, dans un arbre, dans un mur). La légende a également été enrichie de quelques histoires :
1) Comme quoi de tels couteaux n’étaient produits que pour les régiments de SS par la firme Solingen ;
2) Comme quoi il existerait également des canifs de ce genre.
Il y avait également une version à propos d’une batte de baseball creuse remplie à moitié de mercure qui, même dans les mains d’un faiblard, se transformait en arme mortelle. On racontait que les meilleurs joueurs de baseball avaient une batte de ce genre et que c’était grâce à elle qu’ils occupaient les meilleures places dans les championnats.
La chachka de Tchapaev
Tchapaev (NdT : un acteur de la révolution bolchévique sans particularité, tout de même passé à la postérité grâce à un livre de 1923 ayant rencontré un grand succès) possédait une chachka dont l’intérieur était creux et à moitié rempli de mercure. Cela permettait au commandant de division intrépide de trancher les cavaliers ennemis jusqu’à la selle en un seul coup. Cette légende est, sans aucun doute, liée à celle du couteau à mercure, mais elle existe de manière indépendante. Quoiqu’elle pourrait avoir un lien avec la légende de l’épée d’Alexandre Nevski (NdT un des héros historiques les plus populaires de Russie, grand-prince de la ville de Vladimir et vainqueur des Suédois puis des chevaliers teutoniques vers 1240) qui aurait également été remplie d’un liquide pour l’alourdir, histoire répandue parmi les « connaisseurs » des histoires de la cour.
Le numéro spécial
Ce racontar vient du Moscou du début des années 80. Les Moscovites affirmaient qu’il existait un certain numéro, admettons le 777-13-13, dont l’appel permettait de passer en mode soirées téléphoniques, où tout le monde pouvait parler avec tout le monde, certes par-dessus des tonalités courtes ininterrompues.
On en apprend tous les jours. À Leningrad aussi, il y avait un tel numéro, soi-disant une défaillance du commutateur téléphonique de la ville, et il était possible d’y discuter un peu comme sur internet sur aujourd’hui en l’appelant. Et il s’est avéré qu’il y avait la même chose à Moscou. Il n’y a aucun doute sur le fait que c’était alors une légende. Maintenant, il y a même un site sur lequel des gens qui se sont rencontrés via ces chats vocaux se réunissent et s’échangent des anecdotes.
Un internaute de l’Oural se rappelle d’une autre légende de l’époque où il était sur les bancs de l’école : pour une certaine somme, les plus vieux de l’école vendaient un numéro de téléphone secret grâce auquel il était possible de téléphoner gratuitement dans toutes les villes de Russie. Le canal n’était accessible que depuis les cabines téléphoniques, aucune carte n’était nécessaire.
Les radars à la frontière finno-soviétique
La frontière finno-soviétique aurait été contrôlée par des radars spéciaux sur lesquels on pouvait voir n’importe quel être vivant. Afin de les duper, il fallait jeter des feuilles d’aluminium sur la route. C’est ce que faisaient les contrebandiers qui ramenaient des sacs pleins de collants de la Finlande (NdT : sous l’union soviétique, les collants étaient interdits et valaient donc une fortune).
L’URSS souterraine et sous-marine
On racontait qu’il existait d’énormes usines souterraines dans lesquelles d’incroyables technologies secrètes étaient développées. On peut relier ces histoires à celles des tanks capables de se déplacer au fond de l’océan et des hangars sous-marins de l’Atlantique où étaient entreposées des bombes atomiques. Ainsi qu’à celles des sous-marins et des armes tectoniques (le sous-marin se rendait furtivement sous le territoire de l’ennemi et déposait une bombe atomique sous la terre, la bombe explosait et déclenchait un tremblement de terre destructeur).
Encore une fois dans l’Oural, dans la sphère des constructions mécaniques, des bruits courent encore aujourd’hui à propos d’ateliers souterrains. Cela a l’air crédible, car lorsque l’on se rend au déjeuner par les couloirs sous la terre, on peut voir des tunnels sans fin partant dans toutes les directions, barrés par des grilles.
L’île Damanski
En 1969, l’URSS aurait tout simplement rayé l’île Damanski (NdT : île à propos de laquelle existait un litige entre l’Union soviétique et la Chine, qui a mené à une escalade faisant craindre une guerre nucléaire avant le cessez-le feu de la même année ; l’île a été rendue à la Chine en 1991 et s’appelle maintenant île Zhenbao) de la carte avec des lasers (variante : des lance-roquettes multiples). Ainsi que les Chinois. « Comme ça, personne ne l’aura ! »
Les signaux radio d’une autre époque
Un article indépendant a été créé et sera prochainement disponible.
V) Les étrangers et les autres pays
Les dangereux étrangers
Les touristes étrangers auraient donné des friandises (variante : des chewing-gum) infectées avec la tuberculose (variante : remplis d’aiguilles ou de fragments de lames de rasoir, ou encore, plus exotique, des fanons de baleines) aux enfants soviétiques. De ce que je comprends, c’est plutôt les grands-mères qui racontaient ça aux enfants dans un but pédagogique, afin qu’ils n’acceptent rien venant des inconnus.
On parlait parfois de prisonniers à la place des étrangers, qui auraient laissé des bonbons infectés à la tuberculose sur les terrains de jeux. C’est une assez étrange série d’ennemis de la nation soviétique qu’on obtenait là : des étrangers et des taulards.
Une autre version dans le genre mettait en scène des étrangers vendant des jeans infectés à la syphilis aux contrebandiers soviétiques (NdT : les produits occidentaux étaient très appréciés sur le marché noir soviétique), qui les revendaient à leurs concitoyens sans se douter de rien.
Pour l’histoire des jeans, il ne s’agissait parfois pas de syphilis, mais d’un petit sachet contenant des poux caché dans la couture arrière, et qui éclatait au premier lavage, leur permettant de s’échapper.
Ou encore mieux : un noir qu’on aurait vu une nuit en train de laver un organe d’enfant dans le réservoir d’une fontaine à eau. C’est une connaissance de la belle-mère du cousin d’une camarade de classe qui l’aurait vu et qui se serait battu avec lui pour l’arrêter, le tuant par accident. J’ai entendu cette même histoire dans deux grandes villes de républiques différentes… Oui, à chaque fois, on parlait d’un noir. Je pense que ce n’était pas le reflet du racisme des Soviétiques, mais plutôt de leur peur infernale face aux étrangers.
Ou encore une histoire un peu plus soft à propos des dangereux étrangers : elle aurait eu lieu lors d’une certaine parade des pionniers sur la Place Rouge. Soi-disant, les pionniers marchaient en rang au pas cadencé, et de vils étrangers leur jetaient des chewing-gums dans les jambes pour casser le rythme. Mais les pionniers n’en auraient eu cure – voilà un bel exemple de sens civique ! Bien sûr, c’est plutôt une histoire pour enfant, mais elle est belle.
Il y avait aussi une légende assez ancienne à propos des doryphores, qui auraient été répandus par l’Occident impérialiste en URSS afin qu’ils s’attaquent aux récoltes et que les citoyens soviétiques subissent une pénurie de denrées alimentaires.
S.S.D. (NdT : Smert’ Sovetskim Detjam, Mort aux Enfants Soviétiques) : Un bus ou une voiture noire avec des vitres teintées aurait sillonné la ville où l’on racontait l’histoire. On y attirait les enfants pour les emmener vers une destination inconnue. Sur la plaque d’immatriculation de ce véhicule, on pouvait lire les lettre SSD, Mort aux Enfants Soviétiques !
Histoires de Tziganes
Un camarade de classe aimait beaucoup les chewing-gums, mais comme il avait du mal à en trouver, il en avait acheté un à un Tzigane. Lorsqu’il l’a ouvert, il a décidé de le couper en deux, afin de pouvoir faire durer le plaisir. Ce faisant, il aurait découvert à l’intérieur des lames de rasoir. Parfois, les gens y trouvaient des aiguilles, ou la syphilis.
La marijuana
L’Occident faisait totalement partie des légendes urbaines soviétiques. Par exemple, les marins qui s’arrêtaient dans les ports étrangers, ou les chanceux qui avaient l’opportunité d’aller dans le « vrai » Occident, pouvaient acheter de simples cigarettes dans des paquets habituels (Marlboro, Camel, etc.), mais ils pouvaient aussi acheter des cigarettes contenant de la marijuana dans des paquets quasiment identiques (ils étaient simplement marqués de trois petites étoiles sous le nom de la marque) ! Et certains les faisaient passer la douane, et les distribuaient chez nous !
Les Japonais
Les Japonais achetaient tous les verres, car ils étaient toujours emballés dans des boîtes en bois ! Ils refondaient le verre et faisaient des meubles avec le bois.
On leur vendait des arbres, on débarrassait les troncs de leurs branches et de leurs épines, mais les Japonais nous les demandaient aussi, car ils en faisaient des vêtements. J’ai par la suite travaillé dans une région productrice de bois, et je vois bien l’absurdité de l’histoire. Le sous-texte était des plus rabaissant : voyez comme les Japonais sont économes, pas comme nous, crétins de Soviétiques…
De manière générale, le Japon était une légende urbaine à lui tout seul à cette époque (et certes pas uniquement en URSS). Dans les commentaires, on m’a rapporté l’histoire d’un marin qui aurait acheté une montre japonaise qui aurait eu une garantie contre tout, car il aurait été impossible de la briser. Notre marin serait tout de même parvenu à la casser et aurait écrit au producteur, une délégation se serait déplacée et lui aurait payé une gigantesque compensation, mais lui aurait tout de même demandé comment il y était parvenu. Il aurait alors lâché le morceau : il l’avait soi-disant simplement mis dans de l’eau bouillante pendant longtemps.
Matériel audio japonais
Les Japonais auraient mis des cartouches explosives dans leur matériel audio qui se seraient déclenchées si l’on essayait d’ouvrir le couvercle arrière. Soi-disant pour empêcher le reverse engineering. À Saint-Pétersbourg, on disait qu’ils y mettaient des puces spéciales qui grillaient l’appareil si l’on essayait de l’ouvrir pour comprendre comment il fonctionnait.
Les tapis chinois
La nuit, les tapis chinois auraient brillé, représentant la silhouette du défunt Mao Zedong dans sa tombe. Ils auraient été cousus à l’aide d’aiguilles spéciales au phosphore. Le jour, rien n’aurait été visible.
Les échanges
1) À propos des Finnois
Même cet escroc de Veller (NdT : Mikhaïl Veller, auteur connu pour se prendre pour le seul philosophe de la Russie contemporaine et pour ses nombreux ragequit des plateaux télévisés) a fini par prétendre que c’était une histoire vraie, mais je l’ai entendue alors qu’il vivait encore à Tallinn et n’était connu de personne. C’est sûrement un racontar, mais ce qui en fait une légende, à mon sens, est que diverses personnes l’ont entendue de quelqu’un qui jurait l’avoir apprise de l’un de ses protagonistes.
Lorsque les infrastructures olympiques étaient en construction en vue des Jeux Olympiques de 1980, l’URSS a introduit un régime de visas simplifié pour les Finnois (les employés du bâtiment et les touristes), et beaucoup de touristes finnois sont alors allés à Leningrad. Et comme il y avait alors une loi anti-alcool en Finlande (ça aussi, en soi, était aussi une légende urbaine soviétique), bien évidemment, les Finnois venaient surtout dans la capitale culturelle afin de se murger et, bien évidemment, avec de l’alcool du marché noir. Il y avait alors un certain triangle dans la ville : la « Station de la Bière » (Pivnaya), la « Station du Grignotage » (Zakoussotchnaya) et la « Station du Dernier Verre » (Ryoumotchnaya), c’était pour les touristes finnois du genre du triangle des Bermudes. Un autobus rempli de touristes finnois arrivait dès le matin à la Pivnaya, et le chauffeur venait récupérer les corps presque sans vie des fêtards imbibés. Un jour, un des Finnois se serait lié d’amitié avec l’alcoolique du coin lors de son expérimentation de la gnole locale, et lui aurait offert ses chaussures et son costume de bonté de cœur. Et il aurait gardé ses grolles et sa veste en échange.
Lorsque le chauffeur « récupérait les siens », par habitude, il se repérait surtout aux chaussures qui étaient très différentes de ce qu’on trouvait en Union soviétique. Du coup, notre légendaire alcoolique, ouvrant les yeux, se serait aperçu que personne autour de lui ne parlait russe, et que son épopée en état d’ébriété lui avait fait quitter sa patrie. La même surprise attendait le Finnois.
On ne s’est pas ennuyé à organiser d’extraction dans les règles du protocole, l’échange de notre alcoolique et de l’alcoolique finnois a eu lieu au point de contrôle « Torfyanovka », dans la plus pure tradition des films d’espionnage occidentaux et soviétiques tels que La saison morte.
2) Le Japonais de l’Armée soviétique
Un touriste soviétique a échangé un uniforme d’un soldat ayant raccroché contre sa veste à un contrebandier. Pendant l’échange, il s’est fait dérober ses documents d’identité et son argent. L’histoire se déroulait en hiver. Pas d’argent, pas de veste, il a donc décidé d’enfiler l’uniforme pour ne pas mourir de froid et se rendre à l’hôtel où se trouvait son groupe d’étudiants. Il a erré dans les rues et a fini par se perdre. Il est alors tombé sur une patrouille militaire, qui l’a interpellé et a exigé de voir sa carte de militaire.
« Euuuuuuuuh
– Bordel le bridé, ça fait deux ans que t’es dans l’armée et t’as toujours pas appris le russe ? »
On lui a mis un coup sur la tête et on l’a emmené au bureau de garnison. Ils ont commencé à appeler leurs unités :
« Eh, un Ouzbek se serait pas barré de chez vous ?
– Si si, on en a un qui s’est tiré. »
Le commandant de l’unité est venu récupérer le Japonais. Heureusement pour lui, il ne lui restait que six mois à servir. Il a terminé son service en obtenant toute une flopée de récompenses pour exemplarité. Il est ensuite allé à l’ambassade pour rentrer chez lui.
3) Les missionnaires soviétiques en Afrique
Afin d’apporter de l’aide, l’URSS a envoyé une cargaison de nourriture pour enfants aux pays africains amicaux. Après un certain temps, la cargaison est revenue intacte, mais les agents de la mission diplomatique qui l’accompagnaient avaient disparu sans laisser de trace !
Il s’est avéré que les locaux, voyant des enfants dessinés sur les emballages, avaient cru qu’on avait voulu les nourrir de viande humaine (d’enfants) pour se moquer d’eux (à cause de l’analphabétisme de la population des pays africains, on dessinait sur leurs emballages ce qu’ils contenaient). Les agents ont été tués sur place, toute la marchandise a été renvoyée, et les gouvernements ne se sont plus montrés amicaux envers l’URSS jusqu’à l’arrivée de Gorbatchev.
Il y avait encore une autre histoire. Dans un pays africain, notre ambassadeur se serait fait boulotter parce qu’il aurait dit un truc qu’il ne fallait pas. L’URSS aurait envoyé une lettre de protestation, commencé à se saisir de l’affaire et tout le tintouin… Ils auraient failli envoyer les troupes. Le président aurait répondu qu’ils reconnaissaient l’avoir dévoré, et que si c’était si offensant, il n’y avait qu’à manger leur ambassadeur en retour ! Le tout le plus sérieusement du monde. Une histoire tout à fait vraie.
Le déficit
En voilà une bien formulée dont je me rappelle : une jeune femme serait parvenue à se procurer un maillot de bain étranger grâce à une connaissance pour un prix très élevé (ou bien, il est possible que ce soit une de ses connaissances étrangères qui lui ait directement offert). Elle l’a enfilée, magnifique, les gens se trouvant à la plage l’ont suivie du regard alors qu’elle allait se baignait dans la mer. Et lorsqu’elle en est ressortie, à sa grande surprise, le maillot de bain est devenu complètement transparent, révélant tout son corps, et elle a ressenti un terrible sentiment de honte et de colère. C’est pour ça qu’il ne fallait pas lorgner sur les marchandises étrangères et ne porter que ce que les citoyens soviétiques portaient.
C’était bien évidemment un complot occidental pour miner la morale de notre pays.
Les deux valises d’aiguilles
Il y avait une histoire selon laquelle un militaire avait ramené d’Allemagne deux grandes valises d’aiguilles à coudre (une autre version parle d’aiguilles de tourne-disque ; il y avait un énorme déficit pour ces deux produits à l’époque), et avait permis à la population de longues années à l’abri de la misère. L’argument selon lequel une valise pleine d’aiguille pèserait une tonne et demie ne convainquait personne, tout le monde croyait à ce racontar.
Cette histoire est souvent répétée dans des interviews de vétérans de la Deuxième Guerre mondiale sur le site iremember. Sans parler bien sûr d’une valise entière, ils ramenaient souvent des aiguilles de tourne-disque, ainsi que des aiguilles pour les machines à coudre de l’Allemagne occupée, car elles prenaient peu de place et coûtaient très cher en URSS puisqu’elles n’existaient pas sur le marché.
Le trésor d’Elisseïev
Un descendant du célèbre marchand Elisseïev (NdT : Grigori Elisseïev, fondateur de la dynastie marchande des Elisseïev et de la chaîne de magasin portant le même nom) vivant aux USA aurait un jour appelé les autorités soviétiques pour leur indiquer qu’avant son émigration (NdT : en France), Elisseïev aurait dissimulé un trésor dans son magasin à Petrograd (NdT : autre nom de Saint-Pétersbourg). Bien évidemment, la restitution du trésor à l’héritier a été refusée, mais, si vous vous souvenez bien, le magasin Elisseïev a été longtemps fermé, soi-disant pour une restauration. Tout a été retourné, même les sols ont été fouillés, mais rien n’y a été trouvé.
Alors, le jeune Elisseïev a repris contact avec les Soviétiques et a promis de leur montrer où se trouver le trésor en échange d’un certain pourcentage. Il n’y avait rien à faire, alors ils ont accepté. Lorsqu’il est arrivé, il a vu que le magasin était tout retourné, a souri, montré le lustre et leur a dit de le démonter.
L’énorme lustre a été descendu, et il s’est avéré que sous la fine couche de bronze qui recouvrait la décoration, elle était en réalité faite intégralement d’un or pur avec un nombre très élevé de carats.
Il ne s’agit la plupart du temps pas tant de légendes que de phobies, enfantines ou non, qui ont fait l’objet de tant de commérages peu crédibles et ont été agrémentés de tant de détails qu’elles ont presque fini par acquérir un goût de réel. Toute personne ayant raconté quelque chose du genre indique obligatoirement que ça lui est arrivé, ou à une de ses bonnes connaissances, ou à une bonne connaissance d’une de ses bonnes connaissances…
I) Dangers et morts étranges
Les mutants de Tchernobyl
Après l’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl, les animaux ont muté en d’énormes monstres assoiffés de sang. En 1993, un film intitulé « Les monstres » tellement mauvais qu’il en est devenu appréciable a été réalisé à propos des créatures gigantesques rôdant dans la zone de Tchernobyl.
Les serpents dans les canalisations
Il s’agit d’une variante de la légende urbaine américaine à propos des crocodiles dans les égouts de New York. Quelqu’un aurait balancé des œufs de serpent venimeux dans les toilettes. Ils auraient éclos et les serpents seraient devenus monnaie courante près des cadavres. Ils pourraient sortir des toilettes et vous mordre là où il faut…
Les rats du métro
Dans le métro vivent d’énormes rats mutants. Les conducteurs les voient souvent et les écrasent. Selon une version, on aurait pris un bull-terrier errant et qui aurait vécu assez longtemps dans une des stations du métro moscovite pour un rat de la taille d’un chien. C’était à l’époque où cette race n’était pas très connue en Union soviétique. C’est précisément ces proportions, « la taille d’un chien », qu’on a repris dans les articles de journaux.
L’invasion de hamsters
Au tout début de l’ère Khrouchtchev, vers 1955, il y a eu un hiver très rude avec beaucoup de neiges et des congères qui gelaient souvent.
Et cette année, un terrible fléau s’est abattu sur les régions centrales de la Russie…
De gigantesques hamsters sont apparus d’on ne sait où en grand nombre. Ils étaient en bonne santé, de la taille d’un petit chien et pouvaient atteindre un poids de quelques kilos. De ce que j’ai compris de leur description, il s’agissait vraiment de hamsters, et leur pelage était roux-blanc-noir. Les hamsters géants étaient étonnamment agressifs. Ils se rassemblaient près des congères gelées ou sur des monticules et guettaient les gens.
Lorsque ces derniers s’approchaient trop, ils se jetaient sur eux pour les mordre. Ils sautaient d’ailleurs très haut et visaient la jugulaire. Si plusieurs d’entre eux s’attaquaient à une personne, il était très difficile de s’en libérer, ces animaux étaient très forts. Ils étaient capables de tuer les enfants et les jeunes adolescents. Apparemment, ils auraient commencé à s’attaquer aux humains à cause de la faim car l’année avait été très mauvaise pour la nourriture, l’hiver était très rude et ils n’avaient probablement pas fait de réserves de gras.
Les escalators
La localisation de l’histoire est variable : Léningrad, Moscou, Kiev. Un accident d’escalator aurait projeté les gens dans une faille s’élargissant, et ceux-ci auraient été broyés par de gigantesques engrenages. Encore aujourd’hui, certains ont peur de les emprunter.
Cette histoire est partie de rumeurs (puisqu’il n’y a jamais eu d’annonce officielle) d’un accident à la station Aviamotornaya.
Tout le monde est mort
Un petit garçon jouait avec des ciseaux et s’est crevé les deux yeux. Alors que la mère courait partout dans l’appartement avec son petit garçon désormais aveugle, sa fille s’est noyée dans la baignoire. Voyant cela, la mère s’est jetée par la fenêtre du dixième étage. En rentrant, le père, voyant sa femme étalée sur le goudron, son fils aveugle et sa fille noyée, a pris son fusil, tué son fils et a retourné l’arme contre lui. Tout le monde est mort.
Les moustiques-vampires
Les moustiques ont sucé tout le sang : lors de la construction de la ligne ferroviaire Magistrale Baïkal-Amour (ou BAM), on a retrouvé un cadavre complètement vidé de son sang. Apparemment, les origines de cette légende remontent aux années 20 ou 30. Dans les camps de Solovski d’appellation particulière (SLON), il existait une forme de torture qui consistait à laisser un prisonnier complètement nu et attaché à un arbre toute la nuit « aux moustiques ». Les nuages de moustiques et d’autres saletés pouvaient tout simplement boire tout le sang du prisonnier.
Le motard assassiné
Un motard aurait déboulé devant un cortège de voitures dans lequel se trouvait un membre du Politburo (selon les versions, le Secrétaire Général lui-même) et aurait été abattu par la sécurité. Une autre version dit que le motard, par curiosité, avait voulu voir à quelle vitesse se déplaçait le cortège gouvernemental à Moscou. À cette fin, il s’est caché dans les buissons de la route Roubliovski avec un radar. À cette vitesse, la sécurité ne pouvait simplement pas voir qui les visait avec quoi depuis les buissons, et leur réaction a été machinale et fulgurante : ils ont ouvert le feu. Une version moins violente dit qu’un mec bourré serait allé se soulager derrière une voiture, sauf que cette voiture était celle de convoyeurs de fonds, et ceux-ci l’ont abattu, le prenant pour un voleur.
La fille d’un agent du KGB
Une fois, un groupe de racailles s’en est pris à une jeune fille. Celle-ci a tué l’un d’entre eux et sérieusement estropié l’autre. Il s’est avéré que c’était la fille d’un agent du KGB qui lui avait secrètement enseigné les points vitaux sur lesquels on peut frapper pour mettre momentanément quelqu’un hors d’état de nuire. Dans une autre version, ce n’est pas une fille mais un agent à la retraite qui se rendait à sa maison de campagne et à qui on essayait de voler sa voiture, ou bien tout simplement un agent en civil, ou alors une vieille dame ayant été agente dans sa jeunesse.
L’arme psychique
On raconte que dans l’arsenal de différents services secrets à travers le monde se trouve une arme psychique. Dirigée contre un ennemi, elle induirait un sentiment de peur intense.
Certains disent que le KGB s’en est servi contre des indésirables, que si l’on pointait l’émetteur suffisamment longtemps en direction de l’appartement de la cible, elle perdait la tête et se suicidait.
Et la meilleure défense contre ce genre d’arme était, bien sûr, un casque fait de feuilles d’aluminium.
Le chef de chantier
Dans chaque ville soviétique, il y a une histoire d’un chef de chantier qui aurait été emmuré vivant par ses employés.
II) Crimes et criminels
Fischer
Durant la chasse d’un certain psychopathe soviétique (pour être précis, de Sergueï Golovkine, dont le compte des seuls meurtres prouvés s’élevait à 11), un gamin a menti à la police en affirmant qu’il avait vu ce gars avec un tatouage « Fischer » sur la main. Il a fini par se faire griller après quelques temps. Mais plus d’une génération de pionniers (NdT : comprendre ici enfants de 9 à 14 ans) a entendu parler des méfaits du psychopathe Fischer non loin de leurs chambres de camps de vacances. Je mentionne ce racontar de pionniers parce qu’au contraire des dames blanches et autres voitures immatriculées S.S.D. (NdT : référence à une autre légende d’adolescents à propos d’une Volga noire avec ces lettres en guise d’immatriculation, qui signifient Smert’ Sovetskim Detjam, Mort aux Enfants Soviétiques), même les enfants les plus pragmatiques y croyaient. Quoi, même la police y a cru !
D’une manière générale, toutes les histoires de cette section sont des échos d’histoires vraies à propos de psychopathes, une thématique qui était taboue dans les médias soviétiques. Mais les légendes à propos de l’employé-tueur de la compagnie gazière (variante : de la compagnie des eaux) se sont répandues à travers tout le pays. Je peux vous le garantir.
Les mines d’uranium
Les condamnés à mort auraient en réalité été envoyés dans des mines d’uranium, et l’ami d’un ami les rencontrait forcément plus tard, édentés et malades.
Les fascistes
Dans la ville d’Omsk, il y avait une école spéciale pour l’apprentissage de la langue anglaise. Un jour, ils sont descendus dans la rue pour manifester sous des drapeaux fascistes et vêtus d’uniformes SS. Il s’avérait que l’école appartenait en fait à une organisation nazie souterraine. Tous ont été arrêtés sans attendre. Les profs ont été envoyés en prisons et les élèves dans des colonies pénitentiaires pour mineurs.
Une variante de cette histoire tourne autour d’un fonctionnaire ayant détourné beaucoup d’argent (il touchait des pots de vin), dans l’armoire duquel on aurait découvert – horreur ! – un uniforme d’officier SS.
Un petit détail marrant : dans l’air de la 7e symphonie de Chostakovitch, il y avait les mots « Nous sommes de la gestapo, Hitler est notre père ». Les écoliers se racontaient à mi-voix qu’un garçon qui se promenait dans la rue en sifflotant cette mélodie avait été arrêté sur-le-champ par la police.
Oui, et l’un des traits appartenant immanquablement aux fascistes était d’avoir les tempes rasées (NdT : comme un début de sidecut). C’était un peu l’élément principal dans un vrai fasciste. Et il y avait autant de jeunes battus à coups de ceinture dans le train que de 2 (NdT : les notes en Russie sont sur 5) donnés pour la note de comportement à cause de tempes rasées !
Les monstrueux médecins
Les monstrueux médecins étaient une thématique intarissable. Au début des années 80, le pays entier en tremblait. Tout le monde parlait d’un article dans le journal à propos d’un certain médecin de campagne qui avait enlevé la fille des voisins, lui avait coupé les pieds et les mains et la séquestrait dans sa cave. Les voisins avaient apparemment fait quelque chose à son chien et c’était comme ça qu’il s’était vengé. L’article a eu une forte résonnance. Personne ne l’avait lu soi-même, mais il y avait forcément un parent, un ami, un collègue ou une voisine qui l’avait raconté.
Le jour de l’anniversaire d’Hitler
Le jour de l’anniversaire d’Hitler (c’est en soi une légende urbaine sur les groupes de jeunes fascistes), on pend des pionniers avec leur foulard rouge caractéristique.
L’évasion
On dit que lors de la construction des hauteurs staliniennes (NdT : type d’énormes bâtiment contenant des appartements identiques construits lors de la période stalinienne) à Moscou, des prisonniers étaient utilisés comme main d’œuvre. Les maçons, qui n’étaient pas habitués à de telles hauteurs, avaient refusé de travailler. L’un des détenus (on précise parfois qu’il était pilote) aurait fabriqué un deltaplane avec du contreplaqué en trois couches et, après avoir attendu que le vent soit bon, aurait sauté du plus haut étage. L’aérodynamisme de sa création s’est révélé suffisant pour qu’il atterrisse seulement à Tchertanovo (NdT : un des quartiers de la banlieue de Moscou) sans la moindre égratignure.
Il s’est ensuite planqué pendant quelques années en prenant un faux nom et a été réhabilité après un certain temps.
La source la plus probable de cette légende est un précédent réel : des officiers britanniques faits prisonniers ont construit un planeur pour s’échapper du château de Colditz.
Il y a encore une autre histoire à propos d’une évasion d’un camp. Un détenu aurait confectionné un petit avion avec du contreplaqué et une tronçonneuse en guise de moteur et se serait envolé.
On raconte aussi qu’un citoyen est-allemand aurait construit un petit avion et aurait ainsi passé le mur de Berlin. Au niveau de la construction, l’avion aurait rappelé les modèles pour enfant, était très léger et était mis en mouvement grâce au moteur d’un scooter, ce qui lui permettait d’atteindre 100 mètres de hauteur. Cette légende est sans aucun doute une version (plus répandue) de l’histoire du deltaplane et des gratte-ciels staliniens. Pour parler sérieusement, ce n’est pas une légende, étant donné que l’Histoire a vu au moins deux tentatives réussies de construction à l’arrache d’appareil volant pour passer le mur de Berlin.
La défaite d’une personne au hasard au jeu de cartes de criminels
Dans cette histoire : des bandits jouent aux cartes pour faire perdre une place de cinéma. Le perdant s’assoit derrière cette place et, durant la séance, poignarde au cœur le spectateur infortuné avec une alêne.
Sonnerie d’alerte
Les vols d’appartement (comparé à l’époque actuelle) étaient moins courants, mais il y avait beaucoup de légendes à ce sujet. À propos d’une personne qui, afin de s’en prémunir, aurait placé en face de sa porte d’entrée une arme (un fusil ou une arbalète) en partant en vacances. Il y aurait ensuite eu un incendie chez lui, un pompier aurait défoncé sa porte et se serait pris la balle ou la flèche dans le ventre. Une autre personne aurait placé une trompe pour bateau en guise de sonnerie d’alerte ; un voleur aurait forcé sa porte, la trompe aurait fonctionné et celui-ci serait mort à cause du choc acoustique ou de peur.
Une vieille dame, très riche, aurait mis une alarme dans son appartement, parce qu’elle partait souvent. Elle la mettait en route, mais après quelques mois, elle s’était aperçue que de la monnaie disparaissait quand même. Mais il fallait qu’elle parte en Afrique du Sud, pour trois mois. Elle aurait payé en avance pour l’électricité, le gaz, le loyer et l’alarme. Mais au dernier moment, elle aurait été prise d’un doute. Elle aurait acheté de la clonidine, en aurait mélangé une dose mortelle à de la vodka et aurait laissé la bouteille sur la table.
Elle serait rentrée trois mois plus tard pour trouver trois flics (qui s’occupaient de la sécurité privée) morts, assis autour de la table, l’un d’eux ayant à la main un verre non terminé.
Les schizophrènes et les judas
Selon cette légende, certains schizophrènes sonnent aux portes toute la journée et, lorsqu’un propriétaire se décide à regarder à travers le judas, transpercent ce dernier à l’aide d’une pointe en fer. Les conséquences sont évidentes. Pour cette raison, il n’était pas recommandé de regarder à travers l’ouverture de la serrure. Que restait-il aux Soviétiques en guise d’alternative ? Ou bien faire appel à leurs compétences en ingénierie sociale à travers la porte, ou bien utiliser des gri-gris et des pendentifs douteux.
III) Nourriture
La citerne de kvas
Première version : à une époque soviétique reculée, alors qu’on pouvait encore voir les citernes jaunes avec leurs grandes lettres rouges en gras indiquant « Kvas » sur le côté dans les rues de nos villes pendant l’été, il y avait une jeune fille. Et un jour, elle a été violée et tuée. Et le cadavre a été caché dans une citerne qui se trouvait non loin. Le lendemain, la procédure de nettoyage réglementaire n’ayant pas été respectée, le cadavre a été noyé dans le kvas et la citerne a été emmenée pour les ventes du jour.
Il faisait chaud. Les gens buvaient avec joie des boissons fraîches pour étancher la soif qui les torturait.
Alors que le soir approchait, il ne restait plus beaucoup de boisson. Avec la diminution du volume de liquide, le corps de la pauvre jeune fille a bougé. Les restes du kvas sont sortis du robinet avec des cheveux…
Et si seulement c’était le plus horrible ! Si seulement le plus horrible était que les substances provenant de la décomposition s’étaient mélangées dans le kvas ! Mais en plus de tout cela, on a diagnostiqué la syphilis à la jeune fille…
Deuxième version : Une citerne de kvas s’est renversée (en général durant un accident), et on a découvert de gigantesques asticots (dans une autre version, des vers solitaires) dans le fond. Mais le kvas a malgré tout été bu dans des verres à peine nettoyés à la fontaine du coin.
Troisième version : Une longue file d’attente est devant la citerne. Trois kopeks le petit verre, six kopeks le grand. Brusquement, le kvas arrête de couler. Le vendeur s’énerve, disant qu’il doit en rester plus de la moitié, mais qu’il ne peut pas ouvrir la citerne car elle est plombée.
Un spécialiste est appelé (il est peu clair si la file d’attente reste ou non à attendre pendant ce temps).
Celui-ci ouvre la citerne, et à l’intérieur, le cadavre d’un homme flotte dans le kvas, et sa main s’est coincée dans le robinet.
L’histoire est racontée comme si elle s’était produite récemment avec des indications sur la localisation de la citerne.
Dans l’histoire, le kvas n’est JAMAIS remplacé par du lait ou de la bière.
Dans certaines versions, davantage de détails sont donnés sur l’homme : il aurait été un clochard qui aurait forcé la citerne durant la nuit afin d’étancher sa soif, serait malencontreusement tombé dedans et s’y serait noyé (mais dans ces versions, le passage avec le plombage est incohérent).
Le rat et le jardin d’enfants
Un rat (variante : un rat à moitié mort, ayant mangé de la mort-aux-rats répandue justement pour se débarrasser des nuisibles) est tombé dans la marmite dans laquelle on préparait de la bouillie de semoule (NdT : plat très commun pour les enfants soviétiques) pour les enfants. Bien évidemment, après avoir mangé le plat, ils sont tous morts. Et donc, l’ensemble du jardin d’enfant est allé manger les pissenlits par la racine !
C’est probablement l’inconscient collectif soviétique, dans lequel les jardins d’enfants sont détestés justement à cause de la bouillie de semoule, qui a permis la popularité de cette légende urbaine. Il y a même eu un article à ce sujet, intitulé « Comment un rat mort a vaincu l’URSS – l’irrationalité contre le monde soviétique ».
Une préparation contraire aux standards des produits alimentaires
On aurait rajouté du papier toilette dans le cervelas, et la vodka (variante : l’huile de tournesol) aurait été produite à partir de pétrole (variante : de sciure de bois). Du brome aurait été versé dans le thé des soldats pour éviter les abandons de poste momentanés, et du dimédrol dans leur vodka (variante : leur bière) pour qu’ils boivent moins et s’endorment plus vite. Dans la bière encore, on aurait ajouté de la lessive pour qu’elle mousse davantage.
Il y a aussi les choses étranges qu’on retrouvait dans le cervelas (variante : dans les crêpes) : des doigts et des dents humaines, des pattes de rats ou des queues de souris. Encore aujourd’hui, ces racontars sont très répandus (hélas, parfois, ce ne sont d’ailleurs pas de simples racontars).
Du caviar dans des conserves de hareng
Variante 1 : Lors de « l’affaire des poissons » (NdT : une célèbre affaire de corruption), un homme serait allé une conserve d’un kilo de hareng et, rentré chez lui, l’aurait ouvert pour y découvrir du caviar rouge. Il serait alors retourné au magasin pour prendre 10 autres conserves, et aurait trouvé du caviar dans chacune d’elles. Cette histoire était célèbre à l’époque d’Andropov (NdT : grosso modo vers 1983). Les « Voix » (NdT : l’auteur sous-entend ici La Voix de l’Amérique, média interdit sous l’Union soviétique que beaucoup écoutaient en cachette pour contourner la censure) l’ont rendue populaire, disant que c’est comme ça que la célèbre « affaire des poissons » a commencé.
Variante 2 : Une femme se serait rendue à l’épicerie fine Elizeïev pour y acheter une grosse conserve de hareng. En rentrant chez elle, elle y aurait découvert du caviar noir ! Excitée, elle serait repartie au magasin prendre quelques boîtes de plus, mais aurait entendu à la radio (dans le métro ?) qu’un ministre (aucune idée duquel) aurait été arrêté pour une tentative de contrebande de caviar noir dans des boîtes de hareng. La femme aurait pris peur et serait rentrée chez elle sans le caviar.
Pour plus de crédibilité, on ajoutait le nom d’un ministre récemment démis de ses fonctions. C’était en général l’Elizeïev qui constituait le magasin dans lequel se déroulait l’action, et ce pour de bonnes raisons (NdT : une autre affaire de corruption, moins connue, a eu lieu dans ses murs).
Le lait
Il y avait un fameux directeur d’une usine de production de lait, un homme qui avait beaucoup de succès, membre du parti et héros de toutes sortes de compétitions socialistes. Et il avait une femme magnifique, beaucoup plus jeune que lui, que peu de gens avaient vue, mais ceux qui en avaient eu la chance racontaient que sa beauté était indescriptible. Le directeur l’aimait, la choyait et la dorlotait, la gâtait de toutes les manières possibles et satisfaisait toutes ses innocentes fantaisies.
Soudainement, les habitants de la ville ont commencé à remarquer que le lait dans les bouteilles de verre commençait à laisser apparaître un contenu étrange : des ombres bleues et un petit pourcentage de gras. Des retraités vigilants (comme chacun sait, c’est précisément eux qui prenaient toujours les devants des mouvements anonymes) ont assailli les administrations qu’il fallait avec quelques dizaines de lettres anonymes.
Les représentants de ces services ne pouvaient pas ne pas réagir aux demandes des anciens travailleurs, et puis peut-être que l’ordre avait été donné de retirer le directeur qui commençait à agacer les hauts placés du coin. Passer un coup de balais pour le faire déguerpir de sa place bien au chaud ! Ces braves gaillards se sont donc rendus à l’usine, y ont trouvé des irrégularités au niveau des machines, sont remontés un peu plus loin – une petite visite chez le directeur s’est imposée.
Ils sont allés chez l’homme déjà dépossédé, marchant avec leur grand air, et qu’est-ce qu’ils y ont vu ? La magnifique femme du directeur était dans une énorme baignoire remplie de lait frais et prenait soin de son corps, lavait chacune de ses charmantes courbes. Les pièces du puzzle ont commencé à s’assembler, et ils ont compris que l’on ramenait ce lait chez le directeur et, une fois le bain terminé, qu’on le ramenait à l’usine pour le mettre en bouteille. La belle lavait même ses innocentes mains avec du lait frais, elle ne pouvait s’en passer.
C’est ainsi que les vifs habitants de la ville ont découvert le secret de sa beauté, et le directeur, selon ce qu’affirment les anciens et les anonymes, a été fusillé. Le destin de la jeune femme n’est pas connu de manière certaine, mais certains, qui sont proches des hautes sphères, assurent qu’on l’aurait vue à Kiev. Elle serait devenue la femme d’un autre directeur et aurait conservé sa resplendissante beauté et sa poitrine opulente.
Des bananes dans la morgue
Des étudiants en fac de médecine avaient un cours dans une morgue à Moscou. On leur montrait des cadavres, des têtes et d’autres parties de corps. Ils passaient d’un tiroir réfrigéré à un autre, jusqu’à ce qu’ils tombent sur l’un d’eux qui contenait des bananes. Et lorsqu’ils ont demandé ce que des bananes faisaient là-dedans, on leur a répondu que les places qui n’étaient pas occupées par les cadavres étaient louées aux marchands. Et que c’était absolument sans danger pour les personnes qui achèteraient les bananes ensuite. Dans la banlieue, des entrepreneurs auraient même racheté une morgue entière pour la transformer en entrepôt. Certains disent aujourd’hui que c’est précisément pour cette raison que des tâches apparaissent sur les bananes, parce qu’elles murissent avec les morts. Soi-disant que les bananes ne mûriraient pas de cette manière dans la nature.
C’est sûrement des foutaises, mais il vaut mieux tout de même faire attention avec les bananes qui deviennent mouchetées.
IV) Technologie
Les voitures-radars
Les voitures-radars parcouraient les rues et vérifiaient les magnétoscopes à la recherche de cassettes interdites. C’était, pour être précis, à l’époque du boom des cassettes vidéo, et cela a duré jusqu’à l’époque de Gorbatchev.
Et voilà comment se déroulait prétendument la lutte contre le visionnage de films néfastes idéologiquement parlant, tels que Rambo ou 9 semaines ½, à la maison : le courant était coupé dans les logements, et sans électricité, il était impossible de retirer une cassette du magnétoscope. Les agents allaient dans l’appartement visé et dressaient un procès-verbal. Détail à part, à Moscou, on appelait ça des « vidak », et en province des « vidik ».
Les modèles « Tchaïka »
Des missiles ou des mitrailleuses à gros calibres étaient soi-disant cachés dans les « canines » du pare-chocs (NdT : terme utilisé dans le texte original faute de mieux, l’auteur veut dire ici les deux formes sphériques sous la grille, probablement de simples éléments esthétiques) des voitures de modèle Tchaïka du KGB. Il est vrai que toutes les Tchaïka qu’on rencontrait en ville appartenaient à l’administration, mais c’est un détail.
La pellicule rouge
Chez les adolescents de l’Union soviétique, il existait un mythe selon lequel si l’on mettait cette mystérieuse « pellicule rouge » dans un appareil photo, les gens sur les photos apparaitraient sans leurs vêtements. On l’importait depuis l’étranger et elle coûtait très cher. Personne n’en a jamais vu, mais tout le monde rêvait de mettre la main dessus. Et c’était une « histoire pour faire peur » populaire : souvent, après avoir photographié des filles, les garçons leur disaient qu’ils les avaient prises sur pellicule rouge, après quoi il leur fallait s’enfuir pour échapper à leurs camarades un peu trop crédules en furie.
Dans une autre version, il ne s’agissait pas d’une pellicule rouge mais d’un appareil photo infrarouge créé pour les besoins de l’armée. Et il y en avait même qui croyaient que si l’on enduisait le verre de sang de chauve-souris, l’effet serait le même qu’avec la pellicule rouge.
L’antenne à mercure
Comme les « Voix de l’ennemi » étaient brouillées et que l’on voulait les écouter, les gens ont inventé toutes sortes d’antennes. Les antennes contre les brouillages n’aidaient pas vraiment, ce qui, selon moi, a été à l’origine de l’apparition de l’histoire de « l’antenne à mercure ». Selon la légende, on versait du mercure dans un tube de cuivre d’une certaine longueur (personne ne savait laquelle). On plaçait le tube sur le rebord de la fenêtre à l’extérieur et il permettait de capter n’importe quel signal radio avec une clarté de son époustouflante. Même les plus éloignés. L’utilisation de cette antenne était extrêmement limitée par le fait que l’image de tous les téléviseurs du bâtiment disparaissait lorsqu’elle était en marche.
Dans l’une des versions, un certain amateur de radios aurait récolté 10 années durant du mercure goutte par goutte (il fallait en récupérer beaucoup, quasiment un litre), assemblé l’incroyable antenne et commencé à essayer de capter tous les canaux de télévision et de radio existant. Mais une telle antenne brouillait les communications entre les avions et les tours de contrôle, c’est pourquoi l’amateur de radio aurait été arrêté, et le mercure aurait été jeté… Dans une autre version, ce sont des agents du KGB qui se sont rendus chez lui pour faire une perquisition, mais ils n’ont pas pu trouver l’antenne et sont repartis bredouilles, car notre héros l’avait installée dans sa cheminée (eh oui, des agents si naïfs et idiots qu’ils n’avaient pas pensé à la vérifier). Le destin de l’antenne et de son fabriquant après cela est inconnu.
Dans une autre des nombreuses versions, ces antennes étaient fabriquées par le KGB afin d’espionner les communications à l’étranger, et les antennes paraboliques pour la réception satellite seraient en réalité aussi des antennes à mercure, et il ne fallait pas les utiliser, car lorsqu’on les branchait, tous les objets métalliques à proximité commençaient instantanément à fondre.
D’autres moyens de fabriquer une antenne à mercure :
• Le mercure était versé dans une bouteille et un fil électrique était passé par le bouchon. Une variante existe dans laquelle le mercure est versé dans une boîte de baume vietnamien « Golden Star » ;
• Le mercure était versé dans le manche d’un stylo ;
• Dans un thermomètre médical chauffé au maximum, on faisait une ouverture pour passer un fil électrique ;
• Il fallait faire un trou dans une ampoule et la remplir de mercure, puis la brancher, mais cela avait pour risque de rendre tout l’appareil HS et même ce qui y était branché.
Il y a également des versions à propos d’antennes à mercure pour la télévision avec des caractéristiques semblables. Lors de leur utilisation, tous les téléviseurs du quartier s’éteignaient à part le tien, et le KGB repérait rapidement ce genre d’antennes, ce pourquoi personne n’essayait d’en construire.
De manière générale, l’écoute des « Voix » a fait naître beaucoup de légendes. Par exemple, parmi ceux qui n’ont aucune culture technique, il y avait une histoire qui circulait comme quoi des appareils spéciaux étaient installés dans les radios pour que le KGB puisse suivre qui écoutait quoi. Ce qui est intéressant, c’est qu’il est réellement possible de définir sur quelle fréquence une radio est réglée grâce aux émissions parasites de l’hétérodyne. Il y avait aussi une croyance selon laquelle il était pénalement répréhensible d’avoir des diapasons émettant sur les bandes des 19, 16 et 13 mètres (beaucoup de stations étrangères émettent sur ces fréquences, mais elles n’étaient pas brouillées car les radios soviétiques sur le marché étaient dépourvues de tels diapasons). Il y avait aussi une histoire prétendant que sur les bandes magnétiques étrangères livrées en Union soviétique étaient enregistrés des sons particuliers qui avaient un effet nocif sur l’esprit. Il n’est jamais venu à l’esprit de ceux qui croyaient cela que, premièrement, les bandes sont complètement démagnétisées lorsqu’on enregistre dessus, et, deuxièmement, que même si ces sons existaient, les appareils courants n’étaient pas en mesure de les reproduire.
Le couteau à mercure
Il existe, quelque part, un COUTEAU. Dans sa lame, il y a une cavité sur toute sa longueur remplie exactement à moitié de mercure. L’intérêt, c’est que peu importe comment il est lancé, il tournera toujours de sorte à ce que la lame soit en avant (grâce au mercure) et se plantera avec une force effrayante (dans un ennemi, dans un arbre, dans un mur). La légende a également été enrichie de quelques histoires :
1) Comme quoi de tels couteaux n’étaient produits que pour les régiments de SS par la firme Solingen ;
2) Comme quoi il existerait également des canifs de ce genre.
Il y avait également une version à propos d’une batte de baseball creuse remplie à moitié de mercure qui, même dans les mains d’un faiblard, se transformait en arme mortelle. On racontait que les meilleurs joueurs de baseball avaient une batte de ce genre et que c’était grâce à elle qu’ils occupaient les meilleures places dans les championnats.
La chachka de Tchapaev
Tchapaev (NdT : un acteur de la révolution bolchévique sans particularité, tout de même passé à la postérité grâce à un livre de 1923 ayant rencontré un grand succès) possédait une chachka dont l’intérieur était creux et à moitié rempli de mercure. Cela permettait au commandant de division intrépide de trancher les cavaliers ennemis jusqu’à la selle en un seul coup. Cette légende est, sans aucun doute, liée à celle du couteau à mercure, mais elle existe de manière indépendante. Quoiqu’elle pourrait avoir un lien avec la légende de l’épée d’Alexandre Nevski (NdT un des héros historiques les plus populaires de Russie, grand-prince de la ville de Vladimir et vainqueur des Suédois puis des chevaliers teutoniques vers 1240) qui aurait également été remplie d’un liquide pour l’alourdir, histoire répandue parmi les « connaisseurs » des histoires de la cour.
Le numéro spécial
Ce racontar vient du Moscou du début des années 80. Les Moscovites affirmaient qu’il existait un certain numéro, admettons le 777-13-13, dont l’appel permettait de passer en mode soirées téléphoniques, où tout le monde pouvait parler avec tout le monde, certes par-dessus des tonalités courtes ininterrompues.
On en apprend tous les jours. À Leningrad aussi, il y avait un tel numéro, soi-disant une défaillance du commutateur téléphonique de la ville, et il était possible d’y discuter un peu comme sur internet sur aujourd’hui en l’appelant. Et il s’est avéré qu’il y avait la même chose à Moscou. Il n’y a aucun doute sur le fait que c’était alors une légende. Maintenant, il y a même un site sur lequel des gens qui se sont rencontrés via ces chats vocaux se réunissent et s’échangent des anecdotes.
Un internaute de l’Oural se rappelle d’une autre légende de l’époque où il était sur les bancs de l’école : pour une certaine somme, les plus vieux de l’école vendaient un numéro de téléphone secret grâce auquel il était possible de téléphoner gratuitement dans toutes les villes de Russie. Le canal n’était accessible que depuis les cabines téléphoniques, aucune carte n’était nécessaire.
Les radars à la frontière finno-soviétique
La frontière finno-soviétique aurait été contrôlée par des radars spéciaux sur lesquels on pouvait voir n’importe quel être vivant. Afin de les duper, il fallait jeter des feuilles d’aluminium sur la route. C’est ce que faisaient les contrebandiers qui ramenaient des sacs pleins de collants de la Finlande (NdT : sous l’union soviétique, les collants étaient interdits et valaient donc une fortune).
L’URSS souterraine et sous-marine
On racontait qu’il existait d’énormes usines souterraines dans lesquelles d’incroyables technologies secrètes étaient développées. On peut relier ces histoires à celles des tanks capables de se déplacer au fond de l’océan et des hangars sous-marins de l’Atlantique où étaient entreposées des bombes atomiques. Ainsi qu’à celles des sous-marins et des armes tectoniques (le sous-marin se rendait furtivement sous le territoire de l’ennemi et déposait une bombe atomique sous la terre, la bombe explosait et déclenchait un tremblement de terre destructeur).
Encore une fois dans l’Oural, dans la sphère des constructions mécaniques, des bruits courent encore aujourd’hui à propos d’ateliers souterrains. Cela a l’air crédible, car lorsque l’on se rend au déjeuner par les couloirs sous la terre, on peut voir des tunnels sans fin partant dans toutes les directions, barrés par des grilles.
L’île Damanski
En 1969, l’URSS aurait tout simplement rayé l’île Damanski (NdT : île à propos de laquelle existait un litige entre l’Union soviétique et la Chine, qui a mené à une escalade faisant craindre une guerre nucléaire avant le cessez-le feu de la même année ; l’île a été rendue à la Chine en 1991 et s’appelle maintenant île Zhenbao) de la carte avec des lasers (variante : des lance-roquettes multiples). Ainsi que les Chinois. « Comme ça, personne ne l’aura ! »
Les signaux radio d’une autre époque
Un article indépendant a été créé et sera prochainement disponible.
V) Les étrangers et les autres pays
Les dangereux étrangers
Les touristes étrangers auraient donné des friandises (variante : des chewing-gum) infectées avec la tuberculose (variante : remplis d’aiguilles ou de fragments de lames de rasoir, ou encore, plus exotique, des fanons de baleines) aux enfants soviétiques. De ce que je comprends, c’est plutôt les grands-mères qui racontaient ça aux enfants dans un but pédagogique, afin qu’ils n’acceptent rien venant des inconnus.
On parlait parfois de prisonniers à la place des étrangers, qui auraient laissé des bonbons infectés à la tuberculose sur les terrains de jeux. C’est une assez étrange série d’ennemis de la nation soviétique qu’on obtenait là : des étrangers et des taulards.
Une autre version dans le genre mettait en scène des étrangers vendant des jeans infectés à la syphilis aux contrebandiers soviétiques (NdT : les produits occidentaux étaient très appréciés sur le marché noir soviétique), qui les revendaient à leurs concitoyens sans se douter de rien.
Pour l’histoire des jeans, il ne s’agissait parfois pas de syphilis, mais d’un petit sachet contenant des poux caché dans la couture arrière, et qui éclatait au premier lavage, leur permettant de s’échapper.
Ou encore mieux : un noir qu’on aurait vu une nuit en train de laver un organe d’enfant dans le réservoir d’une fontaine à eau. C’est une connaissance de la belle-mère du cousin d’une camarade de classe qui l’aurait vu et qui se serait battu avec lui pour l’arrêter, le tuant par accident. J’ai entendu cette même histoire dans deux grandes villes de républiques différentes… Oui, à chaque fois, on parlait d’un noir. Je pense que ce n’était pas le reflet du racisme des Soviétiques, mais plutôt de leur peur infernale face aux étrangers.
Ou encore une histoire un peu plus soft à propos des dangereux étrangers : elle aurait eu lieu lors d’une certaine parade des pionniers sur la Place Rouge. Soi-disant, les pionniers marchaient en rang au pas cadencé, et de vils étrangers leur jetaient des chewing-gums dans les jambes pour casser le rythme. Mais les pionniers n’en auraient eu cure – voilà un bel exemple de sens civique ! Bien sûr, c’est plutôt une histoire pour enfant, mais elle est belle.
Il y avait aussi une légende assez ancienne à propos des doryphores, qui auraient été répandus par l’Occident impérialiste en URSS afin qu’ils s’attaquent aux récoltes et que les citoyens soviétiques subissent une pénurie de denrées alimentaires.
S.S.D. (NdT : Smert’ Sovetskim Detjam, Mort aux Enfants Soviétiques) : Un bus ou une voiture noire avec des vitres teintées aurait sillonné la ville où l’on racontait l’histoire. On y attirait les enfants pour les emmener vers une destination inconnue. Sur la plaque d’immatriculation de ce véhicule, on pouvait lire les lettre SSD, Mort aux Enfants Soviétiques !
Histoires de Tziganes
Un camarade de classe aimait beaucoup les chewing-gums, mais comme il avait du mal à en trouver, il en avait acheté un à un Tzigane. Lorsqu’il l’a ouvert, il a décidé de le couper en deux, afin de pouvoir faire durer le plaisir. Ce faisant, il aurait découvert à l’intérieur des lames de rasoir. Parfois, les gens y trouvaient des aiguilles, ou la syphilis.
La marijuana
L’Occident faisait totalement partie des légendes urbaines soviétiques. Par exemple, les marins qui s’arrêtaient dans les ports étrangers, ou les chanceux qui avaient l’opportunité d’aller dans le « vrai » Occident, pouvaient acheter de simples cigarettes dans des paquets habituels (Marlboro, Camel, etc.), mais ils pouvaient aussi acheter des cigarettes contenant de la marijuana dans des paquets quasiment identiques (ils étaient simplement marqués de trois petites étoiles sous le nom de la marque) ! Et certains les faisaient passer la douane, et les distribuaient chez nous !
Les Japonais
Les Japonais achetaient tous les verres, car ils étaient toujours emballés dans des boîtes en bois ! Ils refondaient le verre et faisaient des meubles avec le bois.
On leur vendait des arbres, on débarrassait les troncs de leurs branches et de leurs épines, mais les Japonais nous les demandaient aussi, car ils en faisaient des vêtements. J’ai par la suite travaillé dans une région productrice de bois, et je vois bien l’absurdité de l’histoire. Le sous-texte était des plus rabaissant : voyez comme les Japonais sont économes, pas comme nous, crétins de Soviétiques…
De manière générale, le Japon était une légende urbaine à lui tout seul à cette époque (et certes pas uniquement en URSS). Dans les commentaires, on m’a rapporté l’histoire d’un marin qui aurait acheté une montre japonaise qui aurait eu une garantie contre tout, car il aurait été impossible de la briser. Notre marin serait tout de même parvenu à la casser et aurait écrit au producteur, une délégation se serait déplacée et lui aurait payé une gigantesque compensation, mais lui aurait tout de même demandé comment il y était parvenu. Il aurait alors lâché le morceau : il l’avait soi-disant simplement mis dans de l’eau bouillante pendant longtemps.
Matériel audio japonais
Les Japonais auraient mis des cartouches explosives dans leur matériel audio qui se seraient déclenchées si l’on essayait d’ouvrir le couvercle arrière. Soi-disant pour empêcher le reverse engineering. À Saint-Pétersbourg, on disait qu’ils y mettaient des puces spéciales qui grillaient l’appareil si l’on essayait de l’ouvrir pour comprendre comment il fonctionnait.
Les tapis chinois
La nuit, les tapis chinois auraient brillé, représentant la silhouette du défunt Mao Zedong dans sa tombe. Ils auraient été cousus à l’aide d’aiguilles spéciales au phosphore. Le jour, rien n’aurait été visible.
Les échanges
1) À propos des Finnois
Même cet escroc de Veller (NdT : Mikhaïl Veller, auteur connu pour se prendre pour le seul philosophe de la Russie contemporaine et pour ses nombreux ragequit des plateaux télévisés) a fini par prétendre que c’était une histoire vraie, mais je l’ai entendue alors qu’il vivait encore à Tallinn et n’était connu de personne. C’est sûrement un racontar, mais ce qui en fait une légende, à mon sens, est que diverses personnes l’ont entendue de quelqu’un qui jurait l’avoir apprise de l’un de ses protagonistes.
Lorsque les infrastructures olympiques étaient en construction en vue des Jeux Olympiques de 1980, l’URSS a introduit un régime de visas simplifié pour les Finnois (les employés du bâtiment et les touristes), et beaucoup de touristes finnois sont alors allés à Leningrad. Et comme il y avait alors une loi anti-alcool en Finlande (ça aussi, en soi, était aussi une légende urbaine soviétique), bien évidemment, les Finnois venaient surtout dans la capitale culturelle afin de se murger et, bien évidemment, avec de l’alcool du marché noir. Il y avait alors un certain triangle dans la ville : la « Station de la Bière » (Pivnaya), la « Station du Grignotage » (Zakoussotchnaya) et la « Station du Dernier Verre » (Ryoumotchnaya), c’était pour les touristes finnois du genre du triangle des Bermudes. Un autobus rempli de touristes finnois arrivait dès le matin à la Pivnaya, et le chauffeur venait récupérer les corps presque sans vie des fêtards imbibés. Un jour, un des Finnois se serait lié d’amitié avec l’alcoolique du coin lors de son expérimentation de la gnole locale, et lui aurait offert ses chaussures et son costume de bonté de cœur. Et il aurait gardé ses grolles et sa veste en échange.
Lorsque le chauffeur « récupérait les siens », par habitude, il se repérait surtout aux chaussures qui étaient très différentes de ce qu’on trouvait en Union soviétique. Du coup, notre légendaire alcoolique, ouvrant les yeux, se serait aperçu que personne autour de lui ne parlait russe, et que son épopée en état d’ébriété lui avait fait quitter sa patrie. La même surprise attendait le Finnois.
On ne s’est pas ennuyé à organiser d’extraction dans les règles du protocole, l’échange de notre alcoolique et de l’alcoolique finnois a eu lieu au point de contrôle « Torfyanovka », dans la plus pure tradition des films d’espionnage occidentaux et soviétiques tels que La saison morte.
2) Le Japonais de l’Armée soviétique
Un touriste soviétique a échangé un uniforme d’un soldat ayant raccroché contre sa veste à un contrebandier. Pendant l’échange, il s’est fait dérober ses documents d’identité et son argent. L’histoire se déroulait en hiver. Pas d’argent, pas de veste, il a donc décidé d’enfiler l’uniforme pour ne pas mourir de froid et se rendre à l’hôtel où se trouvait son groupe d’étudiants. Il a erré dans les rues et a fini par se perdre. Il est alors tombé sur une patrouille militaire, qui l’a interpellé et a exigé de voir sa carte de militaire.
« Euuuuuuuuh
– Bordel le bridé, ça fait deux ans que t’es dans l’armée et t’as toujours pas appris le russe ? »
On lui a mis un coup sur la tête et on l’a emmené au bureau de garnison. Ils ont commencé à appeler leurs unités :
« Eh, un Ouzbek se serait pas barré de chez vous ?
– Si si, on en a un qui s’est tiré. »
Le commandant de l’unité est venu récupérer le Japonais. Heureusement pour lui, il ne lui restait que six mois à servir. Il a terminé son service en obtenant toute une flopée de récompenses pour exemplarité. Il est ensuite allé à l’ambassade pour rentrer chez lui.
3) Les missionnaires soviétiques en Afrique
Afin d’apporter de l’aide, l’URSS a envoyé une cargaison de nourriture pour enfants aux pays africains amicaux. Après un certain temps, la cargaison est revenue intacte, mais les agents de la mission diplomatique qui l’accompagnaient avaient disparu sans laisser de trace !
Il s’est avéré que les locaux, voyant des enfants dessinés sur les emballages, avaient cru qu’on avait voulu les nourrir de viande humaine (d’enfants) pour se moquer d’eux (à cause de l’analphabétisme de la population des pays africains, on dessinait sur leurs emballages ce qu’ils contenaient). Les agents ont été tués sur place, toute la marchandise a été renvoyée, et les gouvernements ne se sont plus montrés amicaux envers l’URSS jusqu’à l’arrivée de Gorbatchev.
Il y avait encore une autre histoire. Dans un pays africain, notre ambassadeur se serait fait boulotter parce qu’il aurait dit un truc qu’il ne fallait pas. L’URSS aurait envoyé une lettre de protestation, commencé à se saisir de l’affaire et tout le tintouin… Ils auraient failli envoyer les troupes. Le président aurait répondu qu’ils reconnaissaient l’avoir dévoré, et que si c’était si offensant, il n’y avait qu’à manger leur ambassadeur en retour ! Le tout le plus sérieusement du monde. Une histoire tout à fait vraie.
Le déficit
En voilà une bien formulée dont je me rappelle : une jeune femme serait parvenue à se procurer un maillot de bain étranger grâce à une connaissance pour un prix très élevé (ou bien, il est possible que ce soit une de ses connaissances étrangères qui lui ait directement offert). Elle l’a enfilée, magnifique, les gens se trouvant à la plage l’ont suivie du regard alors qu’elle allait se baignait dans la mer. Et lorsqu’elle en est ressortie, à sa grande surprise, le maillot de bain est devenu complètement transparent, révélant tout son corps, et elle a ressenti un terrible sentiment de honte et de colère. C’est pour ça qu’il ne fallait pas lorgner sur les marchandises étrangères et ne porter que ce que les citoyens soviétiques portaient.
C’était bien évidemment un complot occidental pour miner la morale de notre pays.
Les deux valises d’aiguilles
Il y avait une histoire selon laquelle un militaire avait ramené d’Allemagne deux grandes valises d’aiguilles à coudre (une autre version parle d’aiguilles de tourne-disque ; il y avait un énorme déficit pour ces deux produits à l’époque), et avait permis à la population de longues années à l’abri de la misère. L’argument selon lequel une valise pleine d’aiguille pèserait une tonne et demie ne convainquait personne, tout le monde croyait à ce racontar.
Cette histoire est souvent répétée dans des interviews de vétérans de la Deuxième Guerre mondiale sur le site iremember. Sans parler bien sûr d’une valise entière, ils ramenaient souvent des aiguilles de tourne-disque, ainsi que des aiguilles pour les machines à coudre de l’Allemagne occupée, car elles prenaient peu de place et coûtaient très cher en URSS puisqu’elles n’existaient pas sur le marché.
Le trésor d’Elisseïev
Un descendant du célèbre marchand Elisseïev (NdT : Grigori Elisseïev, fondateur de la dynastie marchande des Elisseïev et de la chaîne de magasin portant le même nom) vivant aux USA aurait un jour appelé les autorités soviétiques pour leur indiquer qu’avant son émigration (NdT : en France), Elisseïev aurait dissimulé un trésor dans son magasin à Petrograd (NdT : autre nom de Saint-Pétersbourg). Bien évidemment, la restitution du trésor à l’héritier a été refusée, mais, si vous vous souvenez bien, le magasin Elisseïev a été longtemps fermé, soi-disant pour une restauration. Tout a été retourné, même les sols ont été fouillés, mais rien n’y a été trouvé.
Alors, le jeune Elisseïev a repris contact avec les Soviétiques et a promis de leur montrer où se trouver le trésor en échange d’un certain pourcentage. Il n’y avait rien à faire, alors ils ont accepté. Lorsqu’il est arrivé, il a vu que le magasin était tout retourné, a souri, montré le lustre et leur a dit de le démonter.
L’énorme lustre a été descendu, et il s’est avéré que sous la fine couche de bronze qui recouvrait la décoration, elle était en réalité faite intégralement d’un or pur avec un nombre très élevé de carats.
Traduction : Magnosa
Comme indiqué au début, la page originale avec les 3 chapitres qui n'ont pas été retenus est consultable ici, pour ceux qui seraient curieux et liraient le russe (ou auraient un bon traducteur). Vous êtes désormais fin prêts pour la reprise des traductions de creepypastas russes !
COOOOOOL *_*
RépondreSupprimerPassionnant ce petit recueil
RépondreSupprimerJ'adore le principe "J'ai mangé ton premier ministre, tu peux donc manger le mien"
RépondreSupprimerJe savais pas que tu parlais russe, Magnosa O.o
RépondreSupprimerSympa en tous cas ces légendes urbaines soviétiques !